Voilà,
nous ne nous étions pas vus depuis longtemps. Était-ce la mort récente au
cœur de l'été d'une relation commune qui nous a incités à nous recroiser
? Ce fut un déjeuner sympathique. Je regardais cet homme qui avait
influencé le cours de ma vie, avec amitié mais en même temps je
constatais qu'en dépit des années et de l'inévitable altération physique, il ne changeait pas. Il avait toujours autant de projets
personnels de films et de spectacles qui jamais n'aboutiraient, mais en
parler semblait lui faire du bien. Des années que cela durait. Toutefois
il continuait de vivre confortablement en poursuivant sa carrière
"d'acteur de second rôle" dans des films de cinéma ou de télévision plus
ou moins prestigieux qui, outre de confortables revenus, lui assuraient reconnaissance et visibilité
non seulement dans sa profession mais auprès du public. pour ma part, ça m'aurait suffi.
Sans enfant, d'ailleurs au passage il me fit
remarquer — comme il l'avait déjà fait vingt ans auparavant lorsque
j'étais devenu tardivement père — que j'avais fini par "y passer" selon
son expression non dénuée d'un fond d'ironie, il ne s'est jamais occupé que de
lui-même, de son confort de son bien-être. Il
est très représentatif de cette génération de baby-boomers narcissiques
et hédonistes dont la vie à coïncidé avec les soixante dix années de paix relative qui (à l'exception de l'Irlande du nord, et plus tard de la Yougosavie) se sont écoulées en Europe occidentale.
Même si c'est l'un des êtres les plus égoïstes que je connais, je
ne peux m'empêcher de l'aimer bien, sans doute en raison des quelques aventures artistiques et professionnelles que nous avons vécues ensemble, et aussi de ce séjour à Manille en 1989, lorsque nous étions allés travailler au centre Culturel Philippin. J'avais alors la moitié de l'âge que j'ai maintenant. Et puis quand même, je lui dois mes premiers cachets de comédien.
Vers trente ans, il avait réalisé un merveilleux spectacle
auquel j'avais eu la joie de participer. Le tout-Paris artistique
était alors à ses pieds qu'il s'est ensuite pris dans le tapis, car il voulait
faire à la fois, l'acteur au cinéma, et aussi la mise en scène de
spectacles coûteux, nécessitant une grande mobilisation, et de soutiens dont il ne pouvait disposer. Bref il a
finalement préféré faire l'acteur, où l'on est choyé, bien payé, et a continué de
nourrir des rêves irréalisables. Et puis peut-être appartient-il à cette catégorie de gens qui trouvent plus de jouissance à dire "non" plutôt que "oui".
Dans ce restaurant, il parlait, il parlait... particulièrement de ce nouveau projet qu'il avait en tête. Une
adaptation absolument improbable au regard du budget que
cela nécessite en ces temps de pénurie et d'incertitude, d'une pièce de Shakespeare rarement montée. Je le regardais, un peu médusé par ce flot de paroles (la concision n'a jamais été son fort), et ce débit frénétique qui l'avaient toujours caractérisé. Était-ce pour lui, une façon de tenir la mort à distance, de nier la vieillesse ? me demandais-je en regrettant ce que j'avais choisi sur la carte. Mahlneid est le mot allemand qui exprime ce sentiment de convoitise pour le plat commandé par votre voisin de table au restaurant.
shared with happy tuesday - pictorial tuesday - little things thursday - thankful thursday
What a story of life
RépondreSupprimerThe paths in life we each take. Beautiful meeting. Great observations on your part.
RépondreSupprimerThank you for joining the Happy Tuesday Blog Hop.
Have a fabulous Happy Tuesday. ☺
Thank you for sharing a bit of his and your personal life. Some acting, that if fabulous. :)
RépondreSupprimerWonderful sharing of lives. Thank you for linking up.
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