Voilà,
debout dans son salon elle regarde l'écran pendant que son mari finit de disposer les apéritifs. Je n'en crois pas mes oreilles dit-elle ce type est fou. C'est vrai. On pourrait aussi ajouter fat, malhonnête et cynique. Elle regarde ce jeune président s'obstinant à mentir comme un enfant devant un jouet qu'il a lui-même cassé et qui accuse "les autres". L'ensemble de son discours est aussi mensonger qu'immoral. Oui ce mec est vraiment un taré qui perd les pédales et tient des propos révélateurs d'une pensée à la dérive, à la limite de l'incohérence.
Évidemment, certains vont dire qu'il y a bien pire et bien plus inquiétant ailleurs. C'est vrai, mais ici comme ailleurs, nous ne sommes pas au bout de nos surprises et de nos effrois.
Évidemment, certains vont dire qu'il y a bien pire et bien plus inquiétant ailleurs. C'est vrai, mais ici comme ailleurs, nous ne sommes pas au bout de nos surprises et de nos effrois.
*
Les lignes qui précèdent, donc, je les avais écrites début Janvier. Je pensais qu'elles pourraient être encore d'actualité deux mois plus tard. Mais là, depuis hier, en matière d'ignominie télévisuelle assurée par des politiques, nous sommes passés dans une autre dimension. La nuit dernière j'ai mal dormi à cause d'une nouvelle d'un tout autre ordre dont je me serais volontiers passé, (bien que je la sentais venir depuis un moment). Et à un moment en scrollant sur mon téléphone j'ai eu connaissance de ce traquenard tendu à Zelensky, par Trump et Vance. Ça ressemblait à un très mauvais film, mais c'était la réalité. C'était là quasiment en direct, et totalement sidérant. Aussi stupéfiant que la chute des tours du WTC. Le truc que tu regardes sans parvenir à y croire. J'ai eu envie de faire une image (avec une typo american typewriter), tant j'étais dégoûté par ces deux ordures, ces deux tarés qui sont des fous dangereux, sans parler des journalistes courtisans qui eux sont des cons finis. C'est Dr Folamour puissance 10. Comme plein de gens, je n'avais imaginé qu'un telle ignominie fut possible à ce niveau de décision. Ça ressemblait aux procès staliniens, et aux auditions du temps de Mc Carthy.
Il n'est pas possible de réfléchir ou d'écrire sur ça. D'ailleurs je n'en ai pas envie, j, mais difficile de faire comme si ça n'existait pas. Tu essaies de prendre le temps de la réflexion, et aussitôt Trump balance un truc à la fois incohérent et débile, tu ne sais pas d'où ça sort. Tu te demandes si c'est inné ou s'il a beaucoup travaillé pour être aussi con. C'est le mec qui fait tout de même passer George Bush Jr pour un génie ! J'ai vu une vidéo, où il demandait si l'Espagne ne faisait pas partie des BRICS. Le mec est à peu près aussi nul en géographie que la plupart des citoyens de son pays, mais lui, il est président. Bref c'est pire qu'une version alternative de "The plot against America" de Philip Roth.
Allez encore une image et un texte écrit il y a deux ou trois jours que je voulais publier demain ou après demain. Je brade.
Ce montage rend bien compte de l'état de confusion mentale où je me
trouve. Trop de choses se bousculent dans ma tête. Je ne pense pas être
le seul dans ce cas. L'époque est anxiogène. Je devrais m'en foutre.
J'approche du bout de la piste. Mais quand même. Parfois je me dis que j'ai commencé ma vie sous le signe de la guerre, et qu'elle finira de même. Cela ne m'enchante pas.
Alors je vais être plus futile pour une fois. Parler de cinéma. On va faire un saut dans le temps. À l'époque où l'on imaginait que la place de la Concorde à Paris pourrait ressembler à un un campus américain.
En début de semaine, après avoir assisté à une leçon de Wajdi Mouawad au Collège de France je
suis allé voir "les quatre journées d’un rêveur" de Robert Bresson
inspiré de la nouvelle "Les nuits blanches" de Dostoievski. Je ne l’ai
jamais lue. En revanche, je me souviens de l’adaptation
cinématographique de Visconti découverte il y a quelques années à la
cinémathèque. Ce fut une révélation et en même temps un grand bonheur de
l’avoir partagée avec une certaine personne et qu'elle en ait été
touchée, elle aussi. J’en garde un si puissant souvenir que la
proposition de Bresson m’a semblé bien pauvre et bien terne en
comparaison.
Autant le dire, je me suis souvent ennuyé pendant le film. Malgré Isabelle Weingarten qui est plutôt bien, le parti pris de l’interprétation m’a déplu. Cette neutralité atone m'exaspère. Pourtant j’ai bien apprécié des œuvres comme "Au hasard, Balthazar" ou "Mouchette" ou "Pickpocket " que j’ai vus dans ma maturité.
Autant le dire, je me suis souvent ennuyé pendant le film. Malgré Isabelle Weingarten qui est plutôt bien, le parti pris de l’interprétation m’a déplu. Cette neutralité atone m'exaspère. Pourtant j’ai bien apprécié des œuvres comme "Au hasard, Balthazar" ou "Mouchette" ou "Pickpocket " que j’ai vus dans ma maturité.
Je
tiens à rajouter ce détail parce que, en fait j’ai découvert Bresson
quand j’étais adolescent, avec ses films en couleur : "Le diable
probablement", "L’argent" et "Lancelot du lac". Je sais très bien qu’à
l’époque je n'aimais pas sa façon. Je trouvais ses films mal
interprétés. Tout sonnait faux à mes oreilles. Cette distanciation
m'empêchait de rentrer dans l'histoire. Cela ne me parvenait pas. Cela
ne parvenait pas au jeune homme que j’étais. Je trouvais ça maniéré,
d'un formalisme creux. Dénué de vie. Quelque chose d'autre m'agaçait que
je ne me formulais pas. J'y reviendrai.
Je me souviens très bien que Dominique à qui je dois tant,
qui a contribué à ma formation, qui m’a éduqué intellectuellement
artistiquement, bref cette femme merveilleuse à qui je dois tant de
choses, et sûrement le meilleur de ce que je suis, eh bien elle aimait
beaucoup Robert Bresson, et je ne comprenais pas son enthousiasme. Je me
disais, "c'est bizarre, cette femme si intelligente, si sensible si
cultivée, comment se fait-il qu’elle trouve ça bien, qu'est-ce qu'elle y
trouve que je ne vois pas ?".
Que cela soit clair, je ne remets pas en cause le génie de Bresson. Si de grands cinéastes que j'admire par ailleurs (Tarkovski, Scorcese, Al Hartley, Wenders, et même Fassbinder) le tiennent pour un maitre c'est qu'il doit y avoir des raisons. L'une d'elles tient peut-être au fait au fait qu'ils ne l'entendent pas dans leur langue native.
Ce qui m'a immédiatement contrarié dans "Les quatre nuits d’un rêveur", c'est l'aspect compassé, un peu précieux, la diction à la fois scolaire et bourgeoise. Oui ces corps, la façon dont ils se tiennent, dont ils sont vêtus, même dans leur "négligé", transpirent malgré eux le discours de domination. D’ailleurs c’est bien dans les milieux de la haute bourgeoisie que Bresson allait souvent chercher ses "modèles" comme il disait.
Que cela soit clair, je ne remets pas en cause le génie de Bresson. Si de grands cinéastes que j'admire par ailleurs (Tarkovski, Scorcese, Al Hartley, Wenders, et même Fassbinder) le tiennent pour un maitre c'est qu'il doit y avoir des raisons. L'une d'elles tient peut-être au fait au fait qu'ils ne l'entendent pas dans leur langue native.
Ce qui m'a immédiatement contrarié dans "Les quatre nuits d’un rêveur", c'est l'aspect compassé, un peu précieux, la diction à la fois scolaire et bourgeoise. Oui ces corps, la façon dont ils se tiennent, dont ils sont vêtus, même dans leur "négligé", transpirent malgré eux le discours de domination. D’ailleurs c’est bien dans les milieux de la haute bourgeoisie que Bresson allait souvent chercher ses "modèles" comme il disait.
Dans la façon dont, en marchant dans la nuit,
ces personnages discutent de l’amour, des tourments du désir, de la
passion, je ne vois que préciosité, artifice, et j'entends aussi
beaucoup de poncifs. C'est déjà ce que j'éprouvais confusément quand
j’étais adolescent. Oui, je vois un discours de classe qui, au fond me
dégoûte et attise encore en moi une sorte de colère.
Et
puis les lieux aussi. Les extérieurs, de nuit la plupart du temps se
passent en les bords de Seine. On a l’impression que c'est tourné entre
la place Dauphine, le pont neuf le quai Voltaire, le drugstore St
Germain. et si on s’aventure un peu plus loin, on sent bien que c’est le
XVIème. Si les intérieurs sont modestes, les corps et les voix qui les
occupent n’y sont pas accordés.
Finalement
ce qui m'a le plus touché dans ce film, ce sont les signes de l’époque.
Tout ce qui dénote le début des années 70. Le mini K7 Phillips dans sa
housse rigide en cuir noir, que le personnage principal utilise pour
enregistrer ses pensées. J’en ai déjà parlé du mini K7.
C’était l’objet à avoir absolument, le cadeau de Noël de 1969 que
réclamaient tous les jeunes gens de ma génération. Autre signe de ces
temps : les hippies (comme on les appelait alors) —bien propres
cependant, des hippies de cinéma— jouant de la guitare, la nuit sur les
quais de Seine. La musique est d'ailleurs plutôt bonne. Il a bien été
conseillé par Michel Magne sur l'affaire. Mais quand même on
a l’impression que ces jeunes gens, qui n'ajoutent rien à l'intrigue, sur les
quais sont là juste pour l’ambiance pour le climat pour faire "à la mode".Ils décorent.
Et
je ne peux alors m'empêcher de constater que c’est un regard de vieux
que porte Bresson sur cette jeunesse. Je veux dire par là, nous n'étions
pas comme ça.
C’est
cela peut être ce qui est le plus touchant dans le film, et même temps
un peu pathétique : ce désir de connivence et d'empathie pour une
jeunesse qu'au fond il ne comprend certainement pas. Notre façon d'être
dostoievskiens était beaucoup plus désepérée, incarnée, et risquée.
Cette envie de faire jeune, d’utiliser des jeunes corps pour faire œuvre
mais clairement c’est l’œuvre d’un vieux. Sa façon de tourner les scène de
sexe, très chastes en fait, a tout de même quelque chose d'assez
malsain. Elles ne sont pas d'une grande nécessité, elles sont bien
gentillettes, mais pourtant cinquante ans après on sent quand même le
regard un peu dégueulasse, un peu libidineux et voyeur.
Quand
il tourne son film Bresson a l’âge que j’ai aujourd’hui. Donc je peux
très bien comprendre le décalage dans sa perception des jeunes, même si
j'ai une fille qui aujourd'hui a l'âge de ses protagonistes. Je peux
comprendre le mélange d'étonnement, de curiosité, d'envie mêlée de
regret.
En
fait je réalise que je n'aime pas les films en couleur de Bresson.
Peut-être que le noir et blanc, qui est déjà un formalisme qui éloigne
de la réalité et la rend moins triviale, me permet d'accepter plus
facilement le décalage qu'il opère en faisant jouer ses modèles de façon
désincarnée. Je ne sais pas. C'est une hypothèse qui ne vaut que pour
moi.
Malgré
tout j'aimerais les revoir tout de même par curiosité. Et puis voir
"Une femme douce" que je n'ai jamais vu. Je ne sais pas si l'occasion se
présentera.
Une anecdote au passage.
Je me souviens que pour un film, la directrice de casting, — jeune et que je connaissais suffisamment pour qu'elle me fit cet aveu — m'avait dit que le réalisateur, qui depuis a acquis une certaine notoriété, souhaitait que la scène fut jouée sur un mode bressonnien, tout en m'avouant qu'elle ne savait pas trop ce qu'il entendait par là. J'ai fait comme elle a dit, j'ai eu le rôle. Très modeste au demeurant.
Je me souviens que pour un film, la directrice de casting, — jeune et que je connaissais suffisamment pour qu'elle me fit cet aveu — m'avait dit que le réalisateur, qui depuis a acquis une certaine notoriété, souhaitait que la scène fut jouée sur un mode bressonnien, tout en m'avouant qu'elle ne savait pas trop ce qu'il entendait par là. J'ai fait comme elle a dit, j'ai eu le rôle. Très modeste au demeurant.
Your reflections on Bresson are fascinating, especially the way you contrast your youthful perception of his work with your current perspective.
RépondreSupprimerI haven't seen any of Bresson's films--- I must rectify that. I will seek out a B&W one to be my first. I've collected the usuals over the years-- Melville, Clouzot, Renoir, Dassin's Rififi, Besson's Nikita, Leon, etc. But Nikita is the only one in French. I was surprised to find that Melville appears to be my favorite, based on numbers. As for the white house horror, it may have actually brought some additional people (and nations) into the opposition. One hopes. Oh-- And I just discovered that both you and Pierre Carrive are in "Sauver ou périr". I'll probably never get a chance to see that one. Anyway---
RépondreSupprimerCe matin un billet d'une chère amie, qui s'appelle Dominique elle aussi, m'a également remuée: http://asautsetagambades.hautetfort.com/archive/2025/03/01/reste-t-il-un-espoir.html
RépondreSupprimermerci beaucoup pour le lien. J'aime beaucoup ce site que tu m'avais déjà recommandé. J'avais hésité à donner ce titre à sauts et à gambades au mien...
SupprimerThank you for your thoughts on Bresson, I am not familiar with the films.
RépondreSupprimerI am afraid our leader is not very diplomatic, he was not my choice but we are now stuck.
Take care, have a great week.
Yes, I agree...
RépondreSupprimerC'est triste de voir que tout semble se répéter. Il est triste de constater que l'humanité ne veut rien apprendre.
Merci beaucoup pour cette contribution actuelle, ce collage fantastique pour MosaicMonday.
Meilleurs vœux, avec les salutations de Heidrun
very good
RépondreSupprimerStupidity is but one of his many shortcomings ... and our country is paying the price, while those who voted for him wonder around not noticing what they have done. I have lived through many generations of ups and downs and yes, I too thought George Bush Jr. was ignorant, but, at this point, I would love to have him back for he was at least a decent man with some a sense of values. I am afraid to wade through the next four years as I can't imagine what our country will be like by then ... Those of us who care, who admire and support the Ukraine, who love our Canadian and Mexican neighbors, who remember what Russia has done to the world (and continues to do), who admire the hundreds of thousands of government workers who have kept our country safe, clean and honorable, who love every Veteran who has put our country before his/her life, who admire the researchers who strive to protect us from disease and provide ways to a better life ... and who dread whatever else they (Trump, Vance and their sycophants) will trample on before we can rid ourselves of them ... We live each day in fear and pain and anger ... not the way any of us thought we would be spending our lives.
RépondreSupprimerI can't speak to your comments on the Bressonian style because I am not familier with it, so I will leave with an appreciation for your insights into our current lives. Appreciate what you have ...
Andrea @ From the Sol