vendredi 1 septembre 2023

Notre ciel est sans dieu

 
 
Voilà,
il paraît — j'ai lu ça quelque part je ne sais plus où — que  pour René Girard le sacré et la culture avaient eu une origine conjointe instaurant pour les premiers groupes humains une forme de réponse à un risque structurel d’autodestruction violente. Son catholicisme l’avait même conduit à penser qu'au cours de son histoire, l’humanité se trouverait à nouveau confrontée à un tel moment de vérité et qu'elle devrait alors choisir entre l’autodestruction violente et une conversion à la non-violence radicale – c’est-à-dire, pour lui, à l’amour christique. 
Pourquoi pas  Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous vous, mais pour ma part j’ai vaguement l'impression qu’on n'en prend guère le chemin. Je ne veux pas pourrir l'ambiance, mais il me semble que l'amour christique depuis deux mille ans qu'on en parle ça marche pas des masses. On a commis plus de crimes que de bienfaits au nom du Christ. Et si on ne s'en tient qu'aux vingt premières années de ce siècle, celles-ci ont plutôt amplifié des fractures qui étaient là depuis longtemps. La violence de l'humanité, non seulement vis à vis d'elle-même mais encore à l'encontre de tout ce qui constitue son espace vital n'a cessé de s'intensifier. 

Si cette frénésie suicidaire bien évidemment se manifeste dans toutes les zones de conflits par des catastrophes humanitaires, d'autres désastres l'exacerbent : le désastre nucléaire rampant de Fukushima dont on ne parle plus mais qui n’est en rien résorbé (tiens à ce propos on a rejeté des eaux radioactives dans le Pacifique mais il paraît que ce n'est pas dangereux), les sols contaminés un peu partout sur la planète, les océans et les fleuves pollués, l’air devenu irrespirable en certaines régions, et bien sûr le bouleversement climatique et écologique impossible désormais de passer sous silence. Les nombreux fléaux qui en résultent (méga-incendies, canicules, violentes précipitations, inondations, glissements de terrains, disparitions des espèces etc) ont encore alimenté les nouvelles des derniers mois, sans pour autant susciter de décisions collective d'envergure.

Tout laisse à penser que face à cette adversité l’humanité ne semble plus disposer de l’intelligence adéquate pour réaliser — c'est à dire rendre tangible à son esprit — l’ampleur du désastre généré. Cette dissonance cognitive amène les hommes — enfin ceux qui ont le pouvoir de décider du sort du reste de leurs semblables —  à continuer d’inventer de super-moyens et de super-slogans pour perdurer dans l’illusion que l'on peut continuer comme avant. Et nombreux sont ceux qui les croient et doutent encore de l'ampleur de ce lent cataclysme. Sans doute sont-ils persuadés que la providence divine les sauvera.

Bref, tout se passe comme si la connaissance s’était dissociée de la conscience. C'était quoi déjà cette maxime si souvent rebattue pendant les années de philo ? Science sans conscience etc... Eh bien oui, la ruine de l'âme on y est. Un peu plus vite et plus intensément que prévu.

D'ailleurs, y a jamais-t-il eu d’âme collective ?

L’humanité se trouve à présent dans l'incapacité de gérer les informations qu’elle a collectées et les transformations qui en ont résulté. Comme si sa propre science, qui l’avait jusque-là guidée sur le chemin de son devenir, s'avérait désormais l’agent principal de destruction de l’intelligence collective. Comme si dépérissait aussi son principal organe. 

On a déjà vu cela chez certaines espèces. Ces oiseaux par exemple dont les ailes sont devenues inutiles et ne leur permettent plus de voler. Et bien peut-être qu’on en est là, que le cerveau ne permet plus a l’humain de penser les conditions de sa survie.

"Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve" proclamait Holderlin.  Foutaises…

Et si autrefois on pouvait penser "Il n’y a pas moins de vertu à fuir le danger qu’à l’affronter". Il est désormais impossible de fuir le danger. Car il est en nous. Il est le fruit de notre propre activité qui a détruit tout possibilité de refuge. 

Certes, la rosée brille encore sur cette terre meurtrie, mais notre ciel est sans dieu. 

Et il est fort à craindre que ni la dévotion ni la piété ni la prière ne nous sauveront. 

Ainsi vont les choses dans le meilleur des monde.

16 commentaires:

  1. Je ne peux qu'être d'accord avec ta lucidité, mème si on aimerait qu'il en soit autrement...

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  2. On se dirige tout droit vers l’autodestruction violente, si nous ne changeons pas

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  3. ...enjoy a walk on the beach if you can.

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  4. More crimes than blessings in the name of Christ... Absolutely. Most wars are caused by people wanting someone else's stuff, or people forcing religion on others.

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  5. Wonderful high contrast photo of this crowd of people walking on the wet sand.

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  6. The metaphoric pessimism of poets and other thinkers has become too real. Religion never seemed to me to be a good response, and it's getting less effective as we spiral downwards.

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  7. Man committing hara-kiri using religion as the tool.

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  8. Un peu triste mais tellement intéressant.
    Comme l'a dit un philosophe, Je paraphrase: Sans Dieu, le ciel, la terre, et meme l'univers résultent, en effet, d'un accident cosmique, d'une explosion due au hasard. Il n’y a aucune raison attachée à son existence. Tout comme l'homme, ils sont de simples caprices de la nature ; les produits aveugles de la matière, du temps et du hasard. L'homme n'est qu'un tas de boue qui a développé de la rationalité.
    Ce qui est vrai de l'univers et de la race humaine l'est également de nous en tant qu'individus. Si Dieu n'existe pas, vous n'êtes qu'une erreur de la nature ; jeté dans un univers vide de sens, et voué à vivre une vie sans but.
    Donc, si Dieu n’existe pas, cela signifie que l’existence de l’homme et de l’univers n’a aucun but puisque la fin de tout est la mort. Tous deux sont venus à l’existence sans qu’un but quelconque leur ait été assigné, car ils ne sont que les produits d’un hasard aveugle. En bref, la vie est résolument sans but.

    Au fait, hier, J'ai pensé a toi en regardant "Grizzly Man". Tu me l'as recommandé. Wow, Quel homme bizarre!
    J'espère que tout va bien pour toi.

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  9. Ohhh schön, fast wie ein Scherenschnitt.
    Super!

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  10. Unfortunately it's called free will which God gave all of us. Doesn't help that each person views religion differently either.

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  11. Love the photo with its dark silhouettes and powerful sea. It goes well with your words

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