lundi 11 mai 2020

Chevaucher le tigre dit-il



Voilà,
pour avoir durant ma vie professionnelle souvent improvisé sur des plateaux de théâtre ou bien encore dans des cours ou des formations qu'il m'arrivait quelquefois d'animer, pour m'être aussi livré à des tentatives d'écriture, enfin bref, pour avoir un peu tâté de ce travail qui consiste à transmettre sa pensée, je crois savoir, qu'une métaphore, surtout lorsqu'on s'exprime oralement, ne vient pas de n'importe où. Et s'il peut nous arriver d'être surpris de l'énoncer, elle ne surgit jamais par hasard. Elle affleure parce qu'elle nous a marqués et il est rare qu'on ne se souvienne pas de qui l'a formulé, ni de quelle lecture elle se fait l'écho. Lors de sa pitoyable  — et là, je renvoie au pertinent article de Céline Nogueira — prestation destinée aux signataires d'une tribune parue dans le journal "Le Monde", répondant à ceux-ci inquiets du peu de cas qu'on faisait des professions de la Culture dans le programme de mesures économiques liées à l'Après-confinement, notre président, a, dans l'ivresse d'un monologue exalté et quelque peu confus, succombé à la tentation de la métaphore. "Il faut chevaucher le tigre" s'est-il exclamé sous le coup de l'inspiration à propos de laquelle Boris Vian, écrivait "il y a des gens qui n'ont pas peur des coups". Assurément notre petit président fait partie de ceux-ci. Pour tout dire j'ai trouvé la formule assez peu élégante. Je ne l'avais jamais entendue.  Ça m'a tout de même intrigué.
"Chevaucher le tigre" est le titre d'un livre de Julius Evola, un des théoriciens du fascisme. Ainsi, au détour d'une conférence de presse, de nouveau s'exprime le refoulé macronien. Déjà, il y a deux mois, qui paraissent d'ailleurs lointains, la référence maurrassienne au "pays réel" du président avait paru suspecte. Aujourd'hui, ses influences pseudo-philosophiques ajoutées à un hubris de plus en plus délirant ne manquent pas d'inquiéter. Du coup on comprend mieux dans quel fumier s'est épanouie une autre métaphore celle du "président jupitérien". Rappelons que l'hubris (du grec ancien ὕβρις "excès, démesure, orgueil"), désigne cette confiance excessive en soi, et sans doute aussi la foi en la Providence qui souvent mène à des erreurs fatales. Chez les Grecs anciens, cet orgueil inacceptable de la part d’un mortel, cette prétention à une supériorité insolente parmi les hommes devait, pour les dieux immortels, entraîner une punition cruelle. Mais ça c'est la mythologie.

4 commentaires:

  1. Vous ne trouvez pas que Julius Evola ça sonne comme virus Ebola ?

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  2. I cannot honestly comment on this--- but I will say the music you shared with me today made me learn to like to like the Bandoneon, but I still can't warm up to accordions. Perhaps because it always seems as if the orange clown is playing an imaginary one.

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  3. Macron est aux abois, il sait que ses jours dans le costume de président sont comptés. Il sent confusément que s'il a le toupet de se représenter en 2022, il ne figurera pas à l'affiche du second tour. Quant à la France, ses jours sont comptés en tant qu'entité géopolitique. Et, franchement, je ne verserai pas une seule larme lors de son délitement.

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  4. Je viens de le retrouver, c'est un cadeau offert il y a fort longtemps et qui s’intitule, "Chevaucher son tigre, ou comment résoudre des problème compliqués avec des solutions simples". Rien à voir donc avec ce Julius.
    Mais en France rien n’est simple semble.t.il; les citoyens, animés par une forte et enviable conscience politique, ne laissent (presque) rien passer.

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