de nouveau étreint par cette sensation d'urgence et de nécessité. Comme si dire et montrer étaient la seule issue possible la seule forme d'exorcisme pour évacuer ou plus exactement amadouer l'angoisse, qui d'ailleurs n'en est plus tout à fait une, puisque dit-on l'angoisse est sans objet. Or devant le faisceau de trop de signes concordants, une panique mêlée d'effroi vient au jour, une peur grandissante comme celle que provoque depuis la côte encore ensoleillée la vision lointaine d'un ciel lourd où s'amoncellent de sombres nuages que le vent portera bientôt dans votre direction. Et tout à coup cette stratégie semble ne plus être vraiment la bonne et cette volonté de mots et d'images paraît dérisoire, sinon vaine et inutile. Tant et tant de phrases de dessins de photos accumulés ces cinq dernières années. Certes, j'ai ainsi acquis l'estime de quelques inconnus, l'affection discrète et bienveillante de certains autres. Parfois se sont esquissés des correspondances, des échanges... Mais au fond, c'est toujours la même solitude, la même impression d'égarement et le même sentiment de perdition que j'éprouve à chaque fois, devant l'écran où s'alignent ces petits signes, comme autant de misérables gredins. Jamais me semble-t-il je ne connaîtrai de façon durable la paix intérieure. Jamais non plus mon prochain. Que vais je faire désormais ? Je me disperse dans l'infinie variation des formes à la recherche de significations pour annuler l'emprise despotique d'une tristesse qui me hante comme un amour fantôme.
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