vendredi 28 février 2020

Six heures du soir l'hiver quand la nuit tombe


Voilà,
La solitude c'est pénible vers six heures du soir, l'hiver quand la nuit tombe et qu'il faut se faire à manger tout seul. La nuit par contre quand apparaît l'insomnie, et qu'aucune obligation sociale ou professionnelle encombre le lendemain et qu'il est possible de s'organiser pour confortablement travailler dans son lit — un bon oreiller, l'ordinateur sur un plateau, la musique classique en fond sonore — alors c'est vraiment bien, je suis tranquille pénard. Dans une légère hébétude, hors du temps, personne ne me regarde, ne me juge, ne risque de se trouver agacé par ma présence. C'est  le meilleur moment pour écrire, bidouiller des images. Un sentiment de liberté. Bien sûr le lendemain je vais le payer, je serai complètement à côté de la plaque, même si je me lève tard, mais tant pis, sur le moment je n'y pense pas. Je suis seulement occupé à divaguer, et dans mes errances nocturnes j'emprunte des sentiers détournés, je m'abandonne à la confusion des images qui me traversent. Je suis un voyageur sans âge, voyeur de ces apparitions juxtaposées qui me surprennent et me déconcertent. Je n'aurais jamais vraiment été adulte.
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mercredi 26 février 2020

Moment délicat

 
Voilà,
je réalise bien que je suis à un moment délicat, sinon critique de ma vie. D’une certaine façon elle devient plus périlleuse et précaire. Cela dit, c'est inévitable, c'est dans l'ordre des choses et c'est même assez banal. C'est juste la prise de conscience de tout ça qui est pénible : la certitude que, physiquement, rien n’ira en s’améliorant. Il y a un certain désagrément à constater sa propre dégradation physique et son chaos mental. Les tâches les plus infimes exigent un effort de concentration jusqu'à présent inédit. En fait, de moins en moins de choses suscitent mon intérêt. Et si j'ai toujours envie de bricoler des images, comme je le fais depuis un peu plus de quarante ans, je me fatigue des mots. Construire une phrase, un paragraphe, s'avère de plus en plus laborieux. Tout comme élaborer un raisonnement. J'ai désormais plus de souvenirs que de réflexions, bien que je commence à oublier certaines règles de grammaire.
Je cherche de nouvelles sources d’étonnement et de joie de vivre. J'ai encore du goût pour le bonheur. Mais une effrayante pensée me hante. Pas un jour ne passe sans que, à force de m’effleurer elle ne devienne obsédante. Je sais qu’elle relève en partie d’une névrose qui ne m’appartient pas en propre, mais elle n'en demeure cependant pas moins présente. Je me sens de plus en plus fragile et d'une certaine façon menacé. Mais bon question menace, il paraîtrait, si l'on en croit les journaux radiophoniques du matin, qu'il en est une qui se profile en Europe à grande vitesse. On parle désormais plus de l'épidémie de coronavirus que du débat sur la réforme des retraites à l'assemblée nationale. A suivre.
Quoiqu'il en soit, en dépit des sombres perspectives que l'on semble nous promettre, je continue de tenter de découvrir des formes cachées — seules la douleur ou l'incapacité physiques pourraient m'en empêcher —, je m'obstine à traquer l'insolite autant que la beauté partout où je peux les déceler parmi les choses de ce monde. Et même s'il m'est difficile d'être productif — le sommeil gagne le plus souvent sur ma volonté — je m'efforce de partager mes trouvailles, et de poursuivre ce silencieux entretien avec tout ce qui n’est pas moi, c'est à dire vous, mes quelques lecteurs et lectrices, présences virtuelles mais cependant bien vivantes en différents endroits de cette terre.
Pour les semaines et les mois à venir il est probable que je laisserai la parole à des auteurs qui expriment avec beaucoup plus d'élégance et de précision ce que je peux penser ou ressentir.
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mardi 25 février 2020

Quelques incipit



Voilà,
oui, il y a des livres que je me souviens avoir vraiment commencés, comme "L'Etranger" de Camus, "Le Voyage au bout de la Nuit", parce leurs premières phrases étaient des entrées en matière percutantes.  Je ne parle pas de "A la recherche du temps perdu" dont bien des gens qui ne l'ont pas lu en connaissent pourtant l'incipit. Par ce terme on désigne les premiers mots (ou paragraphes) d'une œuvre littéraire. L'incipit généralement, sert à définir le genre du texte et annonce le point de vue adopté par le narrateur ainsi que les choix stylistiques de l'auteur. 
J'en propose une liste qui s'avère bien sûr aucunement exhaustive et en appellera sûrement d'autres au gré de mes humeurs. 
Il y a parfois de beaux débuts qui ne font pas forcément de grands livres. Certains ouvrages pourraient même se réduire à la géniale promesse des premières lignes. Ceux que j'ai ici répertoriés se rappellent à moi, par l'effet qu'ils ont produit sur la suite de ma lecture. Je n'y ai aucun souci d'ordre ou de préférence, sauf pour ce qui concerne le premier — pour moi une sorte de pépite stylistique.

"Il n'y a pas de commencement. J'ai été engendré, chacun son tour, et depuis c'est l'appartenance.
J'ai tout essayé pour me soustraire, mais personne n'y est arrivé, on est tous des additionnés." 
Emile Ajar in "Pseudo"

 La première fois qu'Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide. Elle lui déplut, enfin. Il n'aima pas comment elle était habillée. Une étoffe qu'il n'aurait pas choisie. Il avait des idées sur les étoffes. Une étoffe qu'il avait vue sur plusieurs femmes. Cela lui fit mal augurer de celle-ci qui portait un nom de princesse d'Orient sans avoir l'air de se considérer dans l'obligation d'avoir du goût. Ses cheveux étaient ternes ce jour-là, mal tenus. Les cheveux coupés, ça demande des soins constants. Aurélien n'aurait pas pu dire si elle était blonde ou brune. Il l'avait mal regardée. Il lui en demeurait une impression vague, générale, d'ennui et d'irritation. Il se demanda même pourquoi. C'était disproportionné. Plutôt petite, pâle, je crois… Qu'elle se fût appelée Jeanne ou Marie, il n'y aurait pas repensé, après coup. Mais Bérénice. Drôle de superstition. Voilà bien ce qui l'irritait.
Aragon in "Aurélien"

A Miniville la ville du pays des jouets, chaque habitant est très actif. Il y a une maîtresse d'école, un garagiste, un gendarme, un policier...
Comme maintenant Oui-Oui a une jolie voiture jaune aux ailes rouges, il sera donc chauffeur de taxi. le problème, c'est qu'il n'est pas un as du volant. Il renverse les lampadaires, conduit en zigzagant, ses passagers ne sont pas toujours contents. Attention, Monsieur Flod le policier, l'a a l'oeil ! Heureusement que son ami le nain Potiron est là pour l'aider quand il a fait des bêtises. Et puis, si Oui-Oui abime sa belle voiture, il y aura toujours Monsieur Polichinelle le garagiste pour la réparer.

Enid Blyton "Oui-Oui chauffeur de Taxi"

"Elle s'appelle Teresa Ann Gravatt, elle a sept ans, et elle a dans sa chambre un miroir qui donne sur un autre univers.
Christopher Priest "Les extrêmes"

Je suis jeune et riche et cultivé ; et je suis malheureux, névrosé et seul. Je descends d’une des meilleures famille de la rive droite du lac de Zurich, qu’on appelle aussi la Rive dorée. J’ai eu une éducation bourgeoise et j’ai été sage toute ma vie. Ma famille est passablement dégénérée, c’est pourquoi j’ai sans doute une lourde hérédité et je suis abîmé par mon milieu. Naturellement j’ai aussi le cancer, ce qui va de soi si l’on en juge d’après ce que je viens de dire.
Fritz Zorn in "Mars"

Bien des années plus tard, face au peloton d’exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l’emmena faire connaissance avec la glace.
Gabriel Garcia Marquez  in "Cent ans de solitude"

"Ses amis l'appelaient Harry. Mais Harry n'enculait pas n'importe qui. Uniquement des femmes... Des femmes mariées 
Hubert Selby Jr in "Le Démon"

Ich sterbe. Qu'est ce que c'est ? Ce sont des mots allemands. Ils signifient je meurs. Mais d'où, mais pourquoi tout à coup ? Vous allez voir, prenez patience. Ils viennent de loin, il reviennent comme on dit (comme on dit "cela me revient") d'une ville d'eaux allemande. 
Nathalie Sarraute in "L'usage de la parole"   
 
Il avait demandé à sa femme ce qu'il y aurait à dîner, et elle avait répondu "du foie". Ce fut à cet instant précis qu'il la vit soudain morte, qu'il imagina sa vie sans elle. Et, après avoir surmonté le premier moment de honte, il caressa cette idée, il l'approfondit, il s'en servit pour se donner des forces. C'est ainsi que Frederick Benson allait devenir un assassin.
Walter Kempley in "L'Ordinateur des pompes funèbres".

Le voyage de Mercier et Camier je peux le raconter si je veux, car j'étais avec eux tout le temps.
Samuel Beckett in "Mercier et Camier"

Je suis un produit d'avant-guerre. Je suis né dans un ventre corseté, un ventre 1900. Mauvais début. 
Henri Calet in "La belle lurette"

Quand on observe des poissons à travers une couche d'eau qui interdit entre eux et nous tout contact, on les voit rester longtemps immobiles, sans raison, puis d'un frémissement de nageoires aller un peu plus loin pour n'y rien faire qu'attendre à nouveau
Georges Simenon in "L'écluse N°1" 

...Il me fut impossible de trouver la pièce correspondant au numéro qui figurait sur mon laisser-passer. J'arrivai d'abord au Service de Véristique, puis à celui de Désinformation. Un employé de la section des Pressions me conseilla de monter au huitième étage, mais là-bas personne ne daigna faire attention à moi.
Stanislas Lem in "Mémoires trouvés dans une baignoire"

On était en Novembre, mois de la pluie, des morts et des ciels sombres.
Serge Gorodish n'avait pas quitté son Steinway depuis huit jours. Il travaillait les inventions à deux et trois voix de J.-S. Bach car ces œuvres donnaient à son esprit, outre la joie musicale profonde, les structures propres à la naissance et au développement des grandes idées
Delacorta in "Rock" 

L'œil d'abord, glisserait sur la moquette grise d'un long corridor, haut et étroit. Les murs seraient des placards de bois clair, dont les ferrures de cuivre luiraient. Trois gravures représentant, l'une Thunderbird, vainqueur à Epsom, l'autre un navire à aube le Ville de Montereau, la troisième une locomotive de Stephenson, mèneraient à une tenture de cuir retenue par de gros anneaux de bois noir veiné, et qu'un simple geste suffirait à faire glisser. La moquette alors, laisserait place à un parquet presque jaune, que trois tapis aux couleurs éteintes recouvriraient partiellement.
Georges Perec in "Les choses"

La bêtise n'est pas mon fort. j'ai vu beaucoup d'individus ; j'ai visité quelques nations ; j'ai pris ma part d'entreprises diverses sans les aimer ; j'ai mangé presque tous les jours ; j'ai touché à des femmes.  Je revois maintenant quelques centaines de visages, deux ou trois grands spectacles, et peut-être la substance de vingt livres. Je n'ai pas retenu le meilleur ni le pire de ces choses : est resté ce qui l'a pu.
Paul Valéry in "Monsieur Teste"

La vie est faite comme ça. on peut passer beaucoup de temps sans qu'il vous arrive grand chose d'exceptionnel : une grosse angine attrapée en changeant une roue sous la pluie, une pénible discussion avec un banquier qui s'obstine à découvrir des découverts qu'il ne veut pas recouvrer, une immense peine parce que Barbara est partie avec un belge, et puis au moment où l'on s'y attend le moins, un homme vous propose calmement d'aller construire une pyramide en Egypte.
Noel Howard "Hollywood sur Nil"

A la différence de la plupart de ses semblables, Konrad Vost avait une personnalité clairement définie : par dessus tout il était précis dans ce qu'il faisait et exact dans ce qu'il disait. Mais Konrad Vost n'était qu'un homme d'âge moyen, sans distinction ni pouvoir d'aucune sorte, si bien que ces deux qualités fort voyantes de sa personnalité paraissaient aux autres d'autant plus odieuses
John Hawkes in "L'Homme aux louves"

Daimler est assis sur un chaise au milieu d'une pièce. Un rayon de soleil se promène sur le parquet. Le silence est complet. Daimler ressemble à un détective privé dont les affaires ne marcheraient pas très fort.
Frédéric Berthet in "Daimler s'en va" 

Si vous marchez dehors à cette heure en ce lieu, c'est que vous désirez quelque chose que vous n'avez pas, et cette chose, moi, je peux vous la fournir ; car si je suis à cette place depuis plus longtemps que vous et pour plus longtemps que vous, et que même cette heure qui est celle des rapports sauvages entre les hommes et les animaux ne m'en chasse pas, c'est que j'ai ce qu'il faut pour satisfaire le désir qui passe devant moi, et c'est comme un poids dont il faut que je me débarrasse sur quiconque, homme ou animal, qui passe devant moi 
Bernard-Marie Koltès in "Dans la solitude des champs de coton"

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dimanche 23 février 2020

Des sensations qui sont comme des sommeils



Voilà,
Il est des sensations qui sont des sommeils, qui occupent comme une brume toute l'étendue de notre esprit, qui ne nous laissent  ni penser ni agir, et ne nous permettent pas d'exister clairement. Comme si l'on n'avait pas dormi de la nuit, il survit en nous quelque chose du rêve, et une torpeur de soleil diurne vient réchauffer la surface stagnante des sens. C'est une saoulerie de n'être rien, et la volonté est un seau renversé au passage dans la cour, d'un geste indolent du pied.
On regarde, mais on ne voit pas. La longue rue animée d'animaux humains, est une sorte d'enseigne couchée à l'horizontale, où les lettres seraient mobiles et n'auraient aucun sens. Les maisons sont simplement des maisons. On a perdu la possibilité de donner un sens à ce que l'on voit, mais on voit parfaitement ce qui est, cela oui. Fernando Pessoa in "Le Livre de l'Intranquillité"
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jeudi 20 février 2020

Présent trompeur


Voilà,
le souvenir est paraît-il selon Maurice Blanchot, la liberté du passé. Je ne comprends pas trop cette phrase mais la formule est jolie. Faut-il entendre par là que, du passé, le souvenir s'en arrange ? Sans doute puisque nous ne l'apercevons que toujours recomposé et depuis un présent illusoire souvent trompeur, non seulement peuplé d'ombres et de reflets, encombré de pacotilles, mais aussi hanté par le mensonge et la duplicité de ceux qui s'efforcent de nous faire prendre des vessies pour des lanternes afin que la société marchande continue de prospérer en nous intoxiquant au poison des rêves factices et des satisfactions éphémères
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mardi 18 février 2020

J'aime / Je n'aime pas (10)


Voilà,
j'aime repenser à ces vacances en Calabre passées avec ma fille l'été 2012, nous y avons fait une des plus belles photos de nous deux
Je n'aime pas le timbre et surtout les intonations de la voix de Caroline Broué qui présente la matinale de France Culture le samedi
J'aime cet adage de Mark Twain "quand les riches volent les pauvres on appelle ça les affaires, quand les pauvres se défendent on appelle ça la violence"
Je n'aime pas ces passages d'une saison à l'autre où l'on ne sait comment se vêtir
J'aime avoir des inspirations soudaines qui me déconcertent favorablement lorsque j'en vois le résultat
Je n'aime pas les gens qui parlent fort dans les musées
 J'aime la subtilité de la palette d'Edouard Vuillard
Je n'aime pas constater la vitesse à laquelle les cols de chemises se salissent
J'aime dormir dans des parures de lit très colorées avec du rouge du jaune de l'orange du vert-pomme
Je n'aime pas mais absolument pas du tout les bouchons de sécurité sur lesquels il faut appuyer avant de les dévisser
J'aime l'émission "En pistes" d'Émilie Munera et Rodolphe Bruneau-Boulmier pour leur bonne humeur leur joyeuse complicité et leur érudition
Je n'aime pas cette sensation d'étourdissement et de fatigue qui de plus en plus souvent est mon lot quotidien
J'aime les saucisses de Nüremberg cuisinées avec des pommes
Je n'aime pas devoir vider ma boîte mail de toutes les conneries dont je me suis pourtant désabonné des dizaine de fois
J'aime les pulls en cachemire
Je n'aime pas, mais vraiment pas du tout les misogynes et je les tiens pour des gros connards
J'aime les peintures d'Albert Gleizes  et de Jean Metzinger qui mériteraient chacun une rétrospective
Je n'aime pas les gens qui ont aucun humour
j'aime entendre le chant du merle dans une ville déserte peu avant que le jour ne se lève
je n'aime pas l'expression "mieux-disant", et ceux qui l'utilisent sont en général des gros cons
j'aime le son du vibraphone et les musiciens comme Gary Burton
je n'aime pas que mon interlocutrice au téléphone me réponde sans cesse "pas de soucis pas de soucis" alors que si précisément j'appelle son service c'est que j'ai des soucis
j'aime quand les jours rallongent et que le printemps s’annonce
je n'aime pas quand ça me gratte en un certain endroit inaccessible au milieu du dos
j'aime les jours où la solitude ne me pèse pas et que je ne vois pas le temps passer
je n'aime pas me couper les ongles des pieds je trouve ça très laborieux
j'aime de plus en plus les toiles de Picasso des années soixante et soixante dix, c'est de l'art brut
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lundi 17 février 2020

Le Bal des Tartuffes

Comment l'information suce le pouvoir
 
Voilà,
le mec un jour il s'est branlé devant son smartphone a envoyé la video avec quelques sextos à sa copine — une liaison passagère — laquelle copine quelques mois plus tard fraie avec un artiste russe d'avant garde, connu pour ses performances à caractère politique qui l'ont amené à fuir  la Russie parce qu'il était menacé par la police de Poutine. A l'époque l'artiste en question était présenté comme un résistant. Le branleur lui est un politicien, jeune, ambitieux et très con. Il postule à la mairie de Paris avec un programme débile : mettre la gare de l'est en banlieue, raser celle qui est à Paris pour la remplacer par un vaste espace vert, une sorte de central park. Il propose aussi la création de managers de rue qui contrôleraient un quartier. Au Maroc, on appelle ça des “moqaddem”. Il y en a un par quartier. Officiellement ils sont là pour améliorer la vie des habitants mais dans les faits ils sont surtout payés à épier leurs moindres faits et gestes à des fins de surveillance fit remarquer quelqu'un sur un tweet. Dans un pays qui a fait de la délation un sport national entre 1940 et 1944 voilà une idée qu'elle est bonne. Rajoutons que ce mec qui a commencé sa carrière politique dans l'entourage de Dominique Strauss-Kahn, fait  dans ses déclarations politiques et ses promotions médiatique, l'apologie des valeurs familiales. N'oublions pas comme le note Julien Salingue que "ce candidat est le représentant d’un pouvoir qui insulte chaque jour les salariéEs et les chômeurs, qui détruit méticuleusement les services publics, qui brise des vies par ses contre-réformes ultra-libérales, qui veut nous faire travailler jusqu’à la mort, qui blesse, qui mutile, qui soutient les flics tueurs, qui persiste dans une politique climaticide, qui participe à des sales guerres, qui vend des armes à des dictatures… la liste n’est pas exhaustive". Bref, que ce politicien complètement con qui représentait le parti présidentiel jette immédiatement l'éponge, lorsque sa branlette est divulguée sur un site créé par l'artiste russe Piotr Pavlenski  puis sur les réseaux sociaux, ne me rend pas particulièrement triste. Au fait qui propage la rumeur ? Ah là on rigole encore. Un ancien député du parti présidentiel LREM qui présente de sérieux symptômes d'instabilité psychique, et Laurent Alexandre ardent défenseur de l'intelligence artificielle, mais parfait échantillon de connerie bio et tout ce qu'il y a de plus naturelle, pseudo-savant qui commet tout de même quelques conférences dans les écoles de l'Elite où il raconte n'importe quoi, prônant par exemple une sorte d'eugénisme sélectif sur les gilets jaunes. 

Bon l'objet de mon agacement n'est pas là. Griveaux peut bien montrer sa bite. Il a peut-être des excuses. Des traumatismes liés aux chansons qui ont bercé son enfance et qu'on entendait à la radio. Non ce qui me daille vraiment, c'est l'indignation de certains de ces prétendus journalistes.  D'ailleurs je devrais régler mon réveil radio sur France-Musique, et non sur le radiojournal de France-inter ou France culture. Car ce matin toute la petite caste des jacasseurs officiels s'alarmait de la menace sur la démocratie que constituait ce non-événement. Ils se sentaient tous concernés. Ça pouvait arriver à n'importe qui d'entre eux. On avait soudain l'impression que toutes les bites les chattes et les culs de la nomenklatura politico-médiatique risquaient de se retrouver en ligne. On s'en fout, "retournez a vos partouzes" comme le dit Hamm dans "Fin de partie" de Beckett.
Faites plutôt votre métier
Au passage je relaie cet excellent article paru dans un blog.
Ce qui me gonfle c'est que lorsque la police commet les exactions que l'on sait en France, pénètre dans les écoles, les églises, les hôpitaux pour pourchasser des manifestants pacifiques, quand le droit de manifester est bafoué, quand on utilise abusivement des grenades et des flashballs pendant des rassemblements autorisés avec la ferme intention de blesser (Amnesty International parle de "Violences policières choquantes", faisant état de 24 éborgnés, de 5 mains arrachées, 2500 manifestants blessés), quand les interpellations et garde à vue préventives se multiplient lors de certaines manifestations, quand même l'ONU et le parlement européen condamnent le recours disproportionné de la force contre les manifestants en France, quand un politicien notoirement corrompu est libéré de prison pour raisons de santé, alors que tant de prisonniers malades  n'y sont même pas soignés, que les droits de l'Homme y sont bafoués, eh bien là on ne les entend pas s'indigner ces journalistes.  Non ce n'est pas assez sensationnel. Parce que pour eux la démocratie c'est surtout ce qui doit préserver les privilèges dont ils disposent et ne pas menacer leur droit de dire n'importe quoi et de taire l'essentiel.
Allez, du calme. On attend avec impatience les sextapes de Léa Salamé et les dickpics de Nicolas Demorand nos sémillants présentateurs de la matinale de France Inter souvent si méprisant à l'égard des faibles et tellement serviles avec les puissants, comme dans cet interview, bien plus obscène que l'image qui précède ce billet.


dimanche 16 février 2020

Bruno Ganz

 
Voilà,
je repense à Bruno Ganz, qui a quitté ce monde il y a un an jour pour jour, et dont il m'est arrivé de parler quelquefois, parce qu'il a joué dans des films qui m'ont marqué, comme "L'Éternité et un jour" de Théo Angelopoulos ou "Messer im Kopf" de Reinhard Hauff, où son interprétation se révèle extraordinaire, ou encore "Dans la ville blanche" d’Alain Tanner, qui est une sorte d’ode cinématographique à la ville de Lisbonne, et aussi ce film très dérangeant de Volker Schlöndorff  "Le Faussaire". Son visage a été présent pendant des années dans ma vie quotidienne, puisque, dans le premier appartement que j'ai partagé avec Agnès, sur un des murs du salon se trouvait l'affiche de "l'Ami américain" de Wim Wenders, dessinée par Guy Pellaert.



J'ai toujours été sensible à son grain de voix, à cette façon de jouer sans concession au spectaculaire au tape-à-l'œil, au m'as-tu-vu. Dans le film de Terrence Malick, "Une vie cachée", il fait une brève apparition — peut-être même est-ce sa dernière au cinéma — , mais comme à son habitude il est très bien, très touchant et donne au personnage qu'il interprète, un juge nazi un peu las et désabusé, une humanité qui pourrait déranger si elle ne mettait en évidence la complexité et la somme de contradictions que chaque individu porte en lui.

vendredi 14 février 2020

Saint Valentin, donc


Voilà,
vu dans le quartier du Marais en août 2017.
puisque c'est aujourd'hui la Saint Valentin
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jeudi 13 février 2020

C'est le monde qui nous quitte



Voilà 
une chose dont on ne prend conscience qu'avec les années accumulées et qu'on ne peut réaliser tant qu'on ne l'a pas ressenti, éprouvé physiquement — et c'est en cela que l'expérience est intransmissible et que l'écrire est par conséquent absurde mais tant pis je persiste — : avant de quitter le monde c''est le monde qui nous quitte. Le monde où l'on s'est construit, dans lequel nous avons acquis nos réflexes, trouvé nos repères, élaboré notre pensée. Ceux qui constituaient notre environnement sensible et intellectuel meurent, les chanteurs de variétés, les philosophes, les présentateurs de télévision, les acteurs, des auteurs de bandes dessinées... Les magasins disparaissent, les architectures se transforment, des quartiers entiers sont rebâtis. Les lois, les mœurs les coutumes aussi se modifient. Et peu à peu on se trouve sur une terre étrangère qui paraît de plus en plus hostile à mesure que nos facultés physiques et cognitives décroissent. Les formes que prenaient nos rêves se dissipent. On comprend doucement que notre temps est passé, que désormais le monde se fera sans nous. Les heures passent sans illusions et les souvenirs aussi, en bribes, comme de tièdes nuages dans le ciel incertain de notre mémoire. Il nous faut apprendre à cheminer en paix parmi les choses et consentir à la fatalité de n'être que ce qu'on est sans pour autant renoncer à l'espérance qu'un violent bonheur puisse une fois encore nous étreindre. Cependant parmi les ombres et les reflets où se hâte tout un peuple de spectres furtifs, on cherche sa demeure, comme on croyait la trouver autrefois, à l'abri d'une cabane de branchages et de fougères entre les  pages colorées des illustrés de l'enfance. (Linked with weekend reflection)

mardi 11 février 2020

Un noyau de spiritualité


Voilà
"Oui, il y a, là-haut, pour qui sait écouter et sentir au cœur de la matérialité la plus brutale, au cœur de ce qui paraît le plus éloigné de ce que nous sommes convenus d'appeler le beau, un noyau de spiritualité d'autant plus déchirante qu'elle est là fois familière et hors d'atteinte. L'esprit du lieu se tient là : la présence de l'au-delà dans la pesanteur même des choses. La volonté éperdue de trouver sa place, en se sachant de nulle part. Une sorte de vaste corps englobant les maisons, les êtres, les prés, les fantômes. Et pas seulement parler, mais donner à ces paroles la substance qui demeure, qui porte ton nom et l'emporte sans limites" Pierre Jourde
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dimanche 9 février 2020

Câlins


Voilà,
j'ai lu quelque part que ce bienfaiteur rapprochement qu'on désigne communément par le terme câlin agit sur notre bien-être physique et notre équilibre affectif. Platonique, amoureux ou confraternel, avec un proche, un inconnu, ou un animal, le câlin aurait de bénéfiques vertus. D'après le site journee-mondiale.com, sept minutes de câlin par jour permettent de se sentir heureux. Une psychothérapeute américaine Virginia Satir suggère que : « nous avons besoin de quatre câlins par jour pour survivre, de huit pour fonctionner, de douze pour croître. » Si cette affirmation s’avère exacte je suis donc en train de mourir à petit feu.
Quoiqu'il en soit cette peinture murale, aperçue la semaine dernière rue d'Aboukir mettant en scène Tintin et le capitaine Haddock m'a bien réjoui, même si les silhouettes qui en donnent l'échelle se promènent solitaires. Au pied de ce mur, sur la gauche il y avait aussi ceci
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jeudi 6 février 2020

Sur la piste de l'arbre


Voilà,
"Sur la piste de l'arbre, on rencontre l'homme. Ils se tiennent par la main. L'un prépare l'arrivée de l'autre. Il lui fabrique de l'oxygène, de l'ombre, de la beauté, de l'émotion, du calme et du bois pour faire le feu. De quoi d'autre peut on avoir besoin.
On a toujours intérêt au moment de partir à se renseigner sur les arbres que l'on risque de rencontrer. Ils sont là depuis plus longtemps, ils en savent plus. Ils connaissent le pays, ils peuvent en parler. un arbre ne se trompe jamais de séjour. Il vit là où la température, le vent, le sol, l'ensoleillement, l'humidité lui conviennent. Il ne s'égare jamais ou bien il en meurt." (Alain Hervé in "La proximité folle du paradis")
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mercredi 5 février 2020

Remise de peine


Voilà,
longtemps il marche en solitaire longeant à travers une sombre banlieue des rues désertes et peu éclairées. Enfin parvenu au centre-ville généreusement illuminé, Léon Durif pénètre dans une boutique aux lumières tamisées où derrière des parois constituées d’aquariums, de jeunes employées font des avances aux clients qui entrent. On ne comprend pas ce qu'elles disent ; on ne voit que leurs gestes plus ou moins équivoques et leurs attitudes parfois subrepticement obscènes. Là, par hasard, il croise avec plaisir un vieux camarade de promotion, un diplomate revenu depuis peu de Moscou. Un vieil ami d'enfance dont le regard est dissimulé derrière d'épaisses lunettes noires en raison d'une hyperphotosensibilité, l'accompagne. Après avoir traîné un temps dans cette boutique ils décident de se rendre ensemble dans un autre magasin tenu par un ancien coiffeur qui désormais vend des bijoux lumineux. L'ami d'enfance du diplomate s'inquiète car il doit bientôt partir en voyage et il s'en veut de n'avoir toujours pas trouvé de cadeaux pour les gens qui l'accueilleront. Rien ne le satisfait et il désespère de trouver quelque chose à son goût. Plus tard, tous trois s'engagent dans une vaste galerie couverte où sont exposées des sculptures monumentales. Approchant de cet empilement de roues de bicyclettes, œuvre du plasticien chinois Ai WeiWei, l'ami d'enfance croit reconnaître, assise sur une antique chaise roulante, une jeune femme, qui s'appelle Sixtine, et à qui, nous informe-t-il, on vient d'accorder une remise de peine, en raison de son état physique. Elle a passé plusieurs mois en prison pour avoir, dit-il "commis quelques petits meurtres et de menus larcins".
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lundi 3 février 2020

Toutes ces choses qui nous survivent.


Voilà,
c’est la nuit tu entends la radio qui diffuse une sicilienne de Bach interprétée par Jacques Loussier. Autour de ta bière ouverte, des gens pleurent dont quelques hypocrites, qui autrefois te firent souffrir, et cela te déplaît. Mais aucun mot ne sort de ta bouche pas même un râle, juste une légère nuée de cendres à peine visible, raison pour laquelle sans doute, nul ne s'en étonne. Tu es celui qui voit et celui qui repose. Tu te sens à l'étroit et intérieurement furieux de ne pouvoir bouger, agacé par ce fourmillement chatouilleur qui reste cependant à la limite du supportable. Mais lorsqu'un homme glabre que tu as toujours connu moustachu, s'attarde longuement, l'air interrogateur, au dessus de ta dépouille, puis s'exclame "mais ce n'est pas lui", le vacarme du camion poubelle et les éclats de voix des éboueurs dans la rue, sans pour autant te délivrer de la poisseuse sensation de l'avoir échappé belle, t'extraient de ta torpeur. Et tu te retrouves au bord du jour, hébété comme un boxeur sauvé par le gong, mais qui ne se sent plus la force de continuer le combat. Espérant toutefois le miracle d'en réchapper, et sans pour autant savoir la forme qu'il pourrait néanmoins prendre, tu redoutes le sort tragiquement banal qui selon les statistiques paraît devoir inévitablement te frapper, comme il accable depuis peu tant d'amis autour de toi. Et tu songes alors à toutes ces choses qui nous survivent.
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dimanche 2 février 2020

Étranger à ce monde

 
Voilà,
ce n'est pas nouveau je l'ai déjà souvent écrit, je me sens de plus en plus étranger à ce monde. Ou plutôt celui-ci me semble-t-il de plus en plus difficile à saisir dans sa complexité. Il me paraît souvent absurde. Ces adultes qui circulent en trottinette dans le quartier d'affaires, ces gens dans le métro l'œil rivé sur leur smartphone jouant à des jeux ou bien coupés de leur environnement qui écoutent de la musique dans leur casque audio dont certains sont si gros que cela les fait ressembler à des personnages de dessins animés, les corps usés, épuisés ravagés qui gisent parfois dans la rue comme des cadavres cette épidémie de misère qui se répand depuis des années et dont nos dirigeants n'ont aucune conscience car ils ne marchent pas dans les rues, ne prennent pas le métro. Dans les transports je regarde les visages et me demande "comment font-ils pour tenir dans ce monde, moi je n'y arrive plus". Je trouve la plupart du temps l'environnement dans lequel j'évolue d'une laideur pénible à supporter, bien conscient cependant de vivre dans une région relativement privilégiée et les quelques trompe-l'œil ou décoration murales ne suffisent pas à atténuer ce sentiment que la décrépitude est en train de gagner. Peut-être est il temps de laver mon regard à des paysages moins urbains, de me retirer dans quelques campagne et de ne plus photographier que paysages, nature, animaux arbres fleurs sous-bois, comme le fait, si loin d'ici, Bill dont les photos de plus en plus dépouillées de toute trace de présence humaine suggèrent à mes yeux, la nostalgie d'un eden d'avant la présence humaine...
Allez, en ce jour palindrome 02/02/2020 (ce qui ne se représentera pas de sitôt avec simplement deux chiffres) Bach, pour consolation, C'est ce que l'humanité a produit de plus subtil et délicat. Comme écrivit Cioran, s'il en est un à qui Dieu doit tout, c'est bien Bach. (Linked with monday murals)



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