mercredi 6 décembre 2017

Un Mort chasse l'autre



Voilà,
une mort éclipse l'autre. Hier on n'en avait que pour Jean d'Ormesson, cet aimable écrivain de droite mais si médiatique, et si sympathique, télégénique, affable, courtois au point qu'on se disait, "ah si tous les aristocrates avaient été aussi distingués, il n'eût point été nécessaire d'en décapiter autant". Et puis cette nuit Johnny Hallyday est mort. Les journaux du matin n'ont pas pu faire leur première page sur ce  récent événement qui supplante l'autre. Du coup deux images de la France sont offertes en couverture du journal "Le Monde" et du "Figaro". C'est vrai que la disparition d'un artiste de variétés renommé ou d'une vedette de cinéma populaire atteste du fait que, quoiqu'on veuille, on est assigné à une appartenance, une histoire collective, une identité nationale. Johnny Hallyday, malgré son pseudo à consonance américaine (assez ridicule quand on y songe) et le fait qu'il soit d'origine belge, constitue un élément important et particulièrement représentatif de la culture populaire française des soixante dernières années. Même si je ne l'ai jamais particulièrement apprécié (je ne possède aucun disque de lui dans ma discothèque et j'avais plutôt tendance à le considérer comme un gros blaireau), il a toujours existé et fait partie du paysage. Dans le milieu des années soixante il était la vedette incontestée des baby-boomers. C'était l'époque où tout ce qui venait d'Amérique, et en particulier le rock, les vêtements (c'est l'apparition des jean's) les films était objet d'adoration. Et puis les Américains avaient délivré la France, ils disposaient de bases militaires dans ce pays, et le commandement intégré de l'OTAN se trouvait même non loin de Paris. Ce chanteur tout au long de sa carrière a épousé presque toutes les modes sans jamais quitter le paysage médiatique national. Je ne peux pas m'empêcher pour ma part de l'associer à un oncle ( l'oncle Jean-Jacques, tu me rappelles Jean-Jacques disait la génitrice quand elle voulait être blessante) que je trouvais très con et qui était un de ses fans absolu, et aussi bien sûr à des souvenirs souvenirs d'enfance. Par exemple l'Algérie, ses disques  — mais aussi ceux de Danyel Girard (Petit Gonzalez) ou Richard Anthony (quand j'entends siffler le train) — diffusés sur le bord de la piscine de l'hôtel de Djelfa, lors de soirées dansantes. Je me rappelle après l'une d'elles, un retour terrifiant dans une Mercédès décapotable conduite par un certain Sportès, où debout derrière, je hurlais d'effroi à cause de la vitesse, et mon géniteur assis à la place du passager s'esclaffait joyeusement. Je me rappelle aussi de vacances chez mon grand-père, et l'on rapportait dans le journal Ouest-france que lorsqu'il était passé dans la commune de Doué-la-Fontaine, des jeunes (ceux qu'on appelait alors les blousons noirs) avaient dévasté la salle de concert (c'était comme un rituel). Enfin bref, Johnny est mort, il a toujours fait partie de mon paysage sonore, et donc pour beaucoup c'est le premier jour de la France sans lui. Mais ce peuple n'en continuera pas moins d'être arrogant braillard chauvin râleur et d'une grande veulerie, et ses garçons de cafés seront toujours aussi désagréables dans l'ensemble.
A part ça les Italiens ont encore Adriano Celentano. C'est un autre style, plus roublard, plus coquin, et assez déjanté. Il a quand même fait en 1973 un rap en mishmash.

13 commentaires:

  1. https://www.newyorker.com/news/daily-comment/the-untranslatable-french-love-for-johnny-hallyday

    I guess I missed him-- His fame must not have cracked the American top 40. I found this from the New Yorker.

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    1. the new yorker's article is excellent and very relevant.

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  2. Oh yes--- I enjoyed reading your thoughts very much.

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  3. Ah que tu me fais du bien. Rien à ajouter ni à retirer, je me ("nous", l'orthographe inclusive autant en profiter!) reconnais parfaitement ici. J'ai une petite faiblesse pour "Claude Moine", tellement plus gentil, bon toi je ne sais pas. Et puis tu vas me faire connaître Adriano Celentano. (? à cette minute). Jean d'O/Jonnhy, excellent réflexe (de journaliste, que j'ai appris et abandonné). Plus important : je serai heureux si ta crise de blog (sans parler de la mienne) a été un exercice d'assouplissement.

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    1. Même Claude Moine je le trouve lourdaud et pathétique. Et puis tous ces rockers qui ont fait leur service militaire me semblent bien suspectS. Bon j'ai une petite tendresse pour Dutronc, parce qu'il a de l'humour et un sacré talent d'acteur. Déjà petit je l'aimais bien, il était décalé. Sinon pour Celentano, c'est impossible que tu ne l'aies jmais entendu. C'est une usine à tube. il a même inventé le rap italien en 73. Il joue aussi son propre rôle dans la dolce vita. Après je ne suis pas très objectif, j'aime la variété italienne, même la plus ringarde. On a ses contradictions

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    2. Merci de ce mot. Bien d'accord. Pour ne pas jeter le bébé, je ne sors pas de l'idée militaire que même si les pertes ont été moindres, l'énigmatique 1968 a plus changé le monde, au final, que l'horrible 1948. Dutronc et Polnareff me semblent à un siècle des yéyés. Puis, enfin, Roda-Gil que Juju a peut-être trop oublié, Souchon-Voulzy, Jonasz, Manset... ça sonne déjà mieux. Bref avec tout ça. Etre vrai. Et Johnny H. ça me rappelle surtout de sales années d'enfance, et merveilleuses mais ailleurs. Celentano j'y vais, j'ai menti en disant "à la minute". A toi

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  4. Bien des parenthèses. Alors autant la vraie, tâcher de dormir. C'est le message, "ça fait toujours plaisir". Promis juste après toi j'éteins.

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  5. À te lire il semble bien difficile d'être français, un français critique et lucide...
    Johnny fait partie de mon histoire aussi, en parallèle avec ma vie, pas de croisements non plus.
    Sinon nous nous avons Julio Iglesias, pas mieux!

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    1. Oui difficile d'être français. C'est un pays dont les gouvernants ont toujours voulu donner des leçons au reste du monde au nom de grands principes qui sont battus en brèche dans nos frontières. Cette croyance en une grandeur qui n'existe plus exaspère. En plus on a la gauche la plus stupide du monde. Notre baudruchon est une belle caricature franchouillarde. Et les français ont toujours ce fantasme de l'homme providentiel à qui s'en remettre. mais bon on a France-Musique et France-Culture et ça c'est une chance. Donc tout n'est pas si sombre :-)

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    2. Oui, très difficile !!! Heureusement la langue. J'ai passé ma jeunesse à vomir l'Académie française, on finirait par s'y habituer après quatre siècles, faut des repères quand même quand on faiblit !

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    3. Pardon dans ce fil de ne pas avoir parlé à Colo. Jules des Eglises ? Tu as sûrement raison, et j'ai eu tort dans ma vie de croire qu'après les Pyrénées y avait rien. Vraiment tort. A cause de mon Rhin. Oui, ça vient comme ça, c'est sincère, blessure pas pirouette enfin les deux gna gna

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    4. Je ne m'en tirerai pas comme ça. Gaffe je vais arrêter sur le mot : contradiction (un seul le d)

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