dimanche 29 décembre 2019

Tenir à distance


Voilà,
parfois au spectacle de tous ces gens qui prennent des photos et auxquels, contre mon gré, je ressemble inévitablement, il m'arrive d'être pris de découragement. Je sais que je fais cela, non pour capter le réel, mais plutôt pour le tenir à distance. Souvent ce n'est pas un lieu, une personne ou une situation que je saisis, mais une idée qui me passe par la tête. Combien parmi les gens qui photographient le font-ils aussi, pour donner une forme à leur inquiétude ? 
"En moyenne, chaque jour, plus de 55 millions de photos sont publiées sur Instagram et 350 millions sur Facebook." (Linked with the weekeknd in black and white)

mardi 24 décembre 2019

Les cent ans de Pierre Soulages




Voilà,
Aujourd'hui le peintre Pierre Soulages a cent ans, je me permets ce modeste hommage à ma façon 
avec ces trois gros plans d'une bâche en plastique noir, aperçue par un matin humide, un été, quelque part en Aveyron

jeudi 19 décembre 2019

Sapin de Notre-Dame


Voilà,
je me suis souvenu de ce grand arbre de Noël devant Notre-Dame que j'avais photographié il y a quelques années. Le cherchant dans mes dossiers je ne pensais pas devoir remonter si loin. C'était donc Noël 2014. Aujourd'hui, en raison des travaux, le parvis n'est plus accessible et pour la première fois depuis longtemps, il n'y aura pas de messe de Minuit, là-bas. Voilà une chose que je n'aurais pas faite dans ma vie. Assister à une messe de minuit à Notre-Dame. C'est une lubie que j'ai quelquefois eue. Mais bon, après tout je suis un affreux mécréant, et si j'ai ce fantasme, c'est sans doute quelque chose qui vient de l'enfance, des calendriers de l'avent où l'on voit des petites églises mignonnettes avec de bon chrétiens qui s'y rendent. Ça doit être l'esprit de Noël. Quoiqu'il en soit, je réécoute comme d'habitude à cette époque les mêmes disques, je me prête aux mêmes rituels, et c'est avec allégresse et sans aucune honte que je régresse. De toute façon je m'en fiche puisque personne ne me regarde. Sinon à part cela, il fait un temps anormalement doux sur Paris, bien que le climat social soit très frais.

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dimanche 15 décembre 2019

Dans la forêt des songes

  
Voilà,
peu de mots et une image à la fois simple et fulgurante où il est question de fièvre apaisée. Tu n'oses y croire. Cela te déconcerte. Pourtant tu voudrais à jamais demeurer à cet endroit où quelqu'un t'imagine à ton grand étonnement. Et tu te prends à rêver d'un monde d'enfance et d'apparitions, de fées et de lutins où les corps se transforment au gré des âmes, ces papillons qui butinent à tous les âges de la vie. Un monde où ces mots te feraient sur-le-champ coupeur de feu, magnétiseur, rebouteux, donnant un sens à tout ce qui te traverse, ou bien te changeraient en parfum en musique en un léger souffle d'air, en embrun en caresse en lumière, en cette pierre bleue roulée qui porte son nom et dit-on, chasse les craintes rassure donne courage et attire la chance.
Et tu te souviens qu'en japonais Musubi est le mot qui désigne le lien émotionnel et invisible qui relie deux personnes
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jeudi 12 décembre 2019

Comme la drogue qui me répugne

 

Voilà,
"Écrire c’est comme la drogue qui me répugne et que je prends quand même, le vice que je méprise et dans lequel je vis. Il est des poisons nécessaires, et il en est de fort subtils, composés des ingrédients de l’âme, herbes cueillies dans les ruines cachées de nos rêves, coquelicots noirs trouvés sur le tombeau de nos projets, longues feuilles d’arbres obscènes, agitant leurs branches sur les rives sonores des eaux infernales de l’âme.
Écrire, oui, c’est me perdre, mais tout le monde se perd, car vivre c’est se perdre. Et pourtant je me perds sans joie, non pas comme le fleuve qui se perd à son embouchure – son seul but, depuis sa source anonyme –, mais comme la flaque laissée dans le sable par la marée haute, et dont l’eau lentement absorbée ne retournera jamais à la mer." Pessoa in Le Livre de l'Intranquillité
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mardi 10 décembre 2019

Inventaire de quelques menues perplexités


Voilà,
Je ne sais pas pourquoi j'ai une passion pour les housses de couette et les parures de lit, et je dois me réfréner car j'ai souvent la tentation d'en acheter alors que je n'ai ni un grand appartement ni beaucoup d'argent
Je ne sais pas pourquoi la mélancolie me saisit quand j'entends des airs de variétés que je trouvais autrefois complètement nuls, ou bien de vieilles chansons indochinoises qu'on diffuse parfois dans les restaurants vietnamiens de province.
Je ne sais pas pourquoi l'humanité met une telle frénésie à détruire son environnement et son espace vital alors qu'elle sait très bien que c'est un suicide collectif
Je ne sais pas pourquoi je continue à m'exprimer sur ce blog et d'en être l'esclave alors que je n'ai plus beaucoup d'inspiration, et qu' il suffirait simplement de publier des photos et hop le tour serait joué
Je ne sais pas pourquoi les noms des instituteurs de l'école primaire de Biscarrosse-Bourg me restent en mémoire : il y avait Mr Sajou qui s'occupait de CE2, Mr Robert le directeur, Mr Peyreigne qui s'occupait des CM1 et Monsieur Despons qui avait en charge les CM2 enfin en tout cas durant les deux années que j'ai passées  dans ce groupe scolaire
Je ne sais pas pourquoi les journalistes de vulgarisation scientifique se mettent à fantasmer sur une certaine super planète possiblement habitable dans un système solaire situé à 31 années-lumière de la terre, alors que la probabilité de s'y rendre est absolument nulle au regard de nos connaissances et de notre technologie.
Je ne sais pas pourquoi, à mon âge encore, je suis aussi déçu et même très triste lorsque les All Blacks perdent un match 
Je ne sais pas pourquoi, j'ai soudain été saisi par cette tête déformée à travers les verres d'un bar où se rendent forcément de nombreux photographes
Je ne sais pas pourquoi, je suis incapable de me concentrer sur des tâches de bricolage domestiques alors que j'ai désormais plus de temps libre qu'auparavant.
Je ne sais pas pourquoi je repense à ce fait divers survenu en Décembre 2010 : lors d'une dispute sur l'existence de Dieu entre quatre russes ivres après avoir bu un litre d'alcool pur, l'affaire a tourné au pugilat et s'est soldée par la mort de deux d'entre eux
Je ne sais pas pourquoi je songe soudain à l'entrée de cette maison que j'ai autrefois photographiée. Peut-être parce que je réalise que c'est là que j'ai pour la première fois cueilli du basilic et que son odeur me ramène toujours à cet endroit.
Je ne sais pas pourquoi il m'arrive parfois d'éprouver de la honte pour des connards dont je n'ai rien à foutre Il y a, d'ailleurs un mot en finnois pour désigner cet état Myötähäpeä (qui se prononce "meuhtaapear")) : par exemple la gêne ressentie (redoublée par l'odeur nauséabonde que ce grand fumeur exhalait)  devant l'auteur médiocre qui, en présence d'un parterre d'étudiants, évoquait "son œuvre", définissait son travail "à la fois symbolique et philosophique", et retraçait son parcours en filant des métaphores toutes plus convenues les unes que les autres. Va te branler pauvre naze. 
Je ne sais pas pourquoi mais lorsque l'urologue m'a demandé combien de temps s'écoulait entre la dernière et l'avant dernière goutte, je me suis senti pris de court et j'ai songé à toutes les choses intéressantes que j'aurais pu faire dans ma vie et que je n'ai pas réalisées.
Je ne sais pas pourquoi je parle si souvent du non sens, et de l'absurdité de la vie alors que je suis persuadé que seul importe l'amour que l'on peut partager (mais c'est peut-être cela qui est absurde)
Je ne sais pas pourquoi mais un jour, entendant par hasard à la radio un morceau du groupe Blitzen Trapper intitulé "destroyer of the void", j'ai cru pendant quelques secondes que je devenais fou. Peut-être parce que cela ressemblait en même temps à trop de morceaux et de groupes des années soixante dix, (Queen, Bowie, Yes). Quoi qu'il en soit, depuis je n'ai jamais osé le réentendre
Je ne sais pas pourquoi mais il m'arrive de m'éloigner du monde, et de penser que je devrais seulement désormais me préoccuper du chemin qui me conduit à ma disparition, à mon effacement, à ma mort que j'espère paisible, bien que les tumultes du monde ne rendent guère cela probable. 
Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai tendance à me méfier d'un philosophe qui déclare tout de go "mon rapport aux chansons est tout à fait distant".
Je ne sais pas pourquoi me revient assez souvent en mémoire l'image de ce musicien de jazz vu dans un petit club parisien, et dont je ne me rappelle pas le nom, mais qui lors de ce concert ne semblait pas être tout à fait là, ou là simplement par intermittence, quand il jouait de son saxo. Lorsqu'il laissait la place à ses partenaires il se retirait vers le fond du plateau. Par moment il était dans la musique, à d'autres il n'y était plus. Quelque chose paraissait l'entraîner loin dans ses pensées. Je m'interrogeais. Était il amer ? Avait-il l'impression de ne pas avoir la reconnaissance qu'il méritait ? Plus tard, il avait introduit un morceau en le dédiant à sa femme morte, et je n'avais pas pu m'empêcher de faire un lien entre ceci et cela.
Je ne sais pas pourquoi mais je trouve extraordinaire que des gens puissent se passioner pour les fourmis au point d'en faire leur métier, qui a nom très rigolo d'ailleurs. Bonjour je suis mimicologue.
Je ne sais pas pourquoi cette phrase extraite que Maupassant fait dire à un personnage d'une de ses nouvelles, me réjouit autant  "je crois bien que j'ai gagné la même maladie que Monsieur. C'est mes nuits qui perdent mes jours"
Je ne sais pas pourquoi je consigne cet inventaire ni pourquoi je l'achève ici. C'est un peu comme les collections ou la thèse de M.A. Il est toujours possible d'y ajouter quelque chose.
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mercredi 4 décembre 2019

Mono no aware


Voilà, 
il existe une expression japonaise —en fait, un concept théorisé au XVIIème siècle par le penseur Motoori Norinaga — "mono no aware" pour désigner la beauté mélancolique qui se manifeste dans toute chose du monde lié à la conscience que tout est transitoire et éphémère. Je ressens parfois cela. Et particulièrement quand je reviens place Furstemberg, et en particulier au 4 devant la vitrine de ce cabinet de curiosités que j'ai toujours connu et dont le charme toujours renouvelé me saisit à chaque fois. Car l'exposition de ces objets disparates surgis de passés et d'horizons divers, et subtilement assemblés, renvoie à des chagrins d'enfance éprouvés lorsque par exemple, à la beauté d'un paysage, s'opposait la bêtise abrupte de ceux qui m'avaient mis au monde. 
Puisque j'avais été engendré, pensais-je alors, par des individus capables de proférer tant d'horreurs, et de se vanter de celles qu'ils avaient autrefois commises, je ne pourrais donc jamais avoir accès à toutes les splendeurs offertes par la nature auxquelles ne semblaient pas être sensibles ceux qui, rêvant pour moi d'un destin semblable au leur, prétendaient m'élever quand en fait ils ne s'employaient qu'à m'abaisser.  Il me fallait chaque jour subir l'antienne de la rancœur et de leur désir de soumettre non seulement tous ceux qui ne leur ressemblaient pas : les "péquins", les civils, et par extension les "nègres", les "bougnoules" les "niakoués", sans oublier les communistes  et les intellectuels, mais encore tout ce qu'ils n'étaient pas en mesure de comprendre. Oui, j'ai longtemps grandi là-dedans. Dans ce microcosme où la beauté est une offense, parce qu'elle relève du sensible et que se laisser captiver par la beauté apparaît comme un signe de faiblesse. Quiconque en est pourvoyeur, trouble l'ordre et fait acte de résistance voire de sédition.

Plus tard, il m'arriva d'être recueilli par des personnes qui avaient du goût pour les choses autant que pour les êtres, et qui étaient dénués de l'arrogance ou de la condescendance qui caractérisent souvent les riches. Ils furent les premiers à me parler, non comme à un inférieur hiérarchique, mais comme à un de leurs semblables.  Ils m'apprirent à considérer le monde autrement qu'on me l'avait appris. Mais il est de secrètes hontes qui ne vous lâchent pas — des livres ont été écrits là-dessus — celles par exemple qui ont trait au manque de discernement, qui trahit les origines. Comme lorsqu'on se retrouve au restaurant et qu'on le ne comprend pas pourquoi tant de verres ni à quoi peuvent servir tous ces couverts. Encore aujourd'hui, j'ai cette crainte que l'emprise subie durant les premières années ne se soit pas totalement relâchée. Dans ces vitrines se trouve quelque chose d'inaccessible. Je ne parle pas de la possibilité ou non d'acquérir un de ces objets, non, ce n'est pas de ça dont il s'agit, ce qui est inaccessible c'est la familiarité avec ces objets. Les toucher me semble impossible. Peur de les salir, de les abîmer. Dans la vitrine, ils perdent de leur réalité en se fondant dans le reflet de la vitre qui les protège. En fait c'est moins eux que je photographie, que l'illusion qu'ils représentent. Et peut-être même est-ce l'adolescent qui, déjà fasciné, traînait autrefois dans les parages, qui incite aujourd'hui l’adulte qu’il est devenu à appuyer sur le déclencheur, pendant qu'il songe en ce lieu pérenne à quelques virtualités inabouties.  
Tiens, j'y pense à présent, un de ces jours, je publierai le récit de ma première rencontre à 17 ans avec l'Auteur Dramatique de Renom, mais aussi à l'époque, un des cadres dirigeants de la filiale française d'une grande entreprise américaine. (Linked with weekend reflection)

dimanche 1 décembre 2019

Cité Véron


Voilà,
j'ai pris ces deux photos le 26 Novembre en sortant de la salle de spectacle "Théâtre ouvert", cité Véron, une impasse située à proximité du Moulin-Rouge, au fond de laquelle se trouve aussi l'appartement où résidait Boris Vian. Théâtre ouvert est un lieu dédié aux écritures théâtrales contemporaines que je connais depuis longtemps. Il a été fondé en 1971 par Lucien et Micheline Attoun, qui étaient là hier soir, bien que cela fait de nombreuses années qu'ils n'en assurent plus la direction. Je me souviens m'y être souvent rendu dans les années 80. C'était un lieu d'effervescence où l'on pouvait croiser des auteurs de théâtre vivants. En 1988, alors que le théâtre était menacé d'asphyxie budgétaire j'avais participé à un événement intitulé le marathon des auteurs. Ceux-ci écrivaient en se relayant pour occuper le lieu vingt quatre heures sur vingt quatre et des acteurs dont je faisais partie lisaient les textes fraîchement rédigés. C'est là que j'ai fait la connaissance de Jean-Paul Wenzel, et aussi de Jasmina Merelles qui est depuis retourné vivre au Brésil. D'ici peu, ces deux salles seront récupérées par la boîte de nuit attenante au Moulin Rouge qui en détient le bail et Théâtre ouvert devra déménager.
L'autre soir, avant la lecture du texte de Guillermo Pisani, intitulé "Je suis perdu", j'ai croisé Danielle G. que j'ai toujours plus ou moins connue depuis que je suis dans ce milieu. Elle s'est cassé le poignet en tombant, et m'a fait l'inventaire de toutes ses chutes au cours de ces derniers mois puis a fini par me dire combien vieillir lui devenait insupportable. Heureusement j'ai aussi croisé Lila K, à l'autre extrêmité du spectre, une étudiante que j'avais aidé à travailler il y a quelques années qui doit avoir un peu plus de vingt ans. J'étais flatté qu'elle me reconnaisse et vienne vers moi. Enthousiaste, elle a plein de projets, d'envies et passer un petit moment avec elle et boire un verre en sa compagnie, fut assez réconfortant. Je l'ai laissée assister à la lecture suivante qui ne m'intéressait pas, et en sortant j'ai pris ces deux photos, en me disant que peut-être je ne reviendrai pas de sitôt ici...
j'aime particulièrement le graphisme de cette silhouette dessinée sur le mur face à l'entrée de la salle.
(Linked with Colourfulworld)

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