mardi 30 juillet 2019

Constats


Voilà, 
un missile peut partir aussi vite qu'un tweet....
les Mayas ont péri de leur acharnement à couper tous les arbres jusqu’au dernier et à cultiver toujours plus de maïs
le réchauffement climatique pourrait réduire la vie marine de dix sept pour cent
il paraît qu'il existe des hamacs de relaxation cervicale
Ah trop cool !
La France a livré en catimini deux navires de guerre à l'Arabie Saoudite en Juillet 2019
Un ordinateur quantique casse le cryptage RSA sur deux mille quarante-huit bits en huit heures
 super !
Le glyphosate modifierait le cerveau et la flore intestinale
Le dérèglement climatique accroît nos besoins en énergie
Eh oui quand même, il y a des choses que tu ne peux pas fuir
L'industrie des engrais rejette cent fois plus de méthane que prévu
La Turquie est en train de rayer de la cartes des centaines de villages kurdes
Le ruissellement des engrais crée une immense zone morte de 20000 km2 dans le golfe du Mexique à l'embouchure du Mississipi
Ces putains de nouvelles qui t'assaillent de partout
Deux cents navires de croisière polluent plus que toutes les voitures d'Europe
Au Japon dans un village ravagé par le tsunami une cabine téléphonique (le téléphone du vent) a été installée pour qu'on puisse y parler avec ses morts
Selon une récente information du National Geographic l'oxygène disparaît peu à peu des océans
La NASA prépare une expédition vers psyché le cadavre d'une ancienne planète
On va vendre les robes de Claudia Cardinale chez Sotheby's
Pour la première fois, les scientifiques ont pris la première photo au monde de l’intrication quantique autrefois décrite par Einstein comme "une action fantôme à distance"
Des chercheurs anglais auraient trouvé comment transformer du plastique non recyclé en hydrogène et en électricité
L'intelligence artificielle bouleverse le dépistage du cancer du poumon
L'Energy Observer est le premier navire hydrogène qui n’émet ni gaz à effet de serre, ni particules fines. Son équipage s'est lancé dans une odyssée pour accélérer la transition énergétique
Ouais c'est bien mec, tu fais un effort pour positiver
Pour lutter contre la canicule qui frappe particulièrement les livreurs à vélo, Deliveroo demande à ses clients de donner un verre d'eau à ses employés !
Un ostréiculteur meurt intoxiqué par des émanations de gaz toxique dégagé par des amas d'algues vertes dans la baie de Morlaix en Bretagne
Aux États-Unis le nombre de travailleurs de plus de 85 ans atteint un record
Des feux de forêt sans précédent ravagent cet été l'arctique Alaska Groenland et Sibérie
A Barcelone, fin juillet plus de 42 litres d’eau par mètre carré sont tombés sur la ville en l’espace d’une demi-heure. Ces précipitations étaient accompagnées de rafales allant jusqu’à 55 km/h.
En Patagonie, une marée noire souille les eaux les plus pures du monde
La NASA a découvert un trou noir "rassasié", alors que selon les lois établies de la physique il devrait être "affamé"
et tu songes à ces paysages où l'homme ne mérite pas sa place
(linked with our world tuesday)

mercredi 24 juillet 2019

Panorama


Voilà,
une photo prise en un temps où si l'on ne parlait pas de changement climatique dans les médias, même si des chercheurs avaient néanmoins déjà pris la mesure des dangers qui nous guettent aujourd'hui. Pour le commun des mortels, l'avenir semblait-il moins chargé de menaces, ou bien les angoisses d'alors se sont elles dissipées dans l'oubli du temps passé ? Il y a quarante ans, lorsqu'on manifestait contre la pollution des voitures (je me souviens du slogan "les autos ça pue ça pollue et ça rend con") ou qu'on citait René Dumont ou Pierre Fournier qui écrivait dans Charlie hebdo et avait créé le premier journal écologique "La gueule ouverte" (sous-titré le journal qui annonce la fin du monde) on passait pour des doux dingues et on avait droit au "vous voulez revenir à l'âge de pierre ?". Cette époque était très tourmentée tout de même : génocide au Cambodge, boat-people vietnamiens, guerre froide, risque de conflit nucléaire, tensions au moyen-orient, terrorisme international, brigades rouges en Italie, dictatures sanglantes en Amérique du Sud, guerre civile en Irlande, famines au Bengladesh et j'en oublie certainement... 
Mais la planète nous paraissait encore une orange bleue. Et nous étions autrement informés de ce qui se passait dans le reste du monde. Cela ne nous parvenait pas de façon aussi massive et constante.  Me revient soudain en mémoire, le sujet de dissertation que j'avais eu à traiter pour mon brevet d'études primaires : "s'informer est notre premier devoir"
La lecture des blogs des uns et des autres, l'été dernier a donné une perception différente de l'état de la planète. Untel en Rhodésie, racontait qu'après des pluies diluviennes avec des grêlons gros comme des balles de tennis, des maison vieilles de 200 ans avaient été détruites, et que maintenant c'était la sécheresse, Amy depuis la Nouvelle-Zélande exposait des photos de champs inondés, Orvokki depuis la Finlande expliquait qu'il faisait 30° en Laponie alors que d'ordinaire il en faisait dix de moins à la même époque, à Chicago il faisait chaud et très humide. Pareil à Montréal. En Tunisie des inondations ont dévasté certaines régions pendant le mois d'Aout. Et puis l'hiver est venu, féroce en Amérique du Nord, pendant qu'aux antipodes des inondations phénoménales noyaient le Nord est de l'Australie. Depuis l'été 2018, il ne se passe plus un jour, sans qu'on évoque un événement relatif au trouble climatique. Sans doute autant parce que cela fait vendre que par une réelle prise de conscience. Mais quoiqu'il en soit au mois de mai 2019, il a fait 30° sur le cercle polaire, en France des départements  étaient déjà en alerte sécheresse alors que l'été n'avait pas vraiment commencé. En Juin dernier, des incendies ravagaient la Colombie britannique au Canada, et l'on se rappelle que ah oui, il y a eu l'année dernière ds feux de forêts gigantesques en Californie et en Suède pendant l'été. En Inde, il a fait, à la même èpoque dans certaines régions jusqu'à 50°C. Comme il faisait un temps pourri ici à Paris en juin, où il ne cessait de pleuvoir (mais paraît-il le temps était aussi pourri en Floride) les climato-sceptiques voyaient là une preuve de l'absence de réchauffement. D'ailleurs le journal "Valeurs actuelles" a sorti un numéro spécial titrant "le catastrophisme écologique est devenu une religion ", et hier encore la jeune Greta Thunberg qui fait part des inquiétudes de sa génération á été accueillie avec beaucoup de condescendance par des députés français de droite qui ont raillé son jeune âge, alors que les mêmes vouent un culte un peu ridicule à Jeanne d'Arc. 
Pourtant ces derniers jours des records de température ont été battus dans certaines villes de France. Et une sécheresse alarmante touche notre pays.

Beaucoup parlent d'un effondrement imminent de la civilisation thermo-industrielle. Certains évoquent un chaos qui précèderait l'extinction massive ou du moins une réduction considérable de l'humanité, pendant que d'autres qui croient au progrès des sciences, et à la capacité d'adaptation de l'homme pensent qu'il n'en sera rien. Pourtant une population de près de 8 milliards de personnes, des températures jamais atteintes et qui ne cessent d’augmenter, voilà qui constitue aujourd’hui une situation unique, sans équivalent historique précis. Cela impliquerait que toutes les terriens travaillent et collaborent comme jamais auparavant pour éviter que les catastrophes ne se produisent. Mais au lieu de cela chacun préserve ses intérêts particuliers.
Des scientifiques estiment que les émissions de CO2 et de gaz à effets de serre culmineront en 2030, bien qu’elles soient réduites. Cependant, les réactions au cycle du carbone et l’utilisation continue des combustibles fossiles entraîneraient une augmentation de la température de 3 °C d’ici 2050. Nombre de climatologues s’accordent à penser que nous aurons, à cette date, atteint le point de basculement concernant les glaciers du Groenland et de l’Antarctique occidental, bien avant que les seuils de réchauffement global de 2 °C et du pergélisol de 2.5 °C ne soient atteints. Peu de temps après, 55% de la population mondiale sera soumise à plus de 20 jours de chaleur létale par an. L’Amérique du Nord et l’Europe pourraient souffrir de phénomènes météorologiques extrêmes, notamment d’incendies de forêt fréquents, d’intenses sécheresses et de vagues de chaleur. Les moussons en Chine risqueraient d'être perturbées, les grands fleuves d’Asie s’assècheraient et les précipitations en Amérique centrale seraient réduites de moitié. L’humanité atteindrait alors le stade de catastrophe planétaire. Les conditions de chaleur mortelles en Afrique de l’Ouest persisteraient plus de 100 jours par an et les pays les plus pauvres seraient incapables de fournir suffisamment d’environnements artificiellement refroidis pour que leurs populations persistent. En outre la production alimentaire serait gravement affectée et insuffisante pour nourrir la population mondiale. 
En dépit de toutes ces prévisions alarmistes et de tous les signes avant-coureurs qui apparaissent, on préfère nier les faits et se voiler la face en espérant un improbable miracle  (linked with the weekend in black and white

lundi 22 juillet 2019

Au secours


Voilà,
ce collage réalisé comme celui-ci ou celui-là, ou encore cet autre, il y a quarante ans (je l'ai un peu corrigé depuis), un de mes premiers, j'y suis toujours autant attaché. Je m'y reconnais encore. C'est le commencement de quelque chose dont j'ignore alors que cela ne me quittera jamais : ce besoin de fabriquer des images avec les moyens du bord. On est fin Juillet début Août 79. Je suis terriblement malheureux. Je viens de finir une grande tournée en Europe, avec un beau spectacle, mais il me faut faire face à de nouveaux chagrins. J'écoute souvent le double live de Bowie "Stage", que j'ai acheté quelques semaines auparavant à Rome. La version de "wild is the wind" me file à chaque fois un bourdon terrible. Je bois du Cynar ramené de là-bas. Je feuillette l'almanach d'Actuel, et des livres d'art sur le constructivisme. Je fume de l'herbe que j'ai fait pousser dans mon appartement exposé plein sud au seizième étage sans vis-à-vis. Je me sens nul. J'ai honte d'être comme je suis. Je sens qu'il me faut devenir adulte et je ne sais pas comment m'y prendre. J'ai peur de n'être pas équipé pour le monde qui vient. Je rêve de m'acheter un appareil photo mais je n'ai pas l'argent. C'est à cette époque qu'apparaissent les premières photocopieuses couleur Rank-Xerox, et que je commence à réaliser ce qu'on appelait alors des Xérographies. J'écris mon désarroi en toutes petites lettres au Letraset
Une vie a passé depuis. J'ai, selon la formule de Cioran "bricolé dans l'incurable", m'employant à survivre, tant bien que mal, à ce sentiment d'abandon et d'incompréhension qui d'aussi loin que je me souvienne ne m'a jamais quitté.

dimanche 21 juillet 2019

Cinquante ans après.


Voilà,
c'était donc il y a cinquante je me souviens exactement, de ce que j'ai fait ce jour là. Dans l'après midi je suis allé en vélo à Port-Maguide, au bord du lac de Cazaux, me baigner. J'ai acheté des gâteaux Twist au bar de chez Charlet. J'étais un peu fatigué parce que je m'étais réveillé vers 3h30 du matin pour les voir fouler le sol de la lune. Je crois que je m'inquiétais pour eux. J'espérais qu'ils pourraient repartir sans problème. J'ai somnolé sur la plage au bord du lac en proie à tout un tas de considérations sur l'avenir qui – pensais-je alors – ne manquerait pas d'être exaltant maintenant que l'humanité avait fait un grand bond. J'avais été agacé, par une conversation, non loin, où un jeune homme trouvait que tout cela ne servait à rien, alors que j'étais pour ma part persuadé que cet événement était riche de promesses, et qu'une nouvelle ère s'ouvrait devant nous. Le futur commençait enfin. J'imaginais qu'il serait très différent. Et puis non.

la buvette de Port Maguide "Chez Charlet" (photo anonyme)

Quelques semaines plus tard le poète W.H. Auden, exprimait un avis moins enthousiaste dont j'ai eu connaissance par hasard il y a quelques jours et dont je vous livre la teneur : "Il est naturel que les garçons fêtent leur immense triomphe phallique, une aventure dont les femmes n'auraient pas songé qu'elle en vaille la peine, rendue seulement possible car nous aimons nous réunir en bande et connaître l'heure exacte. Oui notre sexe, en toute honnêteté, acclame son exploit, bien que les raisons qui lui donnèrent la primauté furent sans doute moins que "menschlich". (In "Atterrissage lunaire", Aout 1969).

jeudi 18 juillet 2019

Rituel intime


Voilà,
vautrée sur le banc, sans doute atteinte du syndrome de Tourette, elle ne cessait d'émettre des grognements qu'elle ponctuait parfois de couinements aigus. De temps à autre, d'un geste brusque, c'est un invisible intrus qu'elle semblait vouloir chasser. Ou bien encore, trois fois du plat de la main elle frappait le haut de sa cuisse, presque à hauteur du pli de l'aine, avant de pousser un petit gémissement évoquant celui d'un nouveau-né. Puis au bout d'une minute le cycle recommençait. Soudain me revint en mémoire ce rituel que je m'étais inventé enfant et qui, pendant quelques mois, m'avait rassuré chaque fois que je devais au retour de l'école rentrer seul dans la maison familiale.

mardi 16 juillet 2019

Apollo XI


Voilà,
il y a 50 ans, décollait l'expédition d'Apollo XI. La conquête spatiale, avec ses drames et ses exploits a marqué mes années d'enfance passées à Biscarrosse. J'étais fasciné par les cosmonautes russes et les astronautes américains. Et même après toutes ces années j'ai toujours la même admiration pour leur courage et leur audace. Ils étaient des héros. Ils le restent encore. C'est aussi le moment où l'on a vu à quoi ressemblait notre planète, avec cette fameuse photo d'un "lever de terre" sur un paysage lunaire. On s'est ému de tant de beauté et puis on l'a saccagée avec une furieuse obstination.

samedi 13 juillet 2019

Bitume


Voilà,
parfois des choses anodines me sautent aux yeux, comme ces lignes de failles sur le bitume d'un trottoir du quai Louis Blériot dans le seizième arrondissement. C'était il y a quelques mois. Un endroit de Paris sans grâce où je ne vais jamais. Je me rappelle très bien ce jour là. Déambulations dans un paysage industriel du bord de Seine. Méditation fugace sur le temps historique. Ce jour là je réalise que soixante années seulement se sont écoulées entre la traversée de la Manche par l'aviateur français défoncé au vin Mariani, et le moment ou Armstrong a posé le pied sur la Lune (j'y pense alors parce que j'ai vu "First man" de Damien Chazelle avec ma fille peu de temps auparavant), et que les cinquante années qui ont suivi ont consisté en un saccage organisé de la planète pour en exploiter les richesses afin de satisfaire notre artificiel besoin de consommation et d'enrichir quelques multinationales. Je ne nie pas qu'il y a eu aussi de grandes avancées technologiques depuis. Mais hélas elles nous servent essentiellement à évaluer avec précision à quel point nous nous sommes fourvoyés sans que nous puissions pour autant trouver de solution aux ravages commis depuis par l'humanité.  Plus particulièrement par une part de l'humanité, la part européenne, judéo-chrétienne qui a essaimé jusqu'aux Amériques avec les conséquences que l'on sait. L'homme blanc quoi. Et voici que désormais cette ivresse de consommation se propage sur tous les continents avec une allégresse suicidaire. L'année dernière, le 2 août toutes les ressources annuelles de la terre avaient été consommées. Il ne fait guère de doute que cela adviendra cette année avant la fin Juillet. Pareillement à chaque époque on s'en émeut, puis on oublie jusqu'à l'année suivante. D'ailleurs au passage je recommande la lecture du billet de Natacha intitulé sidération environnementale qui analyse très finement notre attitude face au désastre en cours.

jeudi 11 juillet 2019

En passant par Arles


Voilà,
j'ai profité hier de mon jour de relâche pour me rendre à Arles où je n'étais encore jamais venu. Cette ville romaine et romane m'est apparue très belle et très émouvante, d'autant que la chaleur n'était pas accablante en raison d'un léger mistral qui par la même occasion chassait les moustiques assez nombreux dans la région puisque on se trouve aux portes de la Camargue. J'y ai vu bien sûr quelques expositions des rencontres internationales de la photographie. J'en reparlerai plus tard. J'ai aussi visité la cathédrale Saint Trophime et en voyant, dans l'une des allées la lumière sur les dalles, j'ai songé à tous ceux qui les avaient foulées au cours des siècles passés, Van Gogh et Gauguin sans doute lors de leur sinistre séjour dans cette ville. J'ai regretté que le temps me manque et de n'être pas parti plus tôt d'Avignon comme je l'avais initialement prévu. Mais j'ai eu du mal à me réveiller. Peut-être pourrais-je y retourner avant la fin du séjour. Je craignais que la ville fût surpeuplée à cause des rencontres, mais ce n'était pas du tout le cas ; rien de commun avec ce qui se passe ici.

mercredi 10 juillet 2019

Avignoneries


Voilà
Dix jours que j'y suis et j'en ai déjà marre de tout ce Barnum. Je suis bien évidemment content d'être sur une scène, d'autant que le public apprécie, vient de plus en plus nombreux et que je trouve petit à petit mes marques en même temps que le plaisir de jouer. J'essaye de bien faire ce pour quoi je suis là, en même temps je me rassure sur mes capacités mentales, car tout de même ce n'était pas simple cette affaire là. C'est aujourd'hui mon premier jour de "relâche" comme on dit, alors que précisément il ne faut pas se déconcentrer. Je ressens toujours une certaine fragilité en raison de la vitesse à laquelle j'ai dû intégrer toutes les informations relatives au spectacle. Les trois denières représentations m'ont tout de même grandement rassuré. Et puis ma fille, en vacances non loin d'ici est venue me voir jouer hier, et ce fut un doux cadeau que sa présence et une grande joie pour moi. Nous en avons profité pour visiter ensemble le Palais des Papes puis ensuite nous promener dans la ville.
Mais cette foule, cette cohue, tous ces gens qui se précipitent d'un thėâtre à l'autre pour consommer de la distraction, parfois de la culture, tout cela me semble souvent relever de l'irrationnel. Sans parler des punks à chiens, des militaires qui patrouillent en armes, des témoins de Jehovah, et autres doux illuminés qui annoncent le retour de Jésus, des déguisés de toutes sortes qui vous tendent tous les jours leurs tracts, jamais lus et très vite jetés. Tout ça m'épuise et m'exaspère. Je n'aime définitivement pas les foules. Ce panurgisme professionnel, ces espèces de grandes messes ont quelque chose d'absurde. Mais surtout ce qui angoisse c'est cette dimension de surconsommation effarante avec ses dommages collatéraux, affichage sauvage, poubelles débordantes de détritus, multiplication des machines à air conditionné, etc. C'est tout de même près de 700 000 personnes qui, pendant toute la durée du festival, transitent ou restent durablement dans la ville, soit trois fois et demi la population du grand Avignon. Le festival constitue la principale activité économique de l'agglomération qui fait l'essentiel de son chiffres d'affaires annuel l'été. Même les marchands de jouets vendent plus en Juillet que pour les fêtes de Noël en décembre. En fait tout continue comme si de rien n'était. On ne change surtout pas le modèle économique. C'est l'occasion pour les jeunes de trouver des petits jobs d'été comme serveurs, serveuses, hommes et femmes-sandwiches, colleurs d'affiches, distributeurs de tracts. C'est une manne pour la population assez déshéritée dans l'ensemble. Mais, dans cette ville historique autrefois important carrefour de l'Occident chrétien, la dimension culturelle proposée par René Char et Jean Vilar qui fut à l'origine du festival, celle qui proposait de repenser, et réinterroger le monde à travers les grandes œuvres dramatiques s'est depuis longtemps noyée dans ce que Marx appelait "les eaux glacées du calcul égoïste". En fait, on voit ici, à l'échelle locale, ce qui se passe dans la plupart des pays riches sur l'ensemble de la planète. Personne n'est vraiment prêt à renoncer à ses habitudes, à changer son mode de vie. On est en plein dans la dissonance cognitive.
Ne reste plus qu'à se réfugier dans la contemplation de ce qu'il subsite de paysages enchanteurs où les visionnaires d'un monde aboli projetaient leurs rêves.

lundi 8 juillet 2019

L'Hommage de Pignon-Ernest à Pasolini


Voilà,
En ce moment se tient au Palais des Papes en Avignon, une rétrospective de l'œuvre d'Ernest Pignon-Ernest, qui est un des inventeurs du street-art (cela ne s'appelait alors pas encore comme cela) en France. Son principe est le suivant : il dessine dans son atelier un motif (souvent des personnages) et ensuite il colle son dessin dans les rues. Je me souviens d'un portrait d'Arthur Rimbaud en pied que l'on voyait dans le quatorzième arrondissement de Paris lors de la démolition du quartier Bobillot -Vercingétorix dans les années 70. Il doit me rester quelques photos de cette époque. Celle-ci représente le poète et cinéaste Pier-Paolo Pasolini qui fut assassiné sur une plage d'Ostie de façon particulièrement horrible (en fait sûrement un assassinat politique déguisé en crime crapuleux), portant lui-même son propre cadavre qui ressemble à celui du Christ descendu de la croix. Pignon-Ernest l'a collé dans les rues de Rome et de Naples. Cette photo est la copie d'une reproduction à l'échelle d'une photo prise dans une rue de Rome. (Linked with Monday murals)

vendredi 5 juillet 2019

Un jour très particulier



Voilà,
Je n'ai jamais mis de photos de ma fille en ligne, pour la protéger. Mais celle-ci est assez ancienne pour que je puisse la publier. J'aime beaucoup ce portrait que nous avons pris ensemble en Calabre, durant l'été 2012. C'est elle qui, après avoir trouvé la fonction retardateur sur mon appareil a  souhaité voir ce que ça donnerait si on  activait le flash dans la lumière du jour. Elle avait alors 11 ans. Son sourire, cette façon qu'elle a de passer son bras autour de mon cou et son regard me bouleversent sans que je ne puisse trop expliquer pourquoi. 
Aujourd'hui, est un jour particulier. Elle a obtenu son bac avec la mention "Très bien". Je suis fier d'elle. Je suis heureux pour elle et pour sa mère. Ce succès nous remplit de joie. Lorsque je l'ai appris ce matin, j'ai été submergé par l'émotion. Je n'imaginais pas que cela me ferait tant d'effet.
C'était peu de temps avant que j'aille jouer devant une salle plutôt clairsemée pour ma deuxième représentation publique (hier nous avons fait une sorte de générale) et cela s'est plutôt bien passé. La satisfaction n'est en général pas mon fort, mais je trouve que j'ai plutôt bien assuré, et même mieux que ça. Bon évidemment c'est encore très perfectible, mais tout de même. Je ne suis pas mécontent d'en être déjà là. Et assez surpris. Le plus difficile maintenant c'est de ne pas se relâcher de garder la tension et la concentration et de continuer à progresser sur cette base. 
À part ça, cette débauche de spectacle sur Avignon, cette hallucinante quantité d'acteurs, tous ces gens qui ne cessent de vous solliciter, de vous proposer des tracts, de vous encourager à venir les voir a quelque chose d'absurde et de vertigineux tout à la fois. Cette fin d'après-midi, j'ai déambulé dans les rues encore chaudes de la ville, dans une sorte d'hébétude presque hallucinée. Jai croisé des gens que je connaissais, parfois accompagnés d'inconnus qui m'ont été présentés, et dont je ne me souviens déjà plus, parce que je souffre de prosopagnosie. J'ai serré des mains, fait des bises (c'est dingue le nombre d'inconnus qu'on peut embrasser dans cette profession, le côté "grande famille" sans doute), j'ai formé des phrases, j'ai parlé, j'ai moi aussi fait des présentations. Avec la femme de Pierre croisée par hasard, nous avons brièvement évoqués nos vingt ans, lorsque nous venions déjà au festival. C'est tellement étrange de me trouver là, cette année, si inattendu... 

mardi 2 juillet 2019

Croissants chauds



Voilà
ce qui m'a principalement occupé ces derniers semaines : je reprends un rôle (le comédien initial s'étant engagé sur un autre projet) dans un spectacle qui a déjà été joué l'année dernière au festival d'Avignon, et qui est reprogrammé cette année. J'ai donc dû apprendre un texte la plupart du temps tout seul, avec parfois l'aide occasionnelle mais précieuse d'une amie attentive qui m'a aidé à mémoriser certaines séquences affrontant au passage mes impatiences, mes inquiétudes et en la circonstance mon caractère soupe-au-lait. Je crains d'ailleurs d'avoir au bout d'un moment découragé sa bonne volonté. J'ai aussi dans le salon de mon partenaire, qu'il a plutôt large, parfois répété avec lui afin de mémoriser, brochure en main, quelques déplacements. En guise de spectateurs j'avais les nombreux livres de sa bibliothèque et quelques masques africains. Enfin j'ai passé quatre matinées à essayer d'intégrer les déplacements et les manipulations d'accessoires en présence d'un regard extérieur dans un étroit studio de répétition. Cela ne fait pas beaucoup de préparation et depuis il s'est passé une semaine sans que je ne voie mon camarade, parti travailler dans le sud. Comme le principe du festival off est l'alternance sur toute une journée de plusieurs spectacles dans une même salle j'aurais peut-être une répétition dans les conditions de représentation, ce qui laisse augurer un début d'exploitation assez périlleux pour ma part. J'ai beau avoir visionné et revisionné une captation du spectacle, c'est quand même avec pas mal d'appréhension que je me lance dans cette expédition. Le texte manque de fluidité, ne vient pas facilement en bouche, et, à l'heure où j'écris ces lignes, tout me semble très approximatif.

Bon je sais que ce n'est pas Verdun, ou le Vietnam, et j'ai fait suffisamment d'autres métiers dans la vie pour savoir, qu'il y en a quand même de bien plus cons et de plus pénibles. Après tout personne ne m'a obligé à me lancer dans cette affaire. Peut-être m'y suis-je simplement engagé de façon un peu inconsidérée, sans vraiment réfléchir, flatté sans doute de ce que j'ai pris pour un gage d'amitié et de confiance, ce qui a priori ne se refuse pas de la part de quelqu'un qui me connaît depuis longtemps avec lequel j'ai déjà joué, et pour qui j'ai de l'estime.
Probablement y ai-je aussi vu l'occasion de changer d'air en bonne compagnie tout en donnant à entendre avec humour des choses qui susciteront la réflexion. En effet notre duo proposera, sous la forme d'une conférence un peu fantaisiste, une adaptation de l'ouvrage du philosophe Ruwen Ogien, récemment disparu, intitulé "De l'influence de l'odeur des croissants chauds sur la bonté humaine".
 On trouvera dans ce spectacle des histoires de canots de sauvetage qui risquent de couler si on ne sacrifie pas un passager, de trains fous qu’il faut arrêter par n’importe quel moyen, y compris en jetant un gros homme sur la voie. On y évoquera des récits d’expériences montrant qu’il faut peu de choses pour se comporter comme un monstre, et encore moins pour se comporter comme un saint … But du jeu : montrer que tout, en morale, peut et doit être questionné. Que les intuitions dont on se réclame ne sont jamais si claires qu'on croit ni si assurées qu'on dit. Que les doctrines se contredisent toujours, les principes parfois. Et que l'entraide et la bienveillance tiennent à peu de chose. Chaque fois, les questions sont : que faire ? Au nom de quoi approuver ou condamner ? Quel genre de règles, de raisonnements et d'évidences mettez-vous en œuvre pour vous prononcer ?

Bref c'est pour cela que je redescends là-bas. Des images d'Avignon l'été me reviennent en mémoire. L'agitation, la chaleur, le bruit, les murs couverts d'affiches qui enlaidissent cette ville belle et endormie tout le reste de l'année... Les moments heureux aussi et ceux où je me sentais submergé par une sensation d'absurde et de solitude. Tout se mélange. Les souvenirs de jeunesse, quand j'imaginais le futur où je suis désormais, les visages, des gestes furtifs, des spectacles bien sûr, des repas pris sur le pouce, des expositions saisissantes, des discussions, des conférences mais aussi les heures accablantes où l'on cherche l'ombre, les murs chauds en fin d'après-midi. En plus c'est la canicule, il est prévu entre 34° et 38° pour la semaine qui vient... Je redoute tout ça, d'autant plus que je ne suis jamais resté dans cette ville durant toute la durée du festival. Ah si, mais j'avais alors 20 ans, c'était le même corps, mais jeune, vigoureux, impatient de s'éprouver toujours plus intensément. Les belles années passent vite. J'espère que je n'ai pas présumé de mes forces. Jamais je ne me suis senti aussi vulnérable. Allez, haut les cœurs, je vais faire l'acteur. 
À l'heure qu'il est j'ai programmé deux trois articles pour Juillet. Je ne sais pas si je publierai beaucoup ces prochaines semaines. Ou alors des trucs écrits il y a longtemps, sans grand rapport avec l'actualité. Il serait bon que je prenne un peu de recul, tout de même.



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