Voilà,
il faut être positif m'a-t-on récemment fait remarquer en commentaire au bas d'une publication, et c'est vrai que je peine à saisir les nombreux motifs d'allégresse qui s'offrent à moi. Aussi vais-je derechef réparer cette erreur, changer de lunettes, observer le monde autrement, et sur-le-champ me réjouir de n'être pas Ouïghour du Xinjiang en ce début de vingt et unième siècle. Parce que franchement quand tu es Ouïghour en ce moment, pas grand monde se préoccupe de ton sort. Tu as beau être respectueux du Coran, aucune des monarchies pétrolières du Moyen-Orient, aucun grand pays musulman ne lève le petit doigt pour toi. Aucun Imam de banlieue ne se soucie de tes problèmes. Pas de Jihad pour te sauver. Pas de protestation officielle. Mon pauvre, tu n'as pas la chance d'être une caricature de papier, pour justifier une indignation. Tu peux crever la gueule ouverte comme esclave dans des champs de coton, te faire dépecer et prélever tes organes pour constituer des banques de greffons, on peut te traquer grâce à des logiciels de reconnaissance faciale qui te sont exclusivement destinés, personne n'en a rien à branler. Puisque toi aussi tu es turcophone tu pourrais espérer un peu d'aide sinon de compassion de la part de ce président toujours prompt, depuis son palais d'Ankara à traiter d'islamophobes les démocraties européennes. Mais pas de bol, si tu as eu la naïveté de penser que tu trouverais un asile politique dans la région, comme tu ne pèses pas grand chose en comparaison d'accords commerciaux, te voilà immédiatement réexpédié en Chine où tu rejoindras un de ces camps de concentration astucieusement renommé camp de rééducation par le travail et de transformation par l'éducation. Le monde ne se préoccupe pas plus de toi, pauvre Ouïghour qu'on ne se préoccupait des juifs européens dans les années trente et au début des années quarante. La plupart des gouvernements des grandes démocraties fermaient alors les yeux en se réjouissant secrètement que quelqu'un, sans aucune mauvaise conscience, fasse le boulot qu'ils n'osaient pas faire. Je me réjouis donc, non de ton malheur, mais de ne pas avoir jusqu'à présent subi l'injustice qu'il y a à naitre en telle époque et tel endroit plutôt qu'ailleurs ou en autre temps. Même si sous ces latitudes et ces jours-ci, il y a quand même de sérieuse raisons de douter de la possibilité d'une intelligence collective, quand on voit les gens se précipiter dans les magasins par temps de pandémie.
Je me demande si c'est typiquement parisien ou bien juste un ravage
de la société de consommation, ces attroupements. Cette bêtise est-elle particulièrement
française ? Les gens ne se rendent-ils pas compte de l'affront fait à tous les soignants qui sont en
première ligne ? Ou est-ce simplement la nature humaine, cette connerie là, alors qu'on sait que les courbes de contamination ne baissent plus
depuis une semaine et que tout laisse augurer d'une troisième vague ?
Peut-être ne s'agit-il que de la manifestation de ce qu'on appelle un
biais cognitif, c'est à dire "une distorsion que subit une information en entrant dans le système cognitif ou en sortant. Dans le premier cas, le sujet opère une sélection des informations, dans le second, il réalise une sélection des réponses"(Jean-François Le Ny).
Il existe ainsi des biais d'attention lorsque les perceptions sont
influencées par nos propres centres d'intérêts, par exemple, mais aussi
des biais de raisonnement comme préférer les éléments qui
confirment une hypothèse plutôt que ceux qui l'infirment, ou bien encore
travestir la réalité d'un problème en le
transformant en fonction des réponses (les outils) dont on dispose. De
nombreux autres biais ont été répertoriés. La période que nous
vivons offre bien des occasions d'observer ces travers autant que d'en
être victimes. Ce n'est pas nouveau, mais cela atteint désormais un
seuil critique. Le point positif, c'est que cela me donne l'occasion de réfléchir, m'incite à construire des phrases pour me frayer un chemin à travers de confuses pensées quand tout m'incite à me coucher et à me retrancher "du cocotier de l'espèce" comme écrivait Beckett
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...eyes are so expressive in a mural.
RépondreSupprimerYour idea of looking on the bright side is quite contrarian. We all know deep down: there’s no bright side.
RépondreSupprimerbe safe... mae at maefood.blogspot.com
Great mural--- and Bright sides are hard to find. Perhaps after the Orange Clown is sent away. As for the French? I don't think they have a monopoly on stupid.
RépondreSupprimerA very thought-provoking post, Arnaud. What a mess we are in. I often wonder if we have got worse is it just that we now know so much more about what happens around our world.
RépondreSupprimerTrying to sit on the bright side, however, I like the mural. Though, the more I look at it, the more those eyes look full of fear and anxiety.
I agree with Debbie, they eyes look fearful. Thanks for participating in Monday Murals.
RépondreSupprimerAs for the Uyghur, I too agree that Muslin countries will never extend their welcome to them, or put any pressure on China to treat them well, but they will always point fingers at Western countries for being Islamophobic. We live in a very complex world and more than ever we are aware of atrocities, crimes against humanity, wars, etc, etc...it's a sad world, we all need to be a bit kinder to each other.
Have a lovely Christmas Arnaud
This may be a thought provoking mural for a shop that sells vision supplies, but it's hard at times to look on the bright side of life when there are so many bad things going on in the world. I hope you have a lovely Christmas and can find a bright side, even if for just one day.
RépondreSupprimerPour ce qui est des regroupements d'homo-economicus, la France n'en a pas le privilège. Les plages au Brésil sont bondées (c'est l'été) et de moins en moins de Brésiliens croient à l'existence du coronavirus à mesure que le nombre de morts augmente. Cherchez l'erreur !
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