jeudi 27 octobre 2016

Intervenir


Voilà,
je ne peux m'empêcher : deux photos hier soir publiées sur Instagram prises à la dérobée. L'une hâtivement cueillie depuis un bus me fait penser à une image de Hopper. il fallait absolument saisir "l'occasion qui jamais plus ne se représentera" comme disait Jankelevitch. Tout autre chose ici. Je passe par des états changeants. Des envies d'images très différentes me traversent. Là j'ai besoin de quelque chose de plus léger, plus enfantin, plus coloré. Même si les mots ne viennent plus, l'envie de bricoler des images persiste. Comme si désormais ce n'était plus que ma seule possibilité, non d'agir sur le monde, mais au moins d'y intervenir, et qu'il y avait urgence à le faire quand est si grande la tentation de renoncer. C'est aussi une façon d'être encore relié à moi. De plus en plus souvent l'impression de me quitter de me dissocier de m'effacer, de devenir transparent inconsistant me traverse. Seules les images attestent de ma présence, témoignent de mon répit, donnent un peu d'épaisseur à mes jours. Bien sûr il y a ces surprises qui font le sel de la vie. Ainsi la récente découverte de l'œuvre d'Ahmad Jamal, réponse tendre subtile sensible de la spiritualité authentique à tous les sanguinaires et décérébrés crétins se réclamant du radicalisme musulman au nom duquel toute musique devrait être bannie. Voilà quelque temps, circulait sur les réseaux sociaux une vidéo dans laquelle l'imam de Brest expliquait à des enfants que la musique pouvait transformer en singe ou en cochon ceux qui l'écoutent. Cette bêtise consterne, afflige et pourrait même désespérer. Mais heureusement il y a Ahmad Jamal. Tant de délicatesse, apaise et élève l'âme, éloigne des pensées triviales, rend plus supportables les tâches quotidiennes de l'ordinaire des jours autant qu'elle distrait des douleurs d'un corps usé par trop de conduites déraisonnables. Je songe alors que la béatitude pour moi pourrait être cela : rester allonger au soleil sur un matelas pneumatique (en étant protégé bien sûr), flotter sur une eau paisible et avoir dans les oreilles l'album "Saturday morning". Mais bon, c'est le froid qui commence à gagner ici. Et l'envie de se calfeutrer.


2 commentaires:

  1. Ah mais je ne connaissais pas ce magnifique pianiste! Un tout grand merci Kwarkiko, cela achèvera de me remettre sur pied, une fois de plus!
    Un besito.

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  2. Merci kwarkito pour l'image, le texte qui remue en moi des fibres profondes, et ce merveilleux piano que tu me fais découvrir.
    Cocktail idéal pour essayer d'aller dormir avec cette fichue heure d'hiver.

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