vendredi 31 janvier 2025

Cinema Atlantic


Voilà
le 30 janvier 1965 au matin, je me suis promené dans cette rue, qui a le nom très pompeux de Boulevard de la plage ou de l'océan je ne sais plus trop. Je m'en souviens très bien c'était un samedi, et la télévision retransmettait les obsèques de Winston Churchill. J'avais bien saisi qu'un grand homme disparaissait, mais bon, la guerre de 39-45 demeurait une abstraction. Comprendre le présent était encore pour moi une activité à plein temps. De toute façon les histoires que je me racontais alors en secret dans ma tête avaient bien plus d'importance et de nécessité. Et puis j'aimais déjà flâner seul. Le paradoxe, que je n'étais évidemment pas en mesure d'apprécier à ce moment là, tenait au fait que la chaussée de la rue où je marchais, formée de plaques de béton carrées se succédant les unes aux autres, avait été construite vingt-cinq ans plus tôt par l'Occupant allemand. Néanmoins c'était du beau travail. Vraiment du beau travail. Ces routes me fascinaient sans doute parce que je n'en avais jamais vu de telles auparavant. D'ailleurs cinquante ans après la fin de la guerre, certaines rues de la station balnéaire avaient toujours le même revêtement. Je me souviens que j'étais seul. Il faisait un peu froid, il n'y avait personne dehors, et c'était comme si le monde me faisait don de ce moment dont la densité ne s'est pas altérée depuis lors. Chose curieuse, tout le temps où j'ai vécu là, je ne suis jamais allé au Cinéma Atlantic. Ou une fois peut-être, pour une sortie avec la classe de mon école, Ce n'est qu'en 1996, alors que je passais quelques jours là-bas, que j'y suis entré pour y voir un films un peu idiot qu'on ne regarde qu'en vacances ou par ennui à la télévision.
première publication 15/11/2012 à 00:09

mardi 28 janvier 2025

Faire comme si


 
Voilà,
il me faut bien admettre que la phrase prêtée au Prince Mychkine par Dostoievski dans son livre "L'Idiot" la beauté sauvera le monde est moins que jamais d'actualité. Pour autant puis-je nourrir l'illusion que, à défaut d'échapper au monde absurde et cruel où nous vivons, l'art permet au moins d' y faire face. C'est ce que nous suggèrent les œuvres réalisées par des marginaux, des simples d'esprit, des fous, tous ceux qu'en anglais on appelle les "outsiders"  et dont, en France, le peintre Jean Dubuffet — quelquefois évoqué dans ce blog — a désigné les productions sous le nom d'"Art brut".
Toutefois, pour peu qu'on ait encore un brin de mémoire, une vague conscience historique, une attention à l'actualité, pour peu qu'on s'efforce de faire le point sur la situation globale du moment, on peut être amené à regretter de ne pas être un simple d'esprit, un de ceux qui ne prêtent aucune attention à ce qui sous nos yeux est en train de se faire et de se défaire.


Le raisonnement que j'ai développé par la suite, je ne vous le livre que sous forme d'image. On ne peut pas écrire sur tout. Il faut éviter certains sujets, politiques en particulier, car le risque de mésinterprétation est très fréquent, j'ai déjà pu le constater. Je ne vcous en livre que la conclusion
... Quoi qu'il en soit, l'accumulation de tous ces faits ajoutée à la confusion idéologique qui règne un peu partout — sans parler des périls écologiques jusque là inédits menaçant la population mondiale — n'incite pas à la sérénité ni à l'optimisme. Bien sûr les choses n'adviennent jamais comme on s'y attend. Si l'horizon est plutôt à la catastrophe on ignore quelle en sera l'exacte nature. Des dirigeants fous disposent d'une puissance de feu inédite dans l'histoire de l'humanité. Des déréglements climatiques et des anomalies écologiques comme la dégradation de la biodiversité constituent des menaces que l'on ne prend guère en considération. Des virtualités effrayantes sommeillent comme des volcans qui ne demandent qu'à s'éveiller. Nous tentons de faire comme si tout cela n'avait qu'une importance toute relative. Nous protestons parfois bien sûr. Nous nous insurgeons, exprimons nos indignations pour ceci ou cela — il y a tant de motifs —, mais nous avons si peu de prises sur les événements. Nous essayons d'être heureux malgré tout, de faire la fête quand c'est possible, de voir des films des amis des paysages. Nous nous efforçons d'oublier ou du moins de ne pas y penser. Car il faut bien vivre n'est-ce pas...
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lundi 27 janvier 2025

Je cherche la sortie

 

Voilà, 
Le monde perd en netteté, il devient chaque jour un peu plus approximatif. S’y déplacer exige prudence et ne va pas sans maladresse. Ce qui autrefois allait de soi et qui relevait de l’évidence, fait maintenant l’objet d’une certaine suspicion. Aucun jour ne ressemble au précédent. Il n’est de chemin sans obstacle. Toute chose éveille la douleur. Rien de bien spectaculaire. Ce qui se passe demeure énigmatique, mais il est clair que ça se dégrade. Je me désintéresse peu à peu de ce qui m’entoure. Plus précisément ce qui m’entoure ne me parvient plus tout à fait. Je sais que des événements graves se passent un peu partout sur la planète. Mais des intensités inconnues me traversent. Des fulgurances sous-cutanées me brûlent. Des brumes aussi engourdissent mon esprit. C’est donc cela "se parcourir" ? Les mots se disséminent, partent à la dérive. Bon voyage. Tout s'éloigne tout me quitte. Je reste au bord et le bord s’amenuise. Je suis un peu comme un pingouin sur sa banquise. Ce n’est pas si grave après tout. C’est un phénomène très ordinaire et malgré tout fort intéressant. Il ne faut pas regretter. Il y a encore tant de transformations insoupçonnées. Ce qui ne se manifeste pas ici prendra forme ailleurs. Tête chaude paupières lourdes cœur serré. Je cherche la sortie. Ce musée ne me dit plus rien qui vaille.
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dimanche 26 janvier 2025

Place d'Italie

 
 
Voilà,
cette grande fresque du centre Italie 2 est l'œuvre de l'artiste Camille Walala. Installée à Londres, Camille Walala s'est vue offrir la possibilité d'investir la façade du centre commercial "Italie Deux" situé dans le 13ème arrondissement de Paris. Pour cela, elle a puisé son inspiration dans le mouvement artistique Memphis. Né en Italie durant les années 1980, ce mouvement s'est imposé comme une nouvelle voie du design italien, ouvert sur l’art contemporain, notamment le Pop Art mais aussi sur la mode.  Diamétralement opposé aux codes du design post-Bauhaus, il se caractérise par une approche ultra colorée où le motif et la géométrie sont au cœur de la création. On retrouve dans cette fresque tous les codes du mouvement. 
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vendredi 24 janvier 2025

Un jour de pluie à Belem


Voilà,
"Il pleut, mais voilà ce qui arrive quand il pleut : je me sens réconforté par la sensation d'être à l'abri de tout. Il pleut, et c'est comme si cette pluie tombait en moi, me nettoyait de quelque chose d'indéfinissable, une mélancolie sans raison que je porte en moi, comme si j'étais fait de cette matière légère qui tombe des cieux. Tout devient plus vrai, plus intime, comme si la pluie avait apporté, avec ses gouttes, un voile de vérité sur tout ce qui existe." (Fernando Pessoa, Le Livre de l'Intranquillité)

jeudi 23 janvier 2025

C'est une chose étrange

 
C'est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces midis d'incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes

Rien n'est si précieux peut-être qu'on le croit
D'autres viennent Ils ont le cœur que j'ai moi-même
Ils savent toucher l'herbe et dire je vous aime
Et rêver dans le soir où s'éteignent des voix

D'autres qui referont comme moi le voyage
D'autres qui souriront d'un enfant rencontré
Qui se retourneront pour leur nom murmuré
D'autres qui lèveront les yeux vers les nuages
 
II y aura toujours un couple frémissant 
Pour qui ce matin-là sera l'aube première
II y aura toujours l'eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n'est le passant
 
Aragon, in Les Yeux et la mémoire
 

mardi 21 janvier 2025

Impuissant, sidéré.

 
Voilà,
"rien de tel qu’une ouverture de Rossini pour commencer la journée" déclare le présentateur du matin de la chaîne musicale. D'accord. Puis il enchaîne en présentant un enregistrement récent des œuvres pour piano de Ravel par un virtuose sud-coréen, Seong-Jin Cho. Ce qu’il y a de merveilleux avec la musique, c’est qu’elle abolit les frontières, les cultures, les temporalités. Bien sûr je sais qu’en Ukraine on ne veut plus jouer de compositeurs russes et qu’en France, au début du vingtième siècle, le nationalisme s’est emparé de la musique. Je préfère cependant retenir cette anecdote évoquée par Alain Gheerbrant dans son livre Amazone Orénoque dans lequel il relate son expédition en Amazonie dans les années cinquante. Lorsque son groupe d'explorateurs dut faire face à une situation tendue avec des membres d'une tribu hostile armée de flèches et de lances qui les jaugeaient d'un mauvais œil, Gheerbrant utilisa la musique comme moyen de désamorcer le conflit. Il donna à entendre un morceau de Mozart sur un magnétophone qu'il avait emporté. Cette musique, par sa beauté peut-être, son étrangeté aussi intrigua les autochtones et finit par les apaiser.
Je l’admets, c’est totalement absurde de parler de ça, au moment où les États-Unis basculent ouvertement dans une oligarchie fascisante dirigée par un fou furieux qui en peu de temps va mettre à bas les règles de droit de son pays et aussi, vraisemblablement, celles de la communauté internationale. La mise en scène de cette rage vengeresse, la jubilation des milliardaires, les manifestations de nationalisme exacerbé relayées par les télévisions occidentales avaient, vues d'ici, quelque chose de vraiment obscène. J'ai à peine regardé. Hier soir je me suis senti très mal. Pas uniquement à cause de cela, mais aussi en raison de cela. Je crois qu'on est nombreux à demeurer, impuissants, sidérés devant cet affligeant spectacle. Nombreux, mais toutefois minoritaires.  Et puis au matin je découvre cette photo de Musk, celui qui encourage et soutient l' AfD, l'actuel parti néonazi allemand, le bras tendu de façon fort suspecte, à la tribune. Glaçant.

dimanche 19 janvier 2025

Pêle-mêle avec miroir

Voilà,
pourquoi je tiens encore ce blog. Parce qu’il me permet d'écrire comme ci ou comme ça, sans contrainte de style de genre ou de sujet. Parce que je peux y proposer des images de nature et de facture différentes. Parce qu'il m’offre la possibilité de ne pas m’en tenir à une seule identité ou une seule forme d’expression. Parce qu’il est un terrain d’expérimentation où je peux raisonnablement m'extérioriser en étant relativement protégé. Parce qu'il y est loisible d’être indifféremment grave ou futile. Parce qu'il me contraint à formuler ce qui me passe par la tête (d'autres font des sports cérébraux comme les mots croisés). Parce qu'il m'offre en outre l’opportunité d’échanger  parfois avec des inconnus. Parce qu'il renvoie une image multipliée fragmenté de ce que je suis. Parce que cela me donne l'illusion d'être encore en lien avec ce monde.
"Les poèmes sont des bouts d’existence incorruptibles que nous lançons à la gueule répugnante de la mort" écrivait René Char. Il en va de même pour ces photos et aussi ces images dessinées ou trafiquées que j’accumule depuis quinze ans sur ces pages. Elles transforment le rapport que j’ai avec le monde. Elle ne racontent rien de particulier. Elles ponctuent des moments de réflexion, parfois, mais aussi des moments de vide, de songerie.
 


Ceci dit, je suis de moins en moins inspiré, et les brouillons qui s’accumulent n'offrent pas grand chose de nouveau. J’ai beaucoup ressassé. Ce sont toujours les mêmes obsessions, les mêmes terreurs et je me lasse de tout ça. En outre l’humour et la dérision semblent m'avoir quitté. Toutefois, je constate aujourd’hui que nombre de lecteurs ou de personnes de mon entourage qui me trouvaient autrefois pessimiste  — quand il me semblait n’être que lucide —, écrivent à présent des choses bien plus sombres que je ne l'ai fait. Je ne devais pas être tout à fait à côté de la plaque. Il est vrai que le futur immédiat est plus anxiogène que jamais pour ceux de ma génération. Que ce soit sur le plan politique, géostratégique, ou écologique. On s'apprête vraisemblablement à vivre des temps étranges.



Au lendemain des élections américaines David Lynch avait constaté dans une vidéo "what a great time to be alive if you like the theater of absurd. La mort l'a pourtant surpris avant le lever de rideau. On se rappellera simplement ce proverbe turc "when a clown moves into a palace he doesn't become a king, the palace becomes a circus". Nous en savons déjà un peu quelque chose dans ce pays où je vis.

 
En fait j'envie l'ami Pierre toujours prompt à imaginer une histoire ou Christine qui  chaque jour agence avec délicatesse un nouveau poème et une image apaisante, ou bien encore Bill qui quotidiennement dépose une vision enchanteresse de paysage. Tous regardent le monde avec sollicitude et soin y ajoutant un peu de beauté. Comme Agathe qui dans son paradis, fait dialoguer entre eux les objets et crée d'oniriques compositions. Mais pour ce qui me concerne l'imagination me fait de plus en plus défaut. 
 
 
 
Tout me paraît flou, incertain. J'essaie de composer des images qui rendent compte de cet état. Cependant ces tentatives me satisfont moyennement. Pas grand chose pour me stimuler ces derniers mois. Je subis le contrecoup de tout ce que j’ai du refouler entre Octobre et Avril. En fait ce qui est désagréable, c'est que désormais la mort approche. Et qu'elle se précise dans un monde tourmenté, traversé d'idées sales et d'affects troubles et malsains qui ne manquent pas de m'éclabousser. Bon, je ne suis pas complètement dépressif, ça ne m'empêche pas d'être futile, d'aller au cinéma, aux expositions, de regarder le rugby à la télévision et parfois au stade avec ma fille. Pendant ce temps là, je ne pense pas aux douleurs nouvelles.
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jeudi 16 janvier 2025

Voilà c'est ça

 
Voilà,
parfois je m'arrête devant un truc que je vois, qui n'a aucun intérêt pour le passant ordinaire et je me dis "voilà c'est ça". Je ne sais pas ce qu'il y a dans le "ça" ; quelque chose qui m'échappe, que je porte en moi depuis longtemps sans doute, car les choses à l'abandon décrépites, les traces infimes m'ont toujours fasciné. "Ça" a sûrement quelque chose à voir avec la solitude, la mélancolie. Bref je veux garder ce lieu et cet instant qui prennent soudain un relief particulier et méritent d'être saisis. Est ce que c'est moi, où le monde qui exige que je sois son intercesseur ? Y a-t-il quelque chose dans l'air qui réclame d'être retenu, quelque chose de rêvé, niché en ce lieu et qui affleure à la surface du présent et qui se nourrit de tous les fragments d'histoires qui se sont déjà déposées à cet endroit. Et puis je photographie aussi les choses pour, comme disait je ne sais plus qui, Winogrand peut-être, me faire une idée de ce à quoi elles ressemblent, une fois photographiées. De façon générale, j'essaie de les rendre plus belles. Évidemment, cette silhouette peinte réclamant "La paix" sur ce tronçon de rue à l'abandon a quelque chose de pathétique, par ces temps où tant de guerres sévissent de par le monde.

Tendre ciel

                                           
 
Voilà,
 C'est une chose que je ne puis comprendre
 Cette peur de mourir que les gens ont en eux
 Comme si ce n'était pas assez merveilleux
 Que le ciel un moment nous ait paru si tendre 
   Louis Aragon

mardi 14 janvier 2025

Nommer les choses

 
Voilà,
En Californie ces derniers temps, les gens riches qui bénéficient d’optimisations fiscales leur permettant d’échapper aux impôts réalisent que, lorsque les services publics sont privés de moyens, ces derniers ne peuvent fonctionner. Les ravages causés récemment ne sont pas dus qu’au dérèglement climatique et aux incendies. Ils sont aussi la conséquence des politiques ultra-libérales qui négligent le bien commun, comme l'accès à l'eau et l'entretien des forêts. C'est ainsi : la stigmatisation de l’intervention de l’État et de toute forme de réglementation a aussi un coût.
Il paraît cependant que de riches propriétaires engagent des pompiers privés payés 2000$ de l’heure pour protéger leur maison. L’idée même de pompier privé a quelque chose d’absurde : c’était un fantasme sexuel très en vogue dans les boîtes gay hardcore des années 70
Ces récents événement appellent aussi quelques questions. 
Si d'après les médias, les récents incendies de Californie c'est l'Apocalypse, alors comment nommer la destruction et le nettoyage ethnique de la bande de Gaza, la famine endémique en Érythrée, les bombardements russes sur l'Ukraine ? Et si 15 000 hectares brûlés c’est un mega-feu, alors comment qualifier les 440 000 ha brûlés en Amazonie en Juin 2024 ou les 81000 ha réduits en cendres en Grèce à l’été 2023. Une catastrophe chasse l'autre et puis l'on oublie. Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, sur cette planète qui, depuis que la météo existe, n’a jamais été aussi chaude, Los Angeles nous offre l’image du monde qui vient. Une impression de déjà-vu pourtant. Ça ressemble à la bande-annonce d’un disaster-movie. Rien n’étonne plus dans la ville du cinéma.

lundi 13 janvier 2025

Comme les rêves

 
 
Voilà,
"Les villes, comme les rêves, sont faites de désirs et de peurs, même si le fil de leur discours est secret, si leurs règles sont absurdes, si leurs perspectives sont trompeuses et si tout cache autre chose". (Italo Calvino)

dimanche 12 janvier 2025

Un manège décoré

 

Voilà,
j'avais pris cette photo un dimanche de décembre 2023, alors que j'étais allé manger chez l'amie Agnès, je crois que c'était, entre Noël et le nouvel an. J'avais vaguement traîné dans le quartier désert avant de me rendre chez elle. Sans doute étais-je un peu rassuré par le bulletin de santé reçu quelques jours plus tôt, validant les premières étapes du lourd traitement destiné à soigner ma fille. Je mesure aujourd'hui comme je m'y raccrochais (et sa mère aussi sans doute). Il ne restait que l'espoir à quoi s'agripper malgré tout. Je m'efforçais de faire de mon mieux, pour répondre aux amicales sollicitations des quelques personnes qui me soutenaient alors, en me téléphonant régulièrement. Mais il m'était difficile de sortir, de parler.

Un peu plus d'un an après, je réalise à quel point j'étais comme un zombie, faisant de mon mieux pour n'en rien laisser paraître. La distance que je mettais entre l'état émotif intérieur et l'apparence que j'essayais de donner, m'épuisait. 
Je ne trouve toujours pas les mots pour évoquer cette période où je bricolais des solutions de fortune pour échapper à l'angoisse. Je voudrais ne plus avoir à penser à ça. Mais c'est toujours là, cela me rattrape toujours. Au coin d'une rue, devant un paysage ou un visage aperçu. En écoutant un morceau de musique.
Je peux ensuite demeurer des heures, hébété, sans rien dire. Comme si les mots étaient gommés de ma pensée.
Je ne parviens plus à écrire ce que j'éprouve. Je n’ai plus de force, plus d’énergie, plus d’idées. Du mal à parler, à socialiser, aussi. L’impression toujours d’être à côté de la plaque.

vendredi 10 janvier 2025

Flânerie et perplexité

 

Voilà,
dans ce jardin désert, devant cette ligne sinueuse de bancs, je songeais — peut-être à cause des douleurs nouvelles, des symptômes inexpliqués et troublants — qu'à plus ou moins brève échéance, viendra un temps où je ne porterai plus aucun regard sur les choses, que je ne serai plus au monde. 
C'est dommage, parce que j'aime bien m'y promener dans ce monde, j'aime bien y flâner. J'aime bien y distinguer et en retenir des détails qui paraissent insignifiants. Un rien m'y surprend, ou du moins suscite mon intérêt. J'aime bien m'y poser des questions. 
Par exemple dans ma flânerie, longeant cette allée je m'étais en même temps demandé, si le deuxième théorème d'incomplétude de Gödel dont un ami, quelques jours auparavant, m'avait longuement parlé, pouvait laisser supposer que, étant donné que les ordinateurs sont essentiellement des systèmes formels, ils auraient donc toujours des limites fondamentales dans leur capacité à résoudre certains types de problèmes ou à formaliser toutes les vérités mathématiques. 
Le matin même pourtant j'avais entendu à la radio qu'une étude réalisée par des chercheurs allemands avait conclu que l’IA était capable d’identifier un whisky avec plus de précision que des experts. 
Bref, dans la grisaille et dans le froid le cerveau suggérait bien des motifs de perplexité.

mercredi 8 janvier 2025

Se réfugier

 
Voilà,
Anne chez qui j'étais il y a dix ans le matin de la tuerie de Charlie Hebdo, et que je n'ai pas vue depuis fort longtemps m'écrit ce matin qu'elle s'est rendue hier soir place de la République espérant un hommage aux victimes. Au lieu de quoi, il n'y avait que des gens se réjouissant de la mort de Jean-Marie Le Pen. Que cette vieille crapule fasciste ait cassé sa pipe à la date anniversaire de la mort de Cabu  — qui l'avait beaucoup caricaturé — est bien étrange. "Le canard enchaîné" a d'ailleurs titré aujourd'hui "Le Pen allongé "Charlie" debout".
Autre curiosité, Dans son livre "Soumission", paru ce sinistre 7 janvier 2015, Houellebecq  imaginait pour 2022 qu'un président issu du parti Fraternité musulmane (le parti des musulmans de France, pure invention de l’auteur) avait nommé François Bayrou Premier ministre. On est en 2025, on n'a pas de parti musulman en France  — et c'est tant mieux — la fille de Le Pen est aux portes du pouvoir, mais on a quand même le pitoyable et médiocre François Bayrou premier ministre d'un président immature qui ayant joué avec les institutions de la République, a rendu cette dernière plus fragile que jamais. 
En Europe, l'Italie est gouvernée par une première ministre néo-fasciste, l'Autriche a depuis hier un chancelier issu du parti neo-nazi autrichien, les Pays-Bas sont gouvernés depuis l'été par une coalition entre la droite et l'extrême-droite. La Hongrie est dirigée par un populiste qui fait les yeux doux à Poutine. En Syrie al-Qaida pris le pouvoir. En Israel et en Palestine, la haine mutuelle n’a plus de limites. Poutine continue de laminer l'Ukraine, et enfin Trump dans un discours délirant et ubuesque envisage d'annexer le Canada, le Groenland le canal de Panama et le golfe du Mexique. En outre on apprend aujourd'hui, que Facebook n'aura plus de fact-checkers si bien que la désinformation va s’amplifier. On est en pleine tragifarce. Bref tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. 
 

Parfois j'aimerais me réfugier dans une peinture ancienne. Comme celle-ci, de Guiseppe Zaïs, (un vedutiste vénitien du 18ème siècle) que j'ai contemplée, il y a fort longtemps, lors de mon premier séjour à Venise en 1985. Lorsque je ressemblais à cela. Je travaillais beaucoup, je jouais le rôle de ma vie, j’avais du succès, j’étais aimé, je me projetais dans l’avenir.

mardi 7 janvier 2025

Malgré tout

Voilà,
les fêtes de l'hiver sont finies. Le triptyque Noël - Nouvel an - Epiphanie est derrière nous. On continue de se souhaiter la bonne année — je joue le jeu moi aussi — mais on doit bien admettre que cela relève de la pensée magique. Tout le monde sent bien que cette année sera encore plus chaotique que la précédente. La situation mondiale n'offre pas de grand motifs de pavoiser. Celle de notre pays n'est guère brillante, et dans de nombreux autres ce n'est pas fameux non plus. On va essayer de ne pas se décourager, de continuer à faire des images, raconter des histoires, écouter de la musique, voir des expositions des films, lire de la poésie des romans, faire du théâtre. De dire merci pour ce qu'on peut encore trouver de beauté. Malgré tout. Malgré les périls nouveaux qui se dressent, malgré ceux qui persistent et que nous rappelle ce triste anniversaire de la tuerie de Charlie Hebdo.

dimanche 5 janvier 2025

Dormir pour oublier (34)

Voilà,
le 29 décembre, dépité de ne pouvoir entrer à l'exposition de Chiaru Shiota au Grand Palais, j'ai traversé les jardins des Champs-Élysées pour me rendre à l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde afin d'y visiter une exposition intitulée "La couleur parle toute les langues", rassemblant près de 80 œuvres de la collection Al Thani. Sur le chemin, à deux pas du Palais de l’Élysée où réside encore celui qui en 2017 disait "je ne veux plus voir un homme ou une femme dans la rue", je me suis autorisé cette photo. Quelques jours plus tard j'ai remarqué un détail qui m'avait échappé sur l'instant. Il rend l'image plus perturbante encore. Si on la scrute attentivement, il est possible d'imaginer une histoire.
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vendredi 3 janvier 2025

Vieux port

  
 
Voilà,
j'ai pris cette photo à Marseille fin Septembre 2007 sûrement à cause du gros homme sur la droite et aussi des pêcheurs à la ligne. Aujourd'hui, je n'arrive pas à réaliser que soit passé tant de temps depuis que j'ai saisi ce moment. C'était à l'époque de la coupe du monde de Rugby en France, et je me souviens avoir assisté à la défaite du Pays de Galles face aux Fidji à la terrasse d'un café près du vieux port. Il est aussi possible que ce soit à l'occasion de ce séjour que j'ai vu pour la dernière fois mon grand-cousin Jacques qui vivait à Marseille. 
J'étais venu ici avec les Jacquelin pour un série de performances à l'occasion de l'exposition "L'art tangent" au Fonds Régional d'Art Contemporain qui se situait près de la vieille charité non loin du quartier dit "Le panier". C'était un moment joyeux et léger, comme souvent avec eux. J'aime beaucoup travailler en leur compagnie. On fait souvent des trucs assez rigolos ensemble. Susan Sontag disait "C'est avec les mots qu'on comprend, c'est avec les images qu'on se souvient". Je ne sais pas si les mots m'ont permis de comprendre grand-chose — je les tiens pour duplices, et ils exigent d'être manipulés avec beaucoup de subtilité et de précaution — mais oui, il ne fait aucun doute, en ce qui me concerne, que les images convoquent bien souvent les souvenirs.

jeudi 2 janvier 2025

Songer en marchant


Voilà,
dans la brume hivernale la Tour Eiffel clignote comme un sapin de Noël sous ses guirlandes. A ce qu'on dit  — mais on dit tant de choses — à cette époque de l'année toutes les planètes du système solaire sont alignées. Toutes les têtes de cons qui dirigent les grands pays le semblent aussi. Je marche dans le froid en rêvant de chaumière à la campagne qui sentirait le pain d'épice l'orange la cannelle le chocolat chaud et le feu de bois. Je songe soudain à cet adage de Maître Eckart "ce ne sont pas les choses qui font obstacle, c'est toi qui te tiens à l'envers par rapport à elle" . Et je rebrousse aussitôt chemin à la recherche d'un endroit chaud, une bouche de métro donc. Tant pis, je ne ferai pas mes dix mille pas aujourd'hui.

mercredi 1 janvier 2025

Carré parfait et bonnes questions

Voilà,
il paraît que le nombre de l'année qui vient est un carré parfait (45²) que c'est aussi le produit de deux carrés (9²x5²) ainsi que la somme de trois carrés (40²+20²+5²) et mieux encore la somme des cubes de tous les chiffres de 1 à 9.  Je ne sais pas si on peut en tirer une quelconque conclusion, et s'il y a lieu de s'en réjouir ou pas. D'un point de vue esthétique ou formel peut-être, pour peu qu'on ait la fibre mathématiques. Ce n'est pas mon cas. 
Pour l'année qui vient, j'essaierai donc — comme me l'a fermement intimé il y a peu ce Père Noël quelque peu autoritaire, et même vaguement menaçant — de me poser les bonnes questions, (et j'encourage mes lecteurs à en faire de même en consultant ce lien où je leur réserve une surprise)
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