jeudi 21 août 2025

Vers le bleu du jour

 

Voilà,
Il y a des choses qui se refusent à ma raison comme un chat se refuse à l’eau. La foi par exemple. Bien qu’elle ait, en certaines époques et dans certaines communautés inspiré des merveilles, comme cette chapelle d'un village de Bourgogne – et ça c’est très concret –, elle reste une énigme. J'en ai déjà précédemment parlé, et j'y reviendrai sans doute. Ce n'est pas que je traverse une crise mystique, mais cela occupe mon esprit ces derniers temps. Certains lieux, certaines circonstances favorisent ce genre de supinations et pronations mentales. Il m'arrive de temps à autre d'interroger cette idée, de chercher, de la tourner dans tous les sens. Elle est, depuis que je suis en âge de réfléchir, toujours présente avec plus ou moins d'intensité enfouie dans mes pensées. Comme un vieux Rubik’s cube dont je ne serais jamais parvenu à me débrouiller mais que je garderais tout de même, au cas où, dans un tiroir...

Les églises se remplissent et se vident au gré des siècles, les dieux meurent et renaissent sous d’autres noms, mais la foi, elle, persiste, en dépit des objections. Elle n’exige pas de preuves, se moque des arguments. Elle est là, obstinée, comme l’herbe entre les pavés ou les pierres. Certains prétendent qu’elle console, qu’elle donne un sens, qu’elle réchauffe les nuits trop longues. Peut-être. Mais il est aussi possible qu’elle ne soit qu’un leurre, un déni de réalité une de ces belles histoires qu’on se raconte pour conjurer la peur du silence.
 
Des savants, des philosophes, des poètes l’ont justifiée au prix de contorsions intellectuelles. Ce n’est ni une équation, ni un théorème. Pour Kierkegaard elle se présentait comme un saut subjectif, un engagement personnel envers une vérité excédant la logique. Wittgenstein la considérait comme une forme de vie intérieure exprimée dans des pratiques des rituels et un langage spécifique et pour cela, pensait-il, elle ne pouvait être envisagée de l’extérieur.
D’autres y voient une réponse à l’appel d’un mystère qui nous dépasse. Certains la considèrent comme une illusion correspondant à un besoin de protection infantile. Il est toujours facile de la réfuter puisque la foi est une adhésion à l’Invérifiable.
 

 
 
Quoi qu’il en soit, elle échappe. Autant à ceux qui la possèdent qu’à ceux qui la refusent. Elle semble parfois surgir en des moments étranges où l’on se surprend à espérer sans savoir quoi.
Chercher à comprendre ? Peut-être vaut-il mieux l’observer de loin, comme on regarde un avion s’éloigner dans la nuit étoilée. On ne saura jamais où il va, mais on a la certitude qu’il mène quelque part. Après tout, le mystère qui désigne bien des choses n’est pas fait pour être percé, mais pour nous rappeler que le monde est plus grand que nos doutes et nos certitudes.

                                                         Marianne   : un mystère s’il vous plaît 
                                                         Le serveur : il n’y a plus de mystère 
                                                         Marianne   : alors un verre d’eau
                                                         In "Pierrot le fou" de Jean-Luc Godard

Et si la foi n’était, au fond, qu’une façon d’admettre qu’on ne sait pas, tout en constituant le meilleur moteur pour avancer dans la vie ? un pari, comme le suggérait Pascal — le seul où l’on mise tout en sachant qu’on ne verra jamais les dés. Après tout, dans un monde où tout s’explique, il reste bien peu de place pour l’émerveillement. Oui la foi c’est cette certitude tenace que quelque chose, quelque part, répond dans l’écho du silence.
Plutôt que d’y voir une lâcheté, une fuite devant l’absurde, on peut tout aussi bien y reconnaître une forme achevée de lucidité sur le fait que la raison, si puissante soit-elle, ne comble pas tout. Pourquoi, dès lors, ne pourrait on pas s’accrocher, non à une vérité, mais à l’idée qu’il y en a une. Moins par naïveté, que par défi. Parce que croire, même sans preuve, c’est encore une façon de refuser que le dernier mot revienne au néant. 
Faute de compréhension, tourner son regard vers le ciel. Vers le bleu du jour qui nous cache toutes les énigmes qui scintillent dans la nuit ouverte sur l'infini.

14 commentaires:

  1. Your reflection captures faith not as a solution but as a persistent riddle

    RépondreSupprimer
  2. Beautiful photos. The chapel looks lovely!

    RépondreSupprimer
  3. À te lire, me voilà à divaguer dans la timbale de l'univers (Peut-être une timbale à lancer les dés). L'extrait de dialogue de Pierrot le Fou est une perle.

    RépondreSupprimer
  4. I think roentare's comment is perfect. Faith is an everlasting riddle. Thank you for linking up.

    RépondreSupprimer
  5. Nice photos! Thank you for sharing your thoughts about faith with us at #weekendcoffeeshare.

    RépondreSupprimer
  6. Great shot of this beautiful example of architecture.

    RépondreSupprimer
  7. I love that last line. If it makes you happy, then go for it - but don't pretend you aren't using it for hate if you are (obvs not you personally). I watch these 'Christians' driving out the poor and not helping the sick and it makes me quite sick at the hypocrisy. Disgusting.

    RépondreSupprimer
  8. "There are plenty of good reasons for fighting,' I said, 'but no good reason ever to hate without reservation, to imagine that God Almighty Himself hates with you, too." Kurt Vonnegut

    RépondreSupprimer
  9. Des pensées profondes. Certaines m'ont inspiré pour grimper mentalement. D'autres me font douter. Parce que la foi est quelque chose de très personnel pour moi. Peut-être à cause de l'histoire, car il y a eu tant de guerres de religion ? Ou parce que l'institution de l'Eglise, quelle qu'elle soit, me répugne.

    Merci pour votre message !

    RépondreSupprimer
  10. Faith misused is worse than no faith at all.
    Thanks for sharing at https://image-in-ing.blogspot.com/2025/08/on-recent-vacation-to-midwest-we.html

    RépondreSupprimer
  11. Faith is like the sugar that we put in our cups of bitter coffee. Some people take much sugar, others less, some none at all. It is a matter of taste, a way of satisfying one's sweet tooth, perhaps a way of annulling the bitterness of an extra strong brew? Yet others take their coffee strong and black with no sugar. We respect people's need of sugar, it is a matter of taste after all... Thanks for taking part in the "My Sunday Best" meme.

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires a été activée. Les commentaires ne seront publiés qu'après approbation de l'auteur de ce blog.