vendredi 29 novembre 2024

Au bord de l'écoulement des choses


Voilà
"Je m'arrête parfois, subitement, entre la vie qui va et la vie qui vient ; je stagne au bord de l’écoulement des choses. Et la stupeur de tout s’écroule sur ma tête. A d'autres moments il semble que brusquement, l'univers joue mal son rôle et trahisse ainsi son étrangeté ; il semble soudain me parler d'une autre voix, me révéler, un bref instant, une autre nature. Comme un rideau soulevé par le vent, et qui, en un éclair, entre-dévoile une parcelle irrévélée de quelque chose d'inconnu, d’inattendu..." Fernando Pessoa "Le livre de l'intranquillité" 

mercredi 27 novembre 2024

Passerelle Debilly

Voilà,
hier en me rendant au musée du Quai Branly, pour l'exposition "Zombies", profitant du beau temps, j'ai eu envie de photographier le pont "satanique" comme l'ont qualifié des culs-bénits traditionalistes français. C'est en effet à cet endroit que pendant la cérémonie des J.O. s'est déroulée la scène avec un Dyonisos nu et bleu que des crétins aussi incultes que malintentionnés ont confondue avec un pastiche de la cène. Le 7 octobre dernier plusieurs centaines de catholiques traditionalistes se sont d'ailleurs réunis sur la passerelle Debilly à Paris pour une prière de rue visant à "réparer le mélange de blasphème, de satanisme et d'idéologie LGBT" de la cérémonie d'ouverture des Jeux 2024. Les participants de ce rassemblement non autorisé par la préfecture, y ont demandé "l'aide de la Vierge Marie pour combattre les ennemis de l'Église".

mardi 26 novembre 2024

Quand tombe la nuit


 
Voilà,
"dans les ombres indécises d'une lumière qui va bientôt mourir, avant que la tombée du jour ne se change en nuit précoce, j'aime à errer sans penser parmi ce que devient la ville, et j'avance comme si tout était irréparable. Je savoure, avec mon imagination plus qu'avec mes sens, la tristesse diffuse qui me hante. Je marche au hasard, et feuillette en moi, sans le lire, un livre au texte intersemé d'images rapides, à partir desquelles je forme nonchalamment une idée qui n'aboutit jamais.
Certains lisent aussi rapidement qu'ils regardent, et terminent sans avoir tout vu. De même, je tire du livre qui se feuillette tout seul dans mon esprit une vague histoire inachevée, souvenir de quelque autre vagabond, morceaux de descriptions de crépuscules ou de clairs de lune avec des parcs au beau milieu et des allées où des silhouettes, vêtues de soie, passent et repassent.
J'indiscrimine à force d'ennui et d'or. Je marche tout à la fois dans la rue, dans la fin du jour et dans ma lecture faite en rêve, et ces divers chemins sont tous réellement parcourus. J'émigre et me repose - comme si j'étais à bord d'un navire déjà parvenu en haute mer.
D'un seul coup, les réverbères morts font coïncider leurs lumières subtiles des deux côtés de la longue rue qui dessine une courbe. Avec un choc, ma tristesse grandit encore. C'est que le livre est fini. Il reste seulement, dans la viscosité aérienne de la rue abstraite, un mince filet de sentiments, tout extérieur, comme un filet de bave du Destin stupide, qui tombe goutte à goutte sur ma conscience d'être.
Quelle vie différente que celle d'une ville où la nuit tombe. Quelle âme différente que celle d'un homme regardant tomber la nuit. Je marche, incertain et allégorique, être irréellement sensible. Je suis comme une histoire qu'on aurait racontée, et si bien racontée qu'elle aurait pris chair, mais sans bien pénétrer en ce monde-roman réduit à un début de chapitre : "A cette heure on pouvait voir un homme descendre lentement la rue de..."
Qu'ai-je à voir avec la vie ?
"
(Pessoa  Le Livre de l'Intranquillité 181) 

dimanche 24 novembre 2024

Pêle-mêle en forme de bilan

 

Voilà,
cette fresque se trouve dans un café à l'angle de la rue Littré et de la rue de Vaugirard. J'ai pris la photo il y a quelques jours. Je l'avais aperçue, à travers la vitre de l'établissement il y a un peu plus d'un an, alors que je marchais à la nuit tombante, un soir d'Octobre, dans un état second, les yeux embués de larmes. L'idée m'avait effleuré qu'il faudrait que je revienne un jour la photographier, mais cela m'avait aussitôt paru stupide et absurde. Je venais d'apprendre la nature du mal sournois qui affectait ma fille. J'étais en état de choc. Le sol se dérobait sous mes pas, plus rien n'avait de sens. L'avenir s'ouvrait comme un gouffre. J'étais effrayé à l'idée de la perdre. 
Je l'avais appris de son médecin généraliste qui tenait l'information du spécialiste vers lequel elle nous avait envoyé et que nous allions rencontrer le lendemain ma fille, sa mère et moi. J'avais pris ce rendez-vous pour savoir les questions que nous pouvions poser au médecin, dans la mesure où ma fille était une très jeune adulte, et que l'annonce lui serait adressée en notre présence. J'avais déjà dans l'idée que cela ne serait pas très fameux. 
Dans son cabinet où elle m'avait accueilli après son dernier patient de la journée, elle s'était permis cette entorse à la déontologie, sans doute pour amortir le choc du lendemain. Je lui suis reconnaissant de cette délicatesse.
Je ne raconterai pas la journée qui a suivi. Elle est inscrite dans ma mémoire dans ses moindres détails. Tout au plus puis-je dire que c'était une radieuse journée d'octobre. La lumière était belle au parc Montsouris où j'étais venu marcher tout seul avant l'entretien.

 
Je ne parle pas non plus des mois qui ont suivi ,qui furent parfois éprouvants. Il m'arrivait dans ce blog de faire allusion à ce que j'éprouvais. J'en concevais autant d'envie que de réticence car après tout ce n'était pas "ma" maladie. Mais j'étais en souffrance, et il me fallait tout de même trouver un exutoire. Les mots ne m'étaient pas d'un grand secours, tout me semblait dénué de sens. Certaines images par leur fabrication m'ont apaisé. Elles sont encore là comme des talismans. Je n'oublie pas les nuits, rongées par la peur et l'incompréhension. L'hôpital, les cheveux de ma fille qui tombent, son crâne nu, sa fatigue, les effets secondaires du traitement, mais aussi son élégance, sa dignité dans l'adversité. Nos promenades quasi quotidiennes. La plupart de mon temps lui était dévolu. Je n'en continuais pas moins de prendre des photos. Mais parfois, lorsque je me retrouvais seul, je n'étais plus qu'une plaie ouverte.


Les nouvelles du monde étaient si affligeantes, que je n'écoutais pas la radio, évitais la télévision. Il y avait le cinéma, les expositions pour faire diversion. Quelques vieux ami.e.s m'ont témoigné du soutien. Certain.e.s sont apparu.e.s. Ils se reconnaîtront, s'ils me lisent. D'autres se sont défilés avec plus ou moins de délicatesse. Il y a eu des petites lâchetés. D'êtres qu'on pensait proches, on espérait des gestes simples qui ne sont jamais venus. Il en est même un qui s'est comporté de façon ignoble. C'était certainement le plus intelligent de tous, le plus vaniteux aussi. Comment ai-je pu à ce point me tromper sur certaines personnes ? 
 
 
Ma fille s'est rétablie. "Vous pouvez reprendre votre vie d'avant" lui a-t-on dit un jour. Depuis elle la croque à belles dents. Ces derniers mois elle n'a cessé de voyager en Europe. Aujourd'hui, je suis un peu apaisé. Soulagé, sans pour autant être rassuré. Je prends parfois la mesure de la catastrophe à laquelle nous avons échappé. Je ne suis ni heureux ni malheureux, dans une sorte de brume intérieure un peu comme cette image. Je parviens difficilement à reprendre le cours ordinaire des jours. Oui j'ai refait l'acteur, participé à quelques projets, je socialise un peu. Mais une part de moi est toujours absente, ailleurs, en retard, à côté, sur le bord, en marge, en vrac, en catimini. Aujourd'hui par exemple, je suis resté chez moi, en pyjama, alternant lectures, radio, scrolling débile sur mon smartphone et siestes. Je suis comme un instrument désaccordé. La mélodie du temps qui passe sonne un peu faux. J'essaie encore de comprendre le monde où je vis, comme hier, mais je n'y parviens pas. Et puis à quoi bon ? Même quand j'écris, j'ai plus l'impression de m'éloigner de moi-même que de m'en rapprocher.

samedi 23 novembre 2024

Débâcles

 
Voilà,
en 2023 Nicolas Mathieu avait écrit sur son fil Instagram à propos du passage en force du gouvernement sur sa réforme des retraites : "Un jour, des historiens se pencheront sur cet étonnant moment, au cours duquel un gouvernement aux abois, sans majorité réelle, un pouvoir élu par défaut, une masse de privilégiés suiveurs et éberlués de chiffres mensongers, des sénateurs grassement payés, disposant de retraites phénoménales, auront réussi à aller contre la volonté et les intérêts de tout un peuple. Il s’intéresseront à ces jours de 2023 et constateront que le plus grand nombre, éreinté par la pandémie, l’inflation galopante, le scandale quotidien que représente l’explosion simultanée de la fortune des uns et de la misère des autres, aura vu son bon droit passer à la moulinette d’institutions malades, sa souveraineté détournée ainsi qu’un ruisseau, sa volonté niée, ses aspirations systématiquement bafouées, et pour quoi ? À la fin, on finit par se le demander. Mais ces historiens établiront peut-être des corrélations entre ce qui s’était tramé là, et quelque désastre advenu un peu plus tard. Ils diront peut-être que ces jour-là emmagasinaient sans qu’on le devine encore la poudre d’explosions à venir. Il s’étonneront en tout cas du triste état dans lequel se trouvait alors une démocratie si contente d’elle-même..
Ouais d’accord. A un détail près. On n'en est plus là. Ces derniers mois dans ce pays on a fait bien pire.
Et puis, pour que des historiens se penchent un jour sur notre époque, encore faudrait-il que celle-ci puisse entrevoir un futur. Mais même un futur sombre, ça parait un peu plombé. Je parle d'un futur civilisé, où les conditions de recension d'un savoir, d'une mémoire seraient possibles et nécessaires pour les générations suivantes. Mais les générations suivantes, tout le monde s'en branle on dirait.
L'époque n'est guère brillante. Pas vraiment à la fin des temps, mais déjà un peu les temps de la fin, pour reprendre la formule de Pierre-Henri Castel dans son ouvrage de philosophie morale "Le Mal qui vient".
C’est étrange tout de même, Paul Valéry a beau avoir écrit que les civilisations sont mortelles, on semble toujours plus ou moins penser que la nôtre est à l’abri. Que ce n’est pas pour tout de suite. Dans mille ans, peut-être, mais pas maintenant. Je ne sais pas, il est possible que nos élites soient persuadées  que si le chaos s’est durablement installé dans des régions comme l'Irak, la Syrie, l'Afghanistan, la Libye, le Liban, le Bangla-Desh, les pays d'Afrique centrale, Haïti et j’en oublie, c’est parce qu'ils les considèrent encore comme des pays sous-développés – souvent d’anciennes colonies – et que leurs populations et leurs dirigeants le sont aussi.  Si la loi du plus fort et du plus riche y règne, si l'État s'y est plus ou moins désagrégé, si les lois communes sont abandonnées au profit de groupement d'intérêts privés, de puissances locales souvent de caractère mafieux, c’est juste parce que c’est des noirs des arabes des métèques, enfin des pas-comme-nous, quoi ! Nous on a des types comme Trump, comme Poutine, comme Javier Milei, comme Orban, Macron Netanyahou qui sont des phares de la pensée, on est à l’abri ⸮ (c'est de l'ironie). Pourquoi ça devrait nous arriver semblent encore croire la plupart des gens. Bien sûr il y a des crises, c'est même l'essence du capitalisme que de passer de crises en crises.  N'a-t-on pas toujours su rebondir ?
Mais malgré tout, l'idée que des catastrophes sociales, financières, militaires, écologiques, puissent durablement menacer aussi l’Occident commence à infuser. On redoute même qu'elles adviennent toutes en même temps. La fin du monde n'arrive pas à la même heure dans les différents endroits de la planète. C'est comme ça. Et ces soixante-quinze dernières années, on a pris un peu de retard. L'Europe a durablement été épargnée. A force on trouve ça normal. 
Cependant même parmi les plus optimistes, le doute s'installe. Et si c'était vraiment notre tour à présent ? Depuis une certaine élection outre-atlantique l'idée que nous aussi glissons vers encore plus de chaos écologique, politique, culturel commence à poindre. C'est vrai qu'il y a de quoi s'alarmer. Rien qu’ici, en France, le narcissisme d’un seul homme ayant, ces derniers mois, multiplié les décisions incohérentes a rendu ce pays non seulement ingouvernable, mais l’a en outre décrédibilisé au regard des puissances et institutions internationales. Elles rechignent de plus en plus à lui prêter de l'argent. Cela en sera bientôt peut-être fini de la société du caddie plein.
Bien évidemment, je ne demande qu'à me tromper. Je préfèrerais que ces idées ne me traversent même pas l'esprit. Mais il suffit d'écouter et de regarder pour se rendre compte qu'on n'a pas le cul sorti des ronces. "Plus d'un signe annonce l'hégémonie du délire" écrivait Cioran, en des temps pourtant moins irrationnels. La guerre est de nouveau aux portes de l'Europe. Le changement climatique a des incidences sur la production agricole, nous ne sommes même pas autosuffisants. La pollution ne cesse de croître un peu partout. La faillite intellectuelle et morale de nos dirigeants n'est plus a démontrer. Et tout se passe comme s'il étaient déjà persuadés qu’ils n’auront justement pas de comptes à rendre à l’Histoire. 
 
On ne peut que constater, de jour en jour, la perte de tout sens commun, être entraîné malgré tout dans cette folie collective, sans pouvoir y faire grand chose, et pourtant on continue d'envisager des projets. Parce que malgré tout c'est là-dedans qu'il faut aménager sa petite vie, sa misérable petite vie. De toute façon cela se passera autrement qu'on l'imagine. Si le pire est prévisible, ses modalités ne le sont pas.
Je me reproche souvent cette manie à ne pouvoir m'empêcher de parler du monde. Je m'en veux de céder à cette tentation, alors que certaines de mes connaissances, prennent des bombes sur la gueule à trois heures d'avion d'ici. Je ferais mieux de mettre de l'ordre dans ma bibliothèque, de trier mes photos, de me débarrasser des choses superflues, de prendre soin de mon foie, de donner mes livres, de rédiger mes dernières volontés, d'appeler les personnes qui me furent si attentives durant l'épreuve des derniers mois, de profiter des menus bonheurs dont il m'est encore possible de jouir au lieu de passer du temps devant mon écran à mettre en forme des textes qui n'intéressent pas grand monde.
Mais j'ai par hasard croisé cette citation de Maurice Blanchot, dans son essai "Le livre à venir" . Et même si je ne suis pas écrivain, je la prends à mon compte. Au fond elle me disculpe. "C'est une des charges de notre temps que d'exposer l'écrivain à une sorte de honte préalable. Il faut qu'il ait mauvaise conscience, il faut qu'il se sente en faute avant toute autre démarche. Dès qu'il se met à écrire, il s'entend interpeller joyeusement : «Eh bien, maintenant tu es perdu.» «Je dois donc cesser ?» «Non, si tu cesses, tu es perdu.» Ainsi parle le démon qui parla aussi à Goethe et fit de lui cet être impersonnel, dès sa vie au-delà de lui-même, impuissant à sombrer parce que ce pouvoir suprême lui avait été retiré. La force du démon est que par sa voix parlent des instances très différentes, de sorte que l'on ne sait jamais ce que signifie le «Tu es perdu ». Tantôt c'est le monde, le monde de la vie quotidienne, la nécessité d'agir, la loi du travail, le souci des hommes, la recherche des besoins. Parler quand le monde périt ne peut éveiller en celui qui le parle que le soupçon de sa frivolité, le désir, du moins, de se rapprocher par ses parles de la gravité du moment en prononçant des mots utiles, vrais et simples. «Tu es perdu» signifie : «Tu parles sans nécessité, pour te soustraire à la nécessité ; parole vaine, infatuée et coupable ; parole de luxe et d'indigence.» - «Je dois donc cesser!» «Non, si tu cesses, tu es perdu.»"
Oui je suis perdu, mais le week-end, ça passe inaperçu.
shared with  art for fun friday -

jeudi 21 novembre 2024

Suspension

Voilà,
nous étions là ensemble, ma fille et moi, silencieux confiants, abandonnés à la contemplation de ce paysage offert. La nuit tombait doucement sur Malaga. C'était un de ces moments suspendus où les mots restent au bord des lèvres et que, dans un muet tohu-bohu, le cerveau mêle pensées souvenirs et conjectures. 

mardi 19 novembre 2024

Quitter à présent toutes ces choses confuses


 
Voilà
"Quitter à présent toutes ces choses confuses

tout ce que nous possédons et qui pourtant ne nous appartient pas,
ce qui telle l’eau des vieilles fontaines
nous reflète en tremblant et décompose notre image ;
toutes ces choses qui telles des plantes armées d’épines
s’accrochent à nous une dernière fois, – ne pas s’arrêter,
et ceci et celui-là
que l’on ne voyait plus
(tant ils étaient quotidiens et ordinaires)
les regarder tout à coup en face et de près ;
d’un œil doux et conciliant comme pour la première fois ;
sentir confusément combien impersonnelle
et s’abattant sans choix allait la douleur
dont l’enfance était jusqu’aux bords remplie – :
et partir tout de même, arrachant la main à la main
comme si on rouvrait une plaie déjà guérie
et aller plus loin : mais où ? vers l’inconnu,
profondément dans un pays étranger et chaud,
qui derrière tous nos affairements démêlés
se tiendra indifférent comme un décor : jardin ou mur ;
et continuer : mû par quoi ? par nécessité ou tempérament,
par impatience ou attente obscure,
par impossibilité de comprendre ou sottise :

Prendre tout cela sur soi et en vain,
laisser tomber des choses que peut-être on tenait
pour mourir tout seul et sans savoir pourquoi – :

Est-ce là l’entrée d’une vie nouvelle ?"
(Rainer Maria Rilke)

lundi 18 novembre 2024

Un regret du présent

 
Voilà,
"Il y a quelque chose de lointain en moi en ce moment. Je suis bien penché au balcon de la vie, mais pas vraiment de cette vie-ci. Je suis au-dessus d’elle, et la contemple de l’endroit d’où je regarde. […] Je suis tout entier un vague regret — ni du passé, ni de l’avenir : je suis un regret du présent, anonyme, prolixe et incompris".
Fernando Pessoa in Le Livre de L'intranquillité
shared with  art for fun friday -

dimanche 17 novembre 2024

Boulangers

 
Voilà,
J'ai découvert il y a peu cet endroit. Anciennement square Scipion, le square Théodore Monod du nom du naturaliste français fut créé en 1899 en remplacement de la place Scipion à l'angle de la rue Scipion et de la rue du Fer-à-Moulin. Il est orné d'un Haut-relief polychrome en grès émaillé d'Alexandre Charpentier et Émile Müller, intitulée Les Boulangers. Réalisée en 1897, cette composition achetée par la Ville de Paris à l'Exposition universelle de 1900, avait été initialement installée dans le square Félix Desruelles à côté de l'église St Germain-des-Prés avant d'être transférée au square Scipion. Ce haut-relief rappelle que, à partir de 1675, la rue Scipion hébergeait la boulangerie des hôpitaux de Paris-Assistance publique, qui depuis 1974 est devenue un musée.
Un certain A. Delhomme, compagnon du devoir en fait à l'époque la description suivante : "Admirablement traités, aussi, les détails des hauts reliefs. Derrière les hommes, le four, avec ses tôles noires et ses briques rouges, les corbeilles destinées à la pâte blanche, les plats en bois, le pétrin, d’un brun terreux, et jusqu’aux linges blancs pendus aux murailles, sont d’une vérité soulignée encore par la forte simplicité des couleurs et l’harmonie des teintes".
And here is a real mosaic for mosaic  monday :-)

samedi 16 novembre 2024

Nulle terre pour t'appeler

 
 
Voilà 
c'était un temps d'heures vides et vagabondes, les terreurs s’épanouissaient dans des tours obscures. En songe tu adorais la pierre sèche et le bois silencieux. Échoués sur un rivage stérile des lambeaux de ciel séchaient là éparpillés comme des fougères fossiles. Nulle terre pour t'appeler ou te retenir. Nul endroit où tes rêves auraient pu faire souche. Éphémères, incertaines, sans récit ni paroles, des visions surgissaient entre deux brumes, traçant un chemin sans bord dans le murmure du ressac.

jeudi 14 novembre 2024

Cabanes sous les tropiques

Voilà
c'était sur l'île de la Désirade, une dépendance administrative de la Guadeloupe située à une dizaine de kilomètres à l'est de la Grande-Terre. L’endroit me parut sinistre. Comme si le lieu, depuis longtemps, avait un très mauvais karma. Dès le dix-huitième siècle, quand on installa une léproserie à Baie-Mahault, elle devint une terre de relégation. En outre, l'île ordinairement pauvre en eau potable, fut en 1989 dévastée par l'ouragan Hugo.
Ces cabanes de pêcheurs et ce grand arbre solitaire en arrière plan, j'ai eu envie de les cadrer, comme cela m'est arrivé sous d'autres cieux sur d'autres rivages. Cela reflétait assez bien mon état d'esprit. J'avais alors le moral à zéro et me sentais aussi misérable que ces tôles. 
Il reste cette photo. Merci la vie.

jeudi 7 novembre 2024

Lagune de Venise

Voilà, 
le ciel, on ne sait jamais ce qu'il contient de menaces, même quand il est beau. Aujourd’hui, je me suis souvenu de Venise, et j'ai secrètement remercié le monde de m'avoir offert cette vision. Je me suis aussi rappelé ce texte d'Ascanio Celestini écrit en 2009, année où cette photo fut prise. Il s'appelle "Le peuple est un enfant"

"Le peuple, ça l’intéresse pas cette chose qu’on appelle la Démocratie

Je vais vous raconter une histoire :
Il était une fois un intellectuel qui s’appelait Ponce Pilate
Et un jour, Ponce Pilate a pensé que le peuple était prêt pour la Démocratie.

Donc il a pris deux types, deux types qu’il venait à peine d’arrêter et il les a présentés au peuple en disant :
"Peuple, Démocratie, c’est toi qui choisis, lequel on libère entre celui-ci et celui-là ?"
Le peuple est un enfant, qu’est ce qu’il en sait le peuple ?
Le peuple il tondait les moutons, il trayait les vaches, il labourait dans les champs le peuple...

Alors, Ponce Pilate qui était vraiment avide de démocratie a dit :
"Peuple, je te donne un indice. A ma gauche, il y a Barrabas, à ma droite il y a Jésus Christ. Peuple, lequel veux-tu libérer ?"
Mais le peuple est un enfant, le peuple n’est pas prêt à tout ça, qu’est ce qu’il en sait le peuple ?
Le peuple regarde le match de foot, le peuple, il aime bien les speakerines, le cul, les nichons, qu’est ce qu’il en sait le peuple ? Il va au supermarché...

Alors Ponce Pilate qui était un intellectuel et qui était avide de démocratie a dit :
"Peuple, je te donne un autre indice : Celui-ci, Barrabas est un voleur de poulets, et cet autre, Jésus Christ, c’est Dieu descendu sur la terre. Peuple, lequel veux-tu libérer ?"
Et le Peuple a dit : "Barrabas"
Barrabas...qu’il dit le Peuple...
Parce que le Peuple, il veut Barrabas !
Parce que le Peuple au final, il vote pour le voleur de poulets !
Et le voleur de poulet au final il devient Président du Conseil, il devient Maire, administrateur de copropriété, vous comprenez ?
Le Peuple veut le voleur de poulets !

Et alors Ponce Pilate, qu’est ce qu’il aurait dû faire ? Hein ?
Dire que la démocratie, c’est une idiotie ?
Dire que le peuple est débile ?
Non, Ponce Pilate a fait le geste le plus haut de l’histoire de l’Humanité :
Ponce Pilate s’est lavé les mains.

Vous comprenez ce geste extraordinaire ?
Il s’est lavé les mains ! Comme pour dire que contre l’ignorance, on ne peut rien faire mais contre la saleté, la bataille n’est pas encore perdue, vous comprenez ?

Comme pour dire que la Démocratie, elle est indéfendable, le peuple, il n’en veut pas, il ne la pige pas, il ne la comprend pas... MAIS... On peut encore faire quelque chose pour l’hygiène."
 
Je ne sais pas pourquoi je pense à ça.


mercredi 6 novembre 2024

Consternation

 
Voilà,
Karl Marx considérait que l’histoire se répète d’abord comme tragédie puis comme farce. Ce qui arrive aujourd'hui Outre-Atlantique est pire qu'une tragédie parce que c'est justement un redoublement de la farce. Personne ne pourra dire qu'il n'a pas été prévenu. On a vu le lascar à l'œuvre durant quatre ans, on a pu constater son ignorance crasse (notamment durant la crise du Covid), sa bêtise, ses incohérences, sa démence mentale, il y a eu les événements du Capitole et sa tentative de sédition, les 34 chefs d'accusations en justice pour des motifs divers. Tous les anciens présidents américains, même les plus cons comme Bush, des vice-présidents, des anciens leaders républicains, les chefs d'états majors, des anciens collaborateurs de Trump ont appelé à voter contre lui. Et pourtant le voilà réélu avec les pleins pouvoirs puisque les républicains sont désormais largement majoritaires au Sénat et peut-être même à la chambre des représentants. Ce n'est pas seulement la défaite du camps des démocrates, c'est la défaite de l'intelligence de l'humanisme, des valeurs qui ont fondé la démocratie américaine il y a presque 250 ans, c'est surtout le triomphe du populisme, de la force brute et obtuse, de l'égoïsme de la bêtise, de la misogynie de la vulgarité et de la haine. 
C'est la récidive qui est consternante. Que le système électoral américain soit obsolète et absurde, c'est un fait, mais tout de même, plus de la moitié des votants ont apporté leurs suffrages à une canaille qui ne cache pas son jeu et revendique avec arrogance sa crapulerie. C'est cette adhésion qui questionne et stupéfie. Mais sans doute l'individu est-il, dans l'iconographie américaine un objet de fascination, comme le suggérait le photographe Andres Serrano. Dans son exposition "Portraits de l'Amérique" au musée Maillol, il y avait cette installation consacrée à Trump. "The apprentice" a pris sa revanche.
La servitude volontaire que j'évoquais il y a huit ans se confirme. L'empire romain a eu ses Caligula, ses Commode, ses Néron. L'empire américain a Trump. Sauf qu’en l’occurrence, c’est le peuple qui l'a choisi et désiré.
 
 

 
 
Hegel mettait l'accent sur la rationalité de l’histoire (on a le droit de rire de ce postulat) en ce sens que chaque étape, même tragique, permet à l’Esprit d’apprendre et de progresser. Apparemment une majorité des citoyens de États-Désunis est inapte à l'apprentissage. Mais peut-être qu'un hégélien verra l'émergence du néo-fascisme américain comme un moment de crise qui, par la négation de ses excès et la prise de conscience collective, permettra une évolution vers des systèmes politiques et éthiques plus équilibrés  C'est de l'ironie bien sûr. C'est hier que ce pays avait la possibilité d’un stimulant rendez-vous avec son Histoire. Au lieu de cela il a choisi de se perdre sur un chemin bien sombre, bien ténébreux.
J'ai souvent — quitte à passer pour un pessimiste dépressif  — été plutôt lucide quant à la marche du monde, durant toutes ces années où j’ai tenu ce blog. Je n'en tire aucune fierté. Je préfèrerais être l'idiot du village et dessiner avec mes doigts. Je ne me suis jamais fait beaucoup d’illusions sur la nature humaine. Je me range à l'avis de Jean Rostand pour qui "L'humanité est une maladie de la terre. Sur les planètes saines il n'y a pas d'homme". Pourtant je n'imaginais pas que cette réélection se produirait. Je ne pensais pas que le choix délibéré de la connerie fut possible. Surtout après ce débat où il s'était couvert de ridicule. Mais bon, les gens qui votent pour Trump ne sont pas dans le domaine de la rationalité de l'intelligible et de l'argument, ils sont dans celui de la croyance. Et les faits ne pénètrent jamais le monde des croyances.
Et de plus, tout cela advient au pire moment de l'histoire de l'humanité, celui où sa survie est  pour des raisons écologiques et climatiques, plus menacée que jamais, et que sa responsabilité dans cette situation n'est plus à démontrer . On pourrait penser qu'on a atteint le fond, mais non apparemment il sera toujours possible de creuser un peu plus, et l'on peut décemment redouter que le pire soit à venir.
Jamais autant d'ordures patentées et de crétins notoires n’ont accédé en même temps au pouvoir en différents endroits du monde. A la différence des dictateurs de la fin des années trente, ils sont nombreux aujourd’hui à posséder en plus l’arme nucléaire. Bref, on n’a pas le cul sorti des ronces. 
Cela va être difficile d’avoir l’esprit léger dans les années qui viennent. Difficile aussi de s'en tenir aux préceptes du maître de Kopan.
Le weekend dernier, le dramaturge Wajdi Mouawad s’exprimait ainsi dans un entretien au journal Le Monde, : "Avec la probable victoire de Donald Trump, disait-il nous allons entrer dans une ère où la violence comme mode d’expression va se dessiner comme un droit allant de Washington à Moscou, de Tel-Aviv à Téhéran, de Pékin à Washington. Le cercle se referme sur notre époque. Entre la crise climatique et la crise géopolitique, la faillite de cette époque est d’autant plus abyssale que nous élisons ceux qui voient cette faillite comme une victoire. Comme il est chrétien et qu'il croit au salut de l'humanité et à la rédemption, il ajoute "Nous allons devoir faire preuve d’une grande solidarité pour passer à travers le cloaque qui approche et continuer à poser des gestes, si petits soient-ils, pour sauvegarder notre rapport à l’autre. Un rapport où la bonté et l’affection, comme des insectes en voie de disparition, devront être préservées pour être repollinisées plus tard. Sans doute pas de notre vivant. Pour nous, je crains qu’il soit un peu trop tard."
En exergue de cette publication, j'ai mis une photo du buste de Stefan Zweig, dont j'ai déjà parlé il y a quelque  mois. Je crois qu'aujourd'hui, il ne prendrait même pas le temps d'écrire un livre avant de se suicider.

mardi 5 novembre 2024

La Chose

 
 
 
Voilà,
au milieu du dépotoir, la chose gisait là dans la boue, inerte, suintante, exhalant une odeur putride. Relents d'ammoniaque d'essence et de pourriture. Surtout il y avait ce silence pesant laissant craindre l'imminence d'un imprévisible et soudain danger. Nul oiseau ne passait plus dans les parages. Tout semblait s'être figé dans une attente trouble et oppressante.
Depuis des jours, les soldats se relayaient pour monter la garde sans que rien ne se produise. Ils se tenaient à distance, masquant leur malaise. Pas un ne voulait approcher "la bite", comme ils appelaient entre eux cette gigantesque vermine, avec des airs bravaches pour se donner une contenance. Ils l'avaient trouvée là, mystérieuse, incongrue, sinistre. Parfois des mouches bourdonnaient en essaim autour de sa masse gluante. Elles paraissaient dessiner une forme, halo ou couronne mouvante. Elles ne restaient jamais bien longtemps, puis s'éloignaient avant de revenir quelques heures ou quelques jours plus tard. Rien ne semblait régler ces agaçantes apparitions. C'était comme un rite ou une connivence tacite entre les insectes et la bestiole que rien n'expliquait.  Les nerfs étaient mis à rude épreuve. Qui sait s'il ne se tramait pas quelque chose sous terre. Des hommes avaient tenté de s’approcher, au début, la première nuit. Mais à chaque pas vers la chose un vertige sournois les étourdissait. Leur poitrine suffoquait sous un poids étrange, une main invisible les prenait à la gorge. 
On redoutait que le moindre geste, le bruit le plus infime pût réveiller la chose.  
Alors on restait là vigilant, aux aguets. 
Les heures passaient, et la chose demeurait, inerte, comme un secret échappé des tréfonds de la terre.
Soudain, un frémissement traversa la surface de la créature. Un imperceptible frisson en même temps qu'un bruit, subtil, perça le silence, comme un râle profond. La chose gonfla pour se ramollir  aussitôt. 
De nouveau ce fut le silence
Les hommes s'étaient reculés d’un même mouvement, suspendus, le souffle coupé. Était-ce un battement de vie ou simplement l’illusion provoquée par l’air tremblant sous un pesant soleil ?
shared with midweek muse challenge -

lundi 4 novembre 2024

Mais il y a toujours quelque chose qui m'échappe (16)

 
 
Ça me revient
en Mars 2008, au jardin des Tuileries, on pouvait apercevoir une des araignées de Louise Bourgeois  exposée sur une pelouse
 
Ça me revient
c'est dans la salle à manger d'un club de vacances à Hammamet où je m’étais rendu parce que je ne voulais rien faire d’autre que me baigner et dormir que .j'ai vu en 1997, le but de Roberto Carlos

Ça me revient

dans les années soixante-dix il y avait un marché des artisans au pied des remparts d’Avignon non loin de la porte de l’Oulle


Ça me revient

Avoir vu le Don Quichotte de Grigori Kozintzev au cinéma Le Cosmos, rue de Rennes, qui fut spécialisé dans la diffusion de films soviétiques entre 1978 et 1993.


Ça me revient

Dans les années 70,  il y eut une éphémère revue de bandes dessinées qui s’appelait Mormoil

 
Ça me revient 
à Biscarrosse-Bourg Mr Vignault , le vieux voisin qui possédait une 203 grise, avait planté des fraises dans son jardin, beaucoup de fraises. J'avais le droit d'en ramasser, ce dont je ne me privais pas.
 
Ça me revient
être passé il y a très longtemps avec Philippe et Dominique dans la propriété magnifique de Jacqueline Badord (qui fabriquait des bijoux) et Olivier Descamps (qui était sculpteur) à l'entrée de Draguignan.
   
Ça me revient
ce film incroyable tourné avec peu de moyens par  Bi Gan "kaili blues" qui se passe à Kaili une petite ville brumeuse de la province de Guizhou. Ce film s'illustre en particulier par une scène en plan séquence de près de quarante minutes, ou un personnage traversée un village en moto
 
Ça me revient
avoir entendu le psychanalyste Serge Lebovici, une nuit à la radio et avoir trouvé ce qu'il disait particulièrement intelligent
 
Ça me revient 
le bonheur avec lequel Philippe contemplait l’arbre à papillons qu’il avait planté dans la petite courette de la maison des filles à Châteaudouble
 
Ça me revient
les fins d'été à Châteaudouble, après le quinze août avec les orages sur la falaises en face, et la mélancolie de la rentrée qui pointe son nez
 
Ça me revient 
ces rumeurs absurdes sur la mort présumée de Paul Mc Cartney, avec ces signes que les gens malintentionnés décryptaient sur des pochettes de disques, et l'hypothèse d'un sosie et toutes ces conneries. Les théories complotistes existaient déjà, ont existé de tous temps, mais il n'y avait alors pas les réseaux sociaux pour leur donner tant d'amplitude
 
Ça me revient 
l'épopée de l'équipe de Corée du Nord à la World cup de 1966
 
Ça me revient 
les noms des six candidats à la présidentielle de 1965, il y avait Maurice Barbu qui je crois avait pleuré lors d'une de ses interventions télévisées et dont on disait qu'il était le candidat des chiens battus, François Mitterrand, Jean Lecanuet qu'on surnommait le Kennedy français, le général De Gaulle, Tixier-Vignancourt le candidat d'extrême droite pour lequel mon géniteur a voté, et un type Pierre Marcilhacy dont je ne me souviens plus du parti
 
Ça me revient, 
c'était bon d'avoir treize ans à Biscarrosse et d'entendre pour la première fois "Le métèque" de Georges Moustaki à la radio. C'est comme ça que j'ai appris le mot "maraudeur" et que c'était pas si grave de voler des fruits dans les jardins.
 
Ça me revient, 
l'année où j'ai habité à Biscarrosse-Plage, passait souvent à la radio que j’écoutais seul dès que je rentrais de l’école et le jeudi (car mes parents n’étaient pas là) il y avait Be my baby des Ronettes.
 
Ça me revient
les tableaux de Cueco avec des villes peuplées de chiens grimpant des escaliers monumentaux
 
Ça me revient 
quand j'ai acheté mon lecteur de cd portable à Hong-Kong, et le disque de Mozart, avec les concerto 16 et 17 la réflexion de Didier,  dans notre pension de famille à Manille :"tu ne prends pas de risque"
 
Ça me revient, 
mais peut-être l'ai-je déjà écrit, en Juillet 1996, ou fin juin, peu avant d'aller jouer "La Cerisaie" à Avignon, nous avions fait une avant première à la cité Universitaire. Mes amis Pascal et Catherine Maubert étaient venus et je les avais ensuite rejoints en compagnie de Christelle après la lecture des notes dans un restaurant peut-être la Closerie des Lilas, mais ça je n'en suis pas sûr. Par contre je me rappelle très bien que Catherine m'avait offert le parfum Philosykos de chez Diptyque, et chaque fois que je le mets je pense à elle. 
 
Ça me revient
une poète qui s’appelait Mitsou Ronat. Mitsou était aussi le nom d’une souris dans une bande dessinée de mon enfance. Je ne sais plus laquelle
 
Ça me revient, 
au début des années soixante, au moment de l'émergence du"rock français" ce qui en fait ne veut strictement rien dire, existait un groupe au nom bizarre "le système crapoutchik". En faisant des recherches j'ai appris que c'était l'ancien groupe d'accompagnateurs de Jacques Dutronc, mon chanteur préféré des années soixante
Ça me revient, 
Dominique surnommait parfois sa fille Agnès Anoushka et plus souvent Nouche ou Nouchette
 
Ça me revient
lorsque nous avions coutume de nous retrouver avec  Gabriela Vitek, une jeune tchèque, au café de l’Industrie, parce que cela lui rappelait les grands cafés de Prague.
 
Ça me revient
lorsque Agnès et Delphine s’amusaient à me maquiller. C’était des jeux d’adolescents auxquels je me prêtais de bonne grâce.

Ça me revient
La fois où j’ai volontairement été cruel avec la génitrice. Il y avait ce spectacle de Didier Flamand, Ecce Homo  à l'école polytechnique, et j'avais dit à Dominique que c'était vraiment bien et qu'il fallait venir. Pour éviter qu'elle dépose sa carte d'identité à l'entrée du 5 rue Descartes (c'était une enceinte militaire et les spectateurs devait laisser leur carte) je l'avais fait rentrer par la porte d'entrée que j'utilisais habituellement. Ma génitrice avait tenu à l'accueillir car elles ne se connaissaient pas. Pour saluer Dominique, je l'ai embrassé devant elle que je n'embrassais plus depuis longtemps
 
Ça me revient
l'usine Géo, au Kremlin-Bicêtre à la toute fin des années soixante. on y fabriquait des saucisses industrielles. Quand on passait devant certains jours ça puait vraiment.
 
Ça me revient
un jour j'étais en compagnie d'Anne D. une très belle et très grande fille qui était notre décoratrice sur le spectacle "Romulus le grand" et au moment de nous séparer, elle m'avait dit sur le trottoir qu'elle s'apprêtait à aller voir et son "vieux" rue des martyrs. Elle m'expliqua qu'elle avait un "vieux" très gentil, qu'elle voyait régulièrement
 
Ça me revient
à l'époque où j'ai découvert le surréalisme, j'étais particulièrement fasciné par les œuvre de Yves Tanguy. J'aimais ces formes étranges, comme du plasma, abstraites mais évoquant cependant des figures. Bien plus tard j'ai découvert les œuvres de Kay Sage son épouse, moins radicales mais tout aussi fascinantes
 
Ça me revient,
l'incroyable interprétation du personnage de Pierre de Touche par Mario Gonzales dans "comme il vous plaira" de Shakespeare monté par Benno Besson en 1976

Ça me revient,
Philippe aimait beaucoup les peintures de cette artiste portugaise Vieira Da Silva

Ça me revient, mais il y a toujours quelque chose qui m'échappe
 

dimanche 3 novembre 2024

Pêle-mêle avec dessins

Voilà
par hasard au détour d'une rue, ici dans le quatorzième à l'angle de la rue du départ et du Boulevard Edgar Quinet, on trouve encore des traces de la célébration des Jeux Olympiques, comme si on ne pouvait se résoudre à l'idée que la fête est finie.

Même les rues sont encore pavoisées comme ici, Bd St Germain. La mairie semble vouloir garder les bannières jusqu'à la fin de l'année.
 
 
Sinon, je suis tombé par hasard sur cette phrase de Sénèque : "En suivant le chemin qui s’appelle plus tard, nous arrivons sur la place qui se nomme jamais". Cela m'a inspiré cette illustration.
 
 
 
Comme je ne sors plus beaucoup et que je n'ai plus trop l'occasion de prendre des photos, je recommence à traficoter des images chez moi.

samedi 2 novembre 2024

Chats errants

 

Voilà,

Au fond, on s’arrange comme on peut avec le monde. Pour y respirer pour y survivre. En être, y trouver sa place n’est jamais allé de soi pour moi. La plupart du temps je n’ai pas vraiment bien su trouver la bonne distance avec mes semblables. Maintenant je dors le jour je gamberge la nuit. Je ne vois plus grand monde. Je me retire petit à petit de cette agitation. Je vis avec des fantômes. J’écoute de la musique. La musique, c’est bon. C’est ce que l’humanité a produit de plus mystérieux. Ça aide à vivre. Ça réconforte. J’espère que cela m’aidera à mourir sereinement. Dommage que je n’ai jamais su jouer d’un instrument. En attendant, pour donner une forme à ce que les mots ne me permettent pas de nommer, je compose des images. Cela je le fais encore. Depuis si longtemps je le fais. Je ne sais pas si je le fais bien, mais je le fais du mieux que je peux. Et je ne m’en lasse pas. C’est une des rares choses dont je ne me lasse pas. À bien y regarder c’est ce qui me ressemble le plus. Toutes ces images, pas simplement les photos, mais les dessins les collages, les assemblages les tripatouillages photoshopés. C'est là que je suis. Il ne faut pas me chercher ailleurs. Mais au fait, qui songe à me chercher, ici là ou autre part ? Ces chats errants peut-être.

shared with aww monday - wordless wednesday

Publications les plus consultėes cette année