mardi 20 novembre 2018

Effacement


Voilà,
je me lève la nuit (ce sont des choses qui arrivent) parce que soudain dans mes rêves je me souviens que je n'ai pas programmé le lave-vaisselle et qu'il ne reste plus un seul couvert propre pour le lendemain matin. Mais aussitôt debout je suis incapable de me tenir en équilibre. Je penche inexplicablement à droite, ce qui, au regard de ce qui se passe un peu partout en Europe, est finalement très tendance. Je me déplace en me tenant aux murs. Le sol paraît se dérober. Quelques minutes après être descendu à la cuisine, je me recouche vaguement inquiet. J'imagine tumeur accident cérébral désordre de l'oreille interne dégénérescence neurologique. L'hypocondrie est une névrose que j'ai héritée de ma génitrice qui toute sa vie a eu une mauvaise santé de fer et continue de sévir à quatre-vingt sept ans passés (on se rassure comme on peut). Allume la radio pour penser à autre chose et pouvoir m'endormir. Cela prend un certain temps. Plus que jamais abandonné, délaissé. Entends tout de même des choses qui me plaisent et m'éloignent des idées noires. Tentation de shazamer. Mais tablette et smartphone sont en recharge. Me promets de retrouver les titres le lendemain sur le site de la chaîne musicale en question. Finis par glisser dans le sommeil. Rêves de désirs érotiques assez confus où je rencontre de très jeunes femmes et d'assez ambigus messieurs avec des projets plutôt canailles qui restent en suspens. Il me reste quand même encore un petit fond de libido qui croupit comme une vieille mare. Des regrets oppressent ma poitrine. Au réveil, premier souci, retrouver les noms, les morceaux. Mais en équilibre toujours instable. Il y a "Harlem Nocturne" par Lalo Schifrin, "Les planètes" de Holst, une pièce — Façade — de Sir William Walton dont j'ignorais l'existence bien qu'il fût longtemps compositeur officiel à la cour des Windsor. S'ensuit une pénible journée où je dois, en dépit de tous ces vertiges cependant me déplacer à travers le quartier de la Défense dans un état cotonneux avec par intermittences la fugitive sensation que le paysage s'efface. (linked with our world tuesday)

7 commentaires:

  1. Ah, ces nuits où le sommeil s'efface à sa façon, ou plutôt se refuse à nous, ces nuits qui nous incitent à tenter de nous raccrocher, si l'on peut dire, à quelque chose de notre routine diurne, comme écouter de la musique, ces nuits où rôdent les pires cauchemars, ceux que l'on fait en état de veille, où nous assaillent les pires pensées associées à un futur de merde où défilent chemises noires sur le chemin de Rome ou gilets jaunes qui voudraient envahir le palais de l'Elysée comme on aurait envahi la Bastille -- la confusion des temps et des objectifs laisse songeur... --, ces nuits que je connais aussi et qui me dévastent. Heureusement, c'est mon "happy end" de ce jour, je rencontre dans la journée d'autres humains aussi angoissés que moi, avec qui je puis partager mes idées noires et un café de la même couleur. Mais un café d'une saveur autrement délicieuse, et c'est là le véritable "happy end".

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  2. Tes mots me font penser à un poème de David Peña intitulé...Equilibrio

    Cálmate.
    Despacio.
    Respira hondo… ahora:
    pon primero un pie,
    después el otro;
    la mirada fija al fondo
    en un punto indefinido.

    Al fondo, muy al fondo.

    Advierte como el tiempo se detiene
    a cada paso tuyo,
    sobre el pávido temblor de la cuerda.
    No te pares,
    no tengas prisa,
    no atiendas a críticas o halagos:
    sólo tú conoces tu camino
    ...

    A la caída no temas,
    pues ya estás en el suelo.
    A qué habrías de temer
    cuando todo lo has perdido.

    La promesa del caos: el equilibrio.

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    1. très beau. Merci beaucoup pour cet élégant et subtil poème
      "La promesse du chaos, l'équilibre". Je prends

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  3. Les insomniaques ont en général toute ma sympathie

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  4. You should think about writing as a profession, or perhaps you do already. Although a semi serious post you still made me smile Kwarkito 😊

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  5. How did I miss this one--- As I get older there is more to jangle my brain and keep me awake. Perth, immediately above, is correct. Your writing is always a fascination, even though I mistrust the translations. I've probably said it before, but I'm glad that we ran into each other on this vast, insane network. Oh yes--- Marty has a recent instagram picture which shows someone with a paint roller and a wall. There was a moment when I thought she had found out what you really do in your spare time.

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  6. I completely agree with Bill and Perth. I told you often in French, but maybe you'll be more convinced in English (:

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