mercredi 27 juin 2018

Captologie


Voilà,
récemment, Tristan Harris (Rue89, 2016), qui a été « philosophe produit » chez Google expliquait combien il était important de concevoir des interfaces qui avaient pour objectif de « faire perdre du temps ». Autrement dit, ajouter à une expérience utilisateur fluide une dimension persuasive et addictive où les notifications intempestives ne sont que les fonctionnalités visibles d’un système ayant vocation à « voler des heures » aux usagers. Il paraît d’ailleurs que cela s’apprend et cela constitue même une discipline scientifique que l’on peut découvrir au Persuasive Tech Lab de l’Université de Stanford sous le nom de "captologie". Ce terme a été créé par le chercheur B.J.Fogg. Celui-ci a publié en 2003 un ouvrage sur le sujet, dénommé "Persuasive Technology: Using Computers to Change What We Think and Do". Il souligne que la technologie n'est pas seulement un outil mais également un media et un acteur social.

(...)

Ce qu’il y a de nouveau, avec le capitalisme, c'est qu’il est réglé par des livres de compte, par un bilan comptable. En jeu, ça se traduit par le fait que tout ce qu'on fait est reconnu, tout donne lieu à une gratification, un badge ou une récompense. Et tout cela nous donne satisfaction. Chez John Dewey philosophe du pragmatisme, il existe une affinité entre jeu et travail : dans les deux cas, on a une forme d'effort, mais ce qui distingue ces deux notions, c'est que dans le travail les marqueurs de réussite sont plus lointains. Alors que dans le jeu, la gratification est immédiate. (Matthieu Triclot)

(...)

On rentre dans une économie de l'attention et du digital labor en effectuant des tâches numériques fun qui permettent d'extraire de la donnée. Les individus qui bénéficient de ce digital labor ont besoin du fun, de la dopamine. C'était déjà le mot d’ordre de la "gamification", avec des game designers qui vendaient le fait qu’ils savaient comment créer des boucles d'engagement pour que les utilisateurs reviennent sans cesse. C’est toute une industrie fondée sur le fait qu’elle sait comment rendre addict. (Matthieu Triclot)


(...)

Un des paradoxes des jeux se situe dans le fait que l’on peut éprouver de petites expériences de transe sur la machine symbole de la bureaucratie. D'un côté la machine à calcul, gestionnaire, et de l'autre des choses qui relèvent des expériences les plus primitives et les plus troubles. (Matthieu Triclot)

1 commentaire:

La modération des commentaires a été activée. Les commentaires ne seront publiés qu'après approbation de l'auteur de ce blog.

Publications les plus consultėes cette année