mardi 13 septembre 2011

Monsieur je-sais-tout


Voilà
c'est étrange, il n'est pas inculte, il a dans sa bibliothèque des livres intéressants, des films de qualité mais Sébastien Chatus n'est pas relié au monde, il ne s'est jamais éloigné du nid familial, n'a jamais pris son envol, jamais voyagé. Oh je ne parle pas de grands voyages au-delà des mers où les hommes et les femmes vivent en de curieux pays où pour l'étranger de passage la langue qu'on y parle est parfois difficile à saisir, où les mœurs et les religions peuvent paraître incompréhensibles. Non je parle juste de ce misérable et mesquin petit territoire gouverné par des cons que des camions traversent en une journée. Même cela, il ne le connaît pas. Pourtant il s'autorise à parler du monde Sébastien Chatus, il ne s'en prive pas. Bien sûr la télévision lui donne sûrement l'illusion que le monde lui appartient, et que, en tout cas, il connaît la France. Ce ne sont d'ailleurs pas le voyage ou la sédentarité qui sont en cause (Ramuz après tout n'a guère quitté la Suisse, mais ses propos étaient d'une extrême sagesse et riches d'enseignement) mais plutôt la conscience que l'on peut avoir ou non du chemin que l'on a parcouru dans l'existence. Et lui, son incommensurable prétention au regard du peu qu'il a fait de sa vie, confine à la bêtise. Il y a des gens inadaptés pour qui la Réalité est semée d'embûches, mais ils vivent dans l'étude, dans l'artisanat d'un métier qu'ils s'efforcent de maîtriser, avec pour seule exigence, celle de bien l'accomplir. Ils dessinent, peignent, fabriquent des chaussures, des meubles ou des bijoux, restaurent de vieilles faïences, sculptent des écorces avec leur canif, que sais-je encore, et s'efforcent de faire au mieux avec le peu dont ils disposent. Certains même n'osent pas s'avouer leur talent, se sentent gênés, empruntés dès qu'on les complimente, alors que lui pérore, se dindonise pour un oui ou pour un non, cherche à attirer l'attention en caquetant de fumeuses théories sur des sujets insignifiants ou en égrenant des chapelets de poncifs tous plus éculés les uns que les autres. Le pire c'est qu'il n'est pas avare de jugements sur l'œuvre ou le travail de ses congénères. Parce qu'il sait plaquer dix accords sur une guitare, Sébastien Chatus se prétendra musicien et vous affirmera que "le double album blanc des Beatles vraiment non faut pas exagérer c'est pas grand chose". Parce qu'il a fait vingt photos qu'il n'a pas lui-même tirées d'ailleurs, il donnera son point de vue de photographe. Des années que cela dure, qu'il se ment à lui-même, qu'il ment aux autres. Je le regarde et me demande comment il fait pour survivre à la honte. Pour s'accommoder de cette médiocrité sans horizon. Car tout de même il est impossible de se leurrer à se point, de ne pas se questionner devant l'étendue des dégâts, devant le désastre d'une vie à l'abandon vouée à la procrastination permanente et aux stratégies dilatoires ...

1 commentaire:

  1. Merci de me faire rire avant de repartir travailler.PS: Ils sont fort nombreux

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