mercredi 31 mars 2021

La retraite de Willem


Voilà,
ce matin je suis sorti un peu tôt parce que je voulais acheter les numéro de Libération consacré au génial Willem, le dessinateur du journal, depuis quarante ans que j'ai découvert dans mon adolescence lorsqu'il dessinait aussi pour Charlie Hebdo. En 2015 il a d'ailleurs échappé au massacre perpétré par des islamistes parce qu'il ne se rendait jamais aux conférence de rédaction, préférant envoyer ses dessins. Le même jour que son collègue Plantu, embauché par le journal “Le Monde” dès 1972, ce hollandais de 80 ans exilé en France et qui a toujours gardé son accent natal peut bien prendre un peu de repos, et s'affranchir du stress qu’engendre la réalisation d’un dessin quotidien. Il m'est arrivé de le croiser parfois le samedi matin attablé à la brasserie "La Liberté" en compagnie d'Albert Delpy un ami commun, lorsque nous nous y retrouvions après le marché. 
Avec ce soleil matinal et cette douce température sur Paris, j'aurais bien aimé m'asseoir à une terrasse, commander un café et une tartine beurrée et feuilleter mon journal. Au lieu de ça je suis rentré direct à la maison. Sur un mur j'ai vu ce nouveau pochoir. Comme un signe des temps que nous vivons. Linked with Signs2
 

dimanche 28 mars 2021

L'État des lieux

 

Voilà,
il y a de la contestation dans l'air. En dépit de l'épidémie de covid, des gens se rassemblent ou manifestent. La direction du théâtre de l'Odéon tolère à contrecœur une occupation partielle et pacifique du bâtiment depuis bientôt un mois. Le mouvement a fait tâche d'huile et désormais une centaine d'autres théâtres en France ont été investis. Aux revendications corporatistes, se mêlent d'autres plus générales, en particulier le retrait de la réforme de l'assurance chômage, particulièrement pénalisantes pour les travailleurs précaires aux emplois discontinus. Comme c'est le 150ème anniversaire de  la Commune de Paris, dont il n’y a bien évidemment pas de commémoration officielle, certains, souvent ignorant de l'Histoire, mais démangés par le prurit de l'insurrection s'exaltent. De même qu'Hamlet était fou par vent de Nord-Nord Ouest, il en est qui sentent monter en eux la fièvre révolutionnaire à partir de 18° centigrades sous abri. Mais qui vient là sur le parvis ? la plupart du temps un attroupement clairsemé de quelques intellectuels petits-bourgeois bohèmes, peu de jeunes, peu de prolétaires — je sais c'est un mot hors d'usage, mais qui désigne pourtant une réalité bien réelle et grandissante —,  en tout cas, peu de ceux qui sont concernés par ce terrible projet de loi qui passera par décret à l'assemblée nationale si les syndicats et le patronat ne trouvent pas d'accord.  Ceux qui ont un CDI et ne se sentent pas menacés par le chômage et ne s'intéressent pas à la question, ceux qui sont précarisés et à la merci d'un licenciement ne mesurent pas encore l'ampleur du danger. Pourtant des gens travaillent à rendre information claire. Quand aux vrais pauvres, ils sont trop occupés à survivre — il suffit de constater le nombre d'Uberistes opérant en Vélib — et généralement peu politisés.
Pendant ce temps là, non loin, au jardin du Luxembourg, d'autres, sans trop respecter les distanciations sociales et le port du masque, profitent du grand air et du soleil qui perce derrière les nuage d'un printemps encore timide. On ne pense hélas plus guère aux soignants qui, au risque de leur santé triment dans les hôpitaux. Il y un an on les applaudissait chaque soir à vingt heures depuis nos fenêtres. Mais la série "Covid" à moins de succès que "game of thrones". À la deuxième saison on se lasse. Il faut bien admettre que nous sommes une nation de crétins. Chaque heure, chiffres à l'appui, sont assénées les mêmes nouvelles aussi alarmistes qu'à l'heure précédente ; des professionnels de la santé et de l'éducation nationale expliquent leur détresse, et pourtant la plupart des gens continuent à demeurer incrédules.
 
 

Donc, en raison de la saturation des hôpitaux et de la recrudescence des cas dans les écoles on évoque de plus en plus un reconfinement prochain, semblable à celui de l'année dernière. Je raconte cela pour mes lecteurs étrangers, mais ici le virus continue de se propager et l'on ne vaccine pas encore assez. La politique du gouvernement, ou plutôt de notre président qui a tendance à décider tout seul, est assez incohérente. Sans doute a-t-il misé sur une vaccination intensive, mais il n'y a pas assez de vaccins. Et comme fin janvier il n'a pas voulu écouter les scientifiques qu'il trouvait trop alarmistes (alors qu'ils anticipaient juste ce qui est précisément en train de se produire) nous voici, en ce qui concerne la gestion des malades dans une situation plus critique qu'en Mars dernier. Celui qui fanfaronnait alors, "nous sommes en guerre avec le virus, et nous allons le vaincre", s'est révélé un piètre stratège. On reconnaît là un autre tropisme bien français : une certain goût pour la forfanterie et une grande aptitude à la débâcle.
 

Fin Juillet, de gros ours en peluche étaient disposés pour maintenir la distanciation sociale si l'on souhaitait boire un verre en terrasse devant le théâtre. Les optimistes espéraient des jours meilleurs. On se pensait être sortis de l'auberge comme on dit. Force est de constater qu'on est loin du compte. Une certaine morosité, de la résignation et beaucoup de rancœur infusent parmi certaines franges de la population. Pour la plupart des gens l'avenir s'assombrit. Les ours eux s'en fichent.

samedi 27 mars 2021

J'aime / je n'aime pas (13)

 
Voilà,
 j'aime la nouvelle façade de la Samaritaine rue de Rivoli
je n'aime pas l'expression "comparaison n'est pas raison" souvent utilisée en dernier recours par des gens qui en général font peu d'efforts de pensée 
j'aime dire Ajar, pour les livres d'Ajar et Gary pour ceux de Gary car j'ai beaucoup de respect pour le dédoublement de personnalité
je n'aime pas que les journalistes utilisent cette formule "machinchose dans son fief"
j'aime bien traîner sous la couette les matins d'hiver
je n'aime pas cette nouvelle manie d'utiliser l'expression "au final" plutôt que l'adverbe "finalement"
j'aime essayer une nouvelle recette
je n'aime pas être assigné à résidence à cause de connards incompétents, prétentieux et hypocrites
j'aime ces tournures délicieuses et ces inventions langagières de l'Afrique francophone qui redonnent à notre langue un peu de saveur
je n'aime pas l’expression “cela fait suite” version appauvrie de “suite à, conséquence de “
j'aime découvrir des quartiers que je ne connais pas dans cette ville où j'habite pourtant depuis si longtemps
je n'aime pas que le commerçant arabe du marché m'appelle chef ; d'abord je ne suis pas son chef et de plus c'était le grade mon père en Algérie
j'aime cependant beaucoup son huile d'olive
je n'aime pas la mollesse et l'absence de rigueur intellectuelle d'une certaine personne
j'aime avoir récemment découvert l'expression del à l'an pèbre signifiant en provençal "il y a longtemps
je n'aime pas m'apercevoir que j'ai manqué de discernement
j'aime la couleur verte que prend l'eau de cuisson des artichauts
je n'aime pas être sous l'emprise de crises de boulimie
j'aime réécouter l'album "Lodger" de David Bowie, et surtout le morceau Red Sails
je n'aime pas lorsque les noms m'échappent. Il y a peu je n'arrivais pas à retrouver celui de la ville d'Erlangen, où je suis allé jouer en 1986
j'aime regarder au printemps le matin dans mon lit sur ma tablette les "highlights" des matches du championnat de rugby Aotearoa
je n'aime pas les vieux bourgeois dans les lieux publics qui se plaignent que trop de gens sont "assistés", ça me donne envie de les cogner
j'aime ranger les pulls et les polaire sous vide quand vient le printemps
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mercredi 24 mars 2021

C'est arrivé comment ?


Voilà,
nous nous pensions modernes car affranchis des dogmes anciens, et nous trouvions décalé autant qu'insolent notre goût du paradoxe. Jeunes et revenus de tout, nous affichions un certain cynisme. Nos aînés avaient échoué à rendre le monde meilleur. Nous n'aurions pas leur naïveté. Nous étions déterminés à prendre notre part, en considérant la réalité d'un œil froid. Il serait dit que nous ne nous laisserions pas berner quitte à renoncer à nos idéaux. Nous trouvions bon d'exalter quelques valeurs anciennes par goût de la provocation. Il nous fallait des projets de l'action et des amphétamines. Nous exaltions le mélange, la diversité, le métissage. Ah oui, la nouveauté se devait d'être intéressante. 
Les années passent. Un jour on s'aperçoit, comme jamais auparavant dans une glace. Et on se demande soudain comment c'est arrivé. On n'a rien vu venir, pourtant c'est là. La paresse, peut-être. A moins que ce ne fut la peur de s'engager, de choisir, ou plus simplement la crainte de faillir. Au fond, on n'était pas aussi insolent qu'on avait voulu le laisser paraître. Et l'on s'est laissé happer sournoisement, imperceptiblement. On n'est pas devenu celui qu'on avait imaginé. On se reconnaît quand même, vaguement honteux de cette version avariée de la jeunesse et de ce sourire confinant à  la grimace qui trahit une secrète amertume. Il y a quelque chose qui cloche. Dans ce morne reflet on cherche parmi les rides, celles qui témoignent de notre reddition.
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mardi 23 mars 2021

Les Voiliers du grand Bassin

 

Voilà,
ils ne se démodent pas les petits voiliers du grand bassin du jardin du Luxembourg. Ils exercent toujours le même attrait pour les enfants et leurs parents. Ne serait-ce la présence au loin de la hideuse Tour Montparnasse qui, gâche la perspective depuis bientôt cinquante ans, — je l'ai vue peu à peu s'ériger — cette photo pourrait être d'un autre siècle. Je l'ai prise il y a une quinzaine de jours, lors de ma première sortie post-Covid. Il faisait frais en dépit du soleil. Mes pas n'étaient pas très assurés. J'éprouvais un besoin aussi absurde qu'illusoire, de permanence et de pérennité et j'ai eu envie de cette image paisible que j'ai pourtant déjà prise. Je me rétablis peu à peu, et plutôt bien même s'il me semble parfois que j'ai encore le souffle court. Mon seul souci est d'avoir contracté une maladie sur laquelle on n'a encore aucun recul. Mais il semblerait que je ne sois pas le seul n'est ce pas ? A part ça, j'ai découvert ce matin le trio pour piano en la majeur de Paul Pabst ce qui non seulement  m'a fait plaisir, mais a aussi enchanté ma journée car je l'ai réécouté plusieurs fois. 
 

dimanche 21 mars 2021

A la place d'une librairie disparue.

 

Voilà, 
située boulevard Saint-Michel, la nouvelle création éphémère du duo de street artists espagnols  PichiAvo a été réalisée pour dissimuler  la façade de l’ancienne librairie Boulinier institution du quartier latin  depuis 1938, qui a fermé en Juin dernier, comme ce sera aussi le cas pour la librairie Gibert Jeune en bas de ce même boulevard.
Cette œuvre, de 23 mètres de long sur 7 de haut  constitue paraît-il un hommage au Quartier Latin situé près de la Seine, et à ses origines anciennes. Elle met en scène Poséidon – le dieu de la mer et des eaux – aux côtés d'une nymphe marine.


J'ai dans ma jeunesse, et surtout au cours de mon adolescence, beaucoup hanté Boulinier où j'ai constitué à bas prix, une bonne partie de ma bibliothèque
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vendredi 19 mars 2021

S'enfoncer


 
Voilà,
il faut s'enfoncer dans ce mois de mars froid et sans attrait avec les séquelles d'une maladie qui ne se laisse pas oublier et le cortège des morts plus ou moins proches qui ne cesse de grossir, parce que c'est comme ça, c'est une loi de la nature, désormais je suis bien plus souvent convié aux enterrements (même s'il est impossible de s'y rendre) qu'aux mariages. Il me faut donc faire avec les gestes encore peu assurés, la fatigue, les invitations SMS à la con envoyés par l'assurance maladie "participez à une visioconférence Digit'alz" quand Alzheimer touche les jeunes. Quoi ! Alzheimer était pédophile et on ne m'a rien dit. Ou alors j'ai peut-être oublié... Digit'alz. On paye vraiment des gens pour écrire de telles conneries ? 
Faire avec le peu d'enthousiasme et quoi qu'on en veuille, le peu de désir que suscite le monde. Il est loin le plaisir de traîner dans un musée pour laisser divaguer la pensée au contact du génie des autres. Ou celui de s'oublier dans un cinéma se laisser transporter dans le rêve et les paysages d'un(e) autre... Se faire une toile, profiter de de la soirée, du printemps naissant. 
Apparemment ce n'est pas pour tout de suite. 
Il y a un mois et demi, début février, les scientifiques incitaient à un confinement dur en raison du variant anglais au taux de propagation ultrarapide (j'en sais quelque chose). Les courbes étaient prévisibles, on pouvait faire des projections. Le durcissement était nécessaire, inéluctable. Il eût été judicieux de profiter de l'hiver pour reconfiner. Ce d'ailleurs à quoi tout le monde s'attendait plus ou moins.
Notre président, cela n’échappe désormais a personne est sous l'emprise d'un hubris démesuré. Ce grand phare de la pensée néo-libérale, chantre de la start-up nation, mais dirigeant d'une puissance nucléaire incapable de créer un vaccin pas plus que d’en produire, avait une autre idée sur la question. Agacé, il se serait alors emporté contre ceux qui étaient autrefois ses conseillers. "J’en ai marre de ces scientifiques qui ne répondent à mes interrogations sur les variants que par un seul scénario : celui du reconfinement," avait-t-il lancé au cours d'un récent Conseil de défense sanitaire. Il trouvait que les scientifiques ça commençait à bien faire. Désireux de reprendre la main, son choix, bien que considéré par beaucoup de commentateurs comme un pari périlleux, — notons au passage que ce sont les joueurs qui font des paris, pas les stratèges — fut cependant très vite présenté par la propagande officielle comme "une victoire du politique sur le scientifique". C'est intéressant : face à un accident industriel on peut d'ores et déjà imaginer que la réponse politique, serait une fois de plus mensonge et dissimulation, comme il y a un an d'ailleurs, lorsque nous ne disposions ni de masques, ni de tests.  La réponse politique était "cela ne sert à rien".
Mais revenons à  ce qui se disait il y a à peine trois semaines : "Un jour, il pourra briguer l’agrégation d’immunologie », s’émerveillait le président de l’Assemblée Nationale Richard Ferrand. Deux semaines après un article très commenté de France-Inter, c’est « le Parisien » qui, en amont du conseil de défense sanitaire de ce mercredi 24 février, relaie les louanges de la macronie sur l’étonnante expertise scientifique accumulée par le chef de l’Etat ces derniers mois. "Il va finir épidémiologiste", commentait déjà un ministre auprès de France-Inter début février, vantant sa décision de ne pas reconfiner le pays malgré la pression des experts sanitaires, et bien sûr sans consulter les institutions républicaines de la représentation citoyenne (Assemblée nationale, Sénat...). "Macron s’est tellement intéressé au Covid qu’il peut challenger les scientifiques", renchérissait un conseiller élyséen auprès de la radio publique. À se demander si la France des années 2020 ne ressemble pas à la Roumanie des années quatre-vingts. Le culte de la personnalité c'est bien mais il faudra dire un jour combien de morts sont directement liées aux caprices de notre autocrate en herbe, et à l'arbitraire de ses décisions. Pourtant selon les instituts de sondages —tous propriétés d'oligarques qui ont soutenu Macron, il est vrai —, notre président recueillerait la confiance de 40% des français. Sommes nous vraiment un peuple de veaux, ou veut on nous en convaincre ?
Seulement aujourd'hui, rien n'apaise la pression subie par de nombreux centres hospitaliers. Les services de réanimation des hôpitaux sont aussi saturés qu'en Novembre dernier, en raison de cette épidémie. Une fois de plus on a traité ceux qui y travaillent, et qui sont au plus près du terrain avec le plus grand mépris sans aucune considération pour la pénibilité de leur tâche. Et durant tout ce temps le pouvoir n'a cessé de mentir, continuant de supprimer des lits d'hôpitaux.
Mais si ce virus a, depuis un an, rendu obsolète la vision du réel de ceux qui nous dirigent, ces derniers n'en continuent pas moins de nous infantiliser, dissimulant leurs échecs, et essayant à la faveur de cette nouvelle maladie de nous imposer un nouveau système de contrainte, un nouvel ordre que Barbara Stiegler a bien décrypté. (Pour ceux qui sont allergiques à Ruffin, il y a aussi cet entretien fait à la librairie Mollat, vénérable et respectable institution bordelaise)
Eh oui… On ne négocie pas avec un virus, on ne gruge pas un virus, on ne fait pas du nudge avec un virus, on ne temporise pas en présence d'un virus, on ne calcule pas en fonction d’une stratégie électorale quand on est confronté à un virus. On fait face, ou bien on est submergé. C'est donc ça l'élite éclairée, qui s'autoproclame "premiers de cordée" ? des pauvres nazes prétentieux incapables d’intégrer une notion simple : face au covid, il n’est de stratégie dilatoire qui vaille, tout retard de décision entraîne une aggravation inéluctable de la situation dans les quinze jours. Il s'agit simplement d'écouter ceux qui savent ce qu'est une courbe exponentielle. Angela Merkel par exemple. On ne peut être sans cesse dans le déni et l'entêtement. Ça Jessica Arden, par exemple, la première ministre de Nouvelle-Zélande l’a bien compris, et a été capable de s'adapter à cette nouvelle situation au contraire de notre petit prétentieux qui reproduit les mêmes erreurs depuis un an. Et l'on s'aperçoit que ces gens qui ne cessent de nous exhorter à "sortir de notre zone de confort", à "changer notre logiciel" à "nous adapter", sont bien moins souples qu'ils veulent bien le prétendre, et disposent d'assez peu de plasticité intellectuelle.
Donc on va rester coincés à Paris pour quelques temps encore selon des modalités à peu près aussi difficiles à comprendre que "Finnegans wake" de Joyce. Nous allons donc "reconfiner mais sans confiner tout en confinant, une sorte de confinement déconfiné en quelques sorte", comme j'ai pu le lire sur un réseau social. Une sorte de confinement de Schrödinger. Tu confines et ne confines pas à la fois.
Si j'ai bien compris, on aura quand même le droit d'aller dans les jardins les parcs et les bois, et de marcher dans les rues avec une auto-attestation dérogatoire, cette forme d'humiliation de plus en plus insupportable.

mercredi 17 mars 2021

Sans suite

 
Voilà,
ce semi-confinement qui n’en finit pas incite à se replonger dans les vieux fichiers. Même si en y regardant de plus près on se dit que c'est ainsi qu'on aurait du traiter la plupart des photos, on y retrouve ces tentatives demeurées sans suite, peut-être parce que sur le moment le résultat s'était révélé décevant au regard du temps qu'on y avait passé. Je me rappelle avoir testé ça avec les playmobils d'Irina. Vraisemblablement, à l'époque, j'avais envie de mélanger différents plans de perspectives comme je l'avais vu, je crois dans une vidéo de Bill Viola. Et sans doute, la récente visite d'une exposition consacrée à Braque avait aussi laissé quelques traces.
Que ces naïves images d'enfance, ne nous fassent pas oublier cependant que, nous sommes au 17 mars 2021, parvenus au jour du dérèglement : c'est à dire que la France a émis, en 77 jours, l'intégralité des gaz à effet de serre qu'elle devra, afin de respecter son objectif de neutralité carbone, émettre en une année à partir de 2050. On est loin du compte. Mais, en raison vraisemblablement du couvre-feu en vigueur depuis début Janvier nous avons tout de même retardé de douze jours cette échéance par rapport à l'année dernière. C’est bigrement positif n’est-ce-pas ?

dimanche 14 mars 2021

Des nouvelles d'ici et du forsythia


Voilà,
j'ai réentendu ce matin ce morceau de Charles Ives, intitulé "the unanswered question" qui m'a immédiatement saisi. Il me semblait avoir déjà fait, il n'y a pas si longtemps, une entrée au sujet de ce compositeur au destin si singulier mais je n'en retrouve pas la trace. Ce morceau, je ne l'avais pas encore mémorisé, si bien que je ne l'ai pas identifié à l'écoute, même s'il m'évoquait vaguement quelque chose. Il m'a toutefois transporté avec la même intensité. 
 
(...)
 
Je suis dans un état de grande fatigue. 
Le médecin m'a dit, il y a deux jours, vous pouvez désormais vous considérer comme convalescent, mais lorsque je lui ai demandé pour combien de temps, il m'a répondu qu'il était dans l'incapacité de me répondre, car il ne disposait pas de recul ni d'informations suffisantes concernant cette maladie. Et puis au passage il m'a rappelé quelques facteurs de comorbidité pour me signifier que finalement je m'en étais plutôt bien sorti.
 
(...)
 
Je passe des jours étranges donc. Je m'efforce de sortir mais je m'épuise vite. Et lorsque je suis à la maison je ne parviens pas à me concentrer pour lire et pour écrire. J'ai du mal à enchaîner mes pensées, et mes propos sont fort décousus. Sinon les tâches de maintenance me semblent insurmontables. J'écoute beaucoup la radio ou des plateformes de streaming. Hier, de nombreux morceaux de Buffalo Springfield, de Poco, et d'un groupe psychédélique américain des années soixante appelé "The Litters" et en particulier l'album "$100 Fine". Je regarde des documentaires : un très passionnant et assez fouillé réalisé, par Fabrice Maze, sur Duchamp, un autre sur le peintre Wilfredo Lam. Mais parfois il m'arrive de m'endormir, sans m'en rendre compte et de me réveiller deux heures plus tard, sans comprendre ce qui m'est arrivé. Je regarde aussi des vieux livres de dessins de Saul Steinberg, des résumés de matches du championnat néo-zélandais de rugby Aotearoa, qui donne lieu à des gestes spectaculaires et acrobatiques. Je suis dans un temps sans mesure, qui n'est pas zen pour autant. Il m'arrive parfois de regarder la télévision. L'autre jour en voyant une interview de Corinne Rey, dite Coco, dessinatrice qui a survécu à la tuerie de Charlie Hebdo, j'ai fondu en larmes tout seul dans mon salon.

(...)

Sinon, bien qu'il fasse un temps gris pluvieux et froid, tout à l'heure en sortant pour faire quelques courses j'ai vu que le forsythia était en fleurs, sensiblement au  au même moment que l'année dernière où j'étais encore en mesure de dire des choses pertinentes. Alors comme à l'accoutumée on va se dire que le printemps est arrivé. Un peu plus tard au détour d'une rue, au cours de ma promenade j'ai retrouvé une vieille connaissance. Je ne lui ai pas posé de questions.
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vendredi 12 mars 2021

Pouvoir nouveau


Voilà,
"ces derniers temps, un pouvoir nouveau et fortifiant s'est affirmé dans ma réflexion sur moi-même, pouvoir que je suis maintenant, et maintenant seulement, en état de reconnaître, parce que à force de stérilité de tristesse, je me dissous positivement dans la semaine qui vient de s'écouler" (Franz Kafka in "Journal") Linked with the weekend in black and white)

jeudi 11 mars 2021

Rayons printaniers

 


Voilà,
en regardant cette image, on peut presque penser qu'elle rappelle des jours heureux, des jours paisibles, des jours insouciants. C'était bien avant le confinement. C'était un temps où l'on pouvait profiter du premier soleil printanier sur les berges de la Seine, faire comme si le monde alentour n'existait pas. S'abandonner à un plaisir archaïque, animal, auquel nos ancêtres à peaux de bêtes, lorsqu'ils se sentaient à l'abri du danger, devaient aussi s'adonner, comme le font nos chats nos chiens et tant d'autres animaux. Profiter avec gourmandise de l'offrande de la lumière. Savourer cette joie paisible et solaire. Fermer les yeux, et entre œil et paupière s'immerger dans la couleur orange. J'enviais, cette capacité d'abandon. Car ce jour-là quelque chose me tourmentait. Une effroyable et silencieuse catastrophe venait d'avoir eu lieu, et personne ne semblait en prendre la mesure. Peut-être parce que c'était loin. Peut-être parce qu'on ne peut prendre sur soi tous les malheurs du monde. Peut-être parce que le déni nous permet de survivre. Pourtant quelques heures auparavant il y avait eu cela qui était arrivé.
 
 
C'est une catastrophe lente qui pourtant continue. On n'en parle plus. Un désastre chasse l'autre. S'efforce-t-on de croire qu'elles ne font que se remplacer quand au contraire elles s'additionnent ? Depuis quelques années l'humanité doit payer la note. Mais ceux qui détiennent les cordons de la bourse ne peuvent s'y résoudre. Cette réfutation obstinée a quelque chose de pathétique. Elle caractérise notre espèce qui s'entête à se mesurer à la nature. A fabriquer des situations critiques qu'elle se refuse d'anticiper en s'en remettant à la providence, en pariant sur la quasi improbabilité du risque. Il y a peu l'épidémie de Covid, nous a démontré qu'en cas d'accident industriel majeur en France, au contraire de ce qu'affirment les pouvoirs publics nous ne sommes pas en mesure de faire face. Nos infrastructures hospitalières sont inadaptées. L'armée est incapable de défendre la population. L'État a depuis longtemps abandonné les citoyens au profit des intérêts privés. A la faveur de cette épidémie, on a pu constater combien l'argent de la fraude fiscale, qui devrait servir au bien commun et aux infrastructures du pays a pu manquer. Mais on continue, cependant, comme si de rien n'était. Business as usual serait-on tenté de dire. 
Et puis, on continue aussi à nous prendre pour des cons, et d'une certaine façon pourquoi s'en priver puisque ça marche. Ça marche pour tout. A croire que les gens raffolent de ça. Ainsi peut-on lire et entendre, qu'aucun cancer, aucune maladie n'est due à une contamination nucléaire à Fukushima. Qui peut raisonnablement croire ça ?  Mais c'est la fiction que Tepco et les pouvoirs publics japonais ont mis en place et relayent de façon permanente par des médias qui leur sont acquis. Heureusement il existe d'autres sources d'information. Toute façon c'est là. On n'y peut rien. On ne peut contenir ce désastre. Il est désormais un des éléments constituants de notre condition humaine. Il nous reste la musique


mardi 9 mars 2021

Les grandes aventures

 
Voilà
"Je n'arrive pas à penser à quelque chose. Je m'ennuie toujours et c'est pour ça que je me lance dans de grandes aventures. Je descends dans des gouffres. J'escalade un pic. Je traverse un bras de mer. Je dévalise une banque. J'avoue que tout ça m'ennuie encore plus. Je n'aime pas les grandes aventures. Mais j'espère qu'elles vont me permettre de penser à quelque chose et de m'ennuyer moins." (Norge in "Les Oignons")
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dimanche 7 mars 2021

Fort à propos


Voilà,
le fromager Vacroux, institution de la rue Daguerre, rue commerçante du XIVème arrondissement de Paris, immortalisée par la cinéaste Agnès Varda qui y vécut  et lui consacra un documentaire intitulé "Daguerréotypes" a fait représenter sur son rideau de fer un paysage bucolique où ne manquent ni la vache ni la biquette ni le sourire de la bergère, ce qui somme toute se révèle fort à propos.
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jeudi 4 mars 2021

Ahlala


 
Voilà,
cette année passée nous aura comme anesthésiés. C’est une sensation étrange : car les événements les péripéties du début du premier confinement se sont effacés. Un an qu'on ne parle que du Covid. 
A peine si l'on se souvient les points presse de la porte-parole du gouvernement. Comme s'ils n’avaient pas existé, comme si elle-même n'avait jamais été de ce monde, et comme si tous les errements du début de la pandémie n'avaient été qu'une fiction. Pourtant il y a un an on demeurait stupéfait par la bêtise effarante l’aplomb les mensonges de Sibeth N’Dyaye. On se demandait par quel miracle autant de nullité pouvait atteindre une telle audience.  C'était un numéro de clown tout à fait assumé. La bêtise fière d'elle-même. Évidemment les élucubrations stupides de Trump outre Atlantique, avaient plus d'audience et étaient encore plus sidérantes. Mais tout de même, nous parvenions en matière de bêtise ouvertement assumée à combler notre retard à grand pas. 
Et les mensonges des responsables de la santé, toute l’impéritie des pouvoirs publics les manquements de l’État en matière de santé, le scandale des masques, l'absence de tests, tout ça qui était si énorme et qui pensait-on ne manquerait pas de faire l'objet de commissions d'enquêtes afin que soient jugées les responsables. 
Certains se sentaient des vocations de procureurs. On allait voir ce qu'on allait voir.  Collés à leurs écrans ils se répandaient en imprécations solitaires sur le réseau sociaux. On n'en resterait pas là . Ça ne pourrait jamais être comme avant, après. C'est fou quand même tous ces gens qui ont des solutions à nos problèmes et qui passent leur temps sur facebook ou twitter. "Une fois l'urgence passée, il faudra bien en revanche que les responsables sanitaires et politiques rendent des comptes sur la manière dont ils se seront révélés totalement pris de court par un risque sanitaire parfaitement identifié, avec une situation en l'occurrence très peu grave par rapport à ce que serait une vraie pandémie tueuse." disait l'un. 
"Il faudra aussi répondre de l'inaptitude à répondre vite et bien (comme d'autres nations) en requérant au besoin de manière contraignante la mise à disposition des capacités industrielles et scientifiques pour faire ce qu'il aurait fallu." vitupérait un autre. 
Entre leurs quatre murs beaucoup se sentaient démangés par le prurit révolutionnaire. "Rappelons que le risque pandémique est redouté depuis plus de 30 ans, en provenance d'Extrême-Orient comme désormais des toundras subarctiques, à risque de libérer d'innombrables variétés de virus jusque là congelées sous le permafrost... Un peu donc comme si dans une région à risque de tremblement de terre, on n'avait ni prévu de normes de construction antisismique ni de procédures de protection de la population ! Ceci alors que des cohortes de hauts fonctionnaires et universitaires étaient généreusement payés pour anticiper ces risques". Je ne sais plus qui a écrit cela. Quelqu'un qui croyait que la justice est indépendante du pouvoir politique. Quelqu'un qui pensait que les gens fortunés ont l'amour de la patrie chevillé au corps et se soucient de l'intérêt de la nation. Un romantique révolutionnaire en chambre. Or que voit-on aujourd'hui ? Un an après. La résignation, l'oubli. la fatigue, la dépression. Le goût pour la lutte s'est bien émoussé.
Tout cela semble aujourd’hui lointain et comme fictif. D'ailleurs il est difficile d'en trouver des traces sur Internet. Tout ça s'est dilué dans une sorte d'éternel présent uniquement relié à l'épidémie. Le virus est devenu le maître des horloges. Quant aux projets de lois mal goupillés qui devaient trouver le peuple sur leur chemin, ils repassent en catamini, sans rencontrer de grande opposition.
 
Tout ce qui précède le premier confinement semble s’être perdu dans un lointain aussi incertain que confus. Pour ma part, mes albums de photos sont les seuls éléments qui me permettent de reconstituer les semaines qui ont précédé, où ce qui advenait en Chine semblait ne jamais devoir nous atteindre. Par exemple je me souviens de cette "nuit des Bodysnatchers", à la cinémathèque où  Philip Kaufman était présent, à laquelle j'avais assisté avec Pascal. Nous avions regardé les quatre films, réalisés sur ce thème. Je me souviens qu’une seule personne dans l'assistance portait alors un masque. Mais dans ma mémoire tout cela semble relever d'une vie parallèle, d'un souvenir bien plus lointain. Je peux toutefois me rappeler l'empressement qui fut le mien à aller voir un maximum de spectacles, de films, d'expositions au début du mois de mars
 
Ces derniers temps une émission de divertissement, s'amuse à revenir sur l'actualité un an en arrière, jour pour jour. Ces piqûres de rappel, nous donnent l'impression que ce pays n'a pas avancé d'un iota, puisqu'on en est encore à parler de reconfinement, et que ce qui se passait à l'époque pour les tests et les masques se reproduit aujourd'hui avec les vaccins. C'est la même désorganisation et l'improvisation dans les chaînes de décision, la confusion dans les objectifs et tout le monde y va de son point de vue. Il y a des commissions des sous commissions, des agences locales, régionales, des comités transversaux, interceci intracela, de suivi de prospectives, des experts qu'on consulte et qu'on n'écoute pas. Ce qui ressort de tout ça, c'est le ridicule dont se couvre notre pays qui s'autorise à donner des leçons à tout le monde et qui n'est pas plus capable de concevoir un vaccin que d'en produire et à toute les difficultés à organiser la vaccination de la population.
Ahlala !  comme on dit en France. 
Je me suis rappelé cette sculpture qui se trouvait quai de Conti au début des années 10. 
Aux images récentes je ne trouve plus beaucoup d'attrait.
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