lundi 13 mars 2023

Toute chose fait signe


Voilà,
au lieu de me prendre à des activités plus concrètes et peut-être aussi plus nécessaires – mais j’en suis tout à fait incapable  – et sans doute mû par une sensation d’urgence, je publie ces dernières semaines beaucoup de chroniques sur ce blog. C’est une dérisoire parade au fait que je sens mes facultés intellectuelles et physiques s’amoindrir. Je redoute même de les perdre tout à fait d’ici peu. Il est certes possible que je dramatise la situation, mais tout de même, des symptômes agaçants autant qu’inquiétants s’accumulent. Je dors beaucoup à des heures irrégulières. Quoique je ne sois ni écrivain ni terriblement âgé, j’ai parfois l’impression d’être le personnage interprété par John Gielgud dans "Providence", le film d’Alain Resnais. J’ai tendance à me couper du monde, je vois peu de gens, et c’est très bien comme ça. Lorsque j’en vois je me retrouve dans des situations embarrassantes. L’autre soir au théâtre par exemple, j’ai croisé un camarade que je n’avais pas revu depuis longtemps. Au moins l’ai-je reconnu, je savais qui c’était, où et avec qui il travaillait en ce moment (merci facebook), j’étais en mesure de lui demander des nouvelles d’amis communs, mais me rappeler son nom et son prénom, je m’en trouvai soudain tout à fait incapable. Je crois que ma défaillance est passée inaperçue, mais le malaise suscité m’a poursuivi quelques heures durant. Alors je préfère ne pas trop socialiser. En outre la mémoire des mots et des noms se dérobe aussi quand je suis seul. Il y a quelques jours, j’étais incapable de retrouver le prénom du producteur des Beatles. Je pensais John au lieu de George Martin. D’ici peu, si cela continue j’oublierai bientôt le nom des quatre gars de Liverpool. Je serai alors vraiment cuit
Ces jours-ci, prendre des notes et bidouiller des images, sont les seules contraintes que je m’impose volontiers, en plus de faire les courses parce qu’il faut bien se nourrir. Je lis ou relis quelques bouquins aussi. J’ai cependant du mal à me concentrer, je me lève tard me couche de même. Je me réveille souvent au milieu de la nuit. J’écoute alors de la musique classique à la radio. Cela m’aide parfois à me rendormir, parfois non. Il arrive même de temps à autre que cela me stimule pour travailler, la plupart du temps cela m’intrigue, retient mon attention et suscite ma curiosité. Je me livre alors à toutes sortes de recherches désordonnées sur le net. Et c’est déjà le matin.
De nouveau le merle chante à l’aube, ce qui annonce le retour des beaux jours. Le Forsythia qui a commencé de fleurir plus prématurément que jamais auparavant (les premiers bourgeons ont éclos fin février) s’épanouit et se constelle de fleurs jaunes de plus en plus nombreuses. Peut-être le prunus du jardin des plantes est-il déjà en train de fleurir. Je pourrais aller y faire un saut un de ces jours prochains. Cela me fera une promenade si toutefois cesse la douleur qui s’est installée depuis quelques temps dans ma jambe droite. En attendant je consulte des planches contact et continue de scanner de vieilles photos. Les souvenirs remontent. Je repense à ce poème de Roberto Juarroz, que je lis beaucoup ces derniers temps.
  
Toute chose fais signe vers autre chose.

Vers quoi fais signe 
l'histoire verticale de l'arbre ?
Vers quoi fais signe 
l'oasis de ton corps?
Vers quoi fais signe la lumière
et vers quoi la nuit ? 
Vers quoi fais signe 
la raideur méthodique des morts ?

Peut-être que tout fait signe vers un centre.
Mais tout centre fait signe vers le dehors.

oui, ce poème qui, je ne sais pourquoi, lui aussi fait signe vers ce paisible paysage du port de Cadaquès, pris en Janvier 1991, la veille de la première invasion de l'Irak. Une image du temps passé, dont je ne sais plus si elle est un centre ou un dehors. 

11 commentaires:

  1. Je confirme, le prunus du jardin est fleuri, pluie et vent vont se charger de très vite le délaver, mais c'est ici...

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  2. Not dismissing what you are saying, but in part I think COVID lockdowns have affected our memory abilitiy and focus, but have you checked it's not also low grade depression? But I agree, it is hard and worrying getting old....

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  3. Je me vois dans beaucoup de tes symptômes :-)

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  4. Ici , tu vas rire, un merle me fait des signes permanents: croyant voir un rival dans son propre reflet dans toutes les vitres de la maison, il s'acharne à le piquer depuis 2 semaines :-)) Signes vers le dehors, vers le dans dans son cas aussi.....

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  5. Beautiful view, beautiful photograph, a bit of melancholy

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  6. ...I've always been a bit of a loner!

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  7. I feel your pain! Two years of lockdown have affected us all in many ways. I think it will take time to recover.
    Your photo is beautiful and peaceful.

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  8. Covid lockdown has hard on all of us, but at least we survived. Love the calm shown in your photo.

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  9. Hallole,
    warum kannst du nicht schlafen und was hörst du für klassische Musik?
    Höre mal die Goldberg Variationen von Bach, er hat sie extra für einen Herrn geschrieben, der auch Schlafstörungen hattte.
    Bis morgens vor dem PC zu sitzen, ist auch keine Lösung.
    Gehe raus und setze dich in die Sonne und genieße sie. Frische Luft und die Natur sind ein guter Arzt.
    Liebe Grüße Eva
    die dir gute Besserung wünscht.

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