Voilà,
j'ai de moins en moins de choses nouvelles à raconter et à montrer sur ce blog. L'envie me quitte doucement d'écrire et même de photographier, et c'est la raison pour laquelle, de plus en plus fréquemment, je republie d'anciens articles. En outre, trop souvent je me répète, m'insurgeant devant les mêmes choses. Mon espace intellectuel se rétrécit. Ma capacité d'émerveillement se tarit. Le monde me fatigue toujours un peu plus. Tant de nouvelles alarmantes s'accumulent. Il y a des prises de conscience qui, à l'époque où nous vivons devraient se faire mais n'adviennent pas. Je ne parle pas seulement des désastres écologiques, dont les gouvernements des grandes puissances et les décideurs de l'industrie semblent pour la plupart se contrefoutre totalement.
S'il n'y avait que ça, cela serait déjà terrible. Mais la militarisation croissante de la planète, la mainmise des oligarchies sur les gouvernements, la multiplication des pouvoirs autoritaires, la restriction des libertés dans un nombre croissant de pays, l'appauvrissement des populations, la recrudescence des génocides en cours dans de nombreux endroits, la décivilisation à l'œuvre dans le monde entier, à l'exception de la Chine peut-être, le triomphe de la bêtise de l'arrogance de l'irresponsabilité dont Trump est le parfait exemple, mais qui advient aussi lentement dans le pays où je vis, tout cela me consterne. Le monde fait un bruit de fond qui m'affole. Je veux dire qu'il me rend littéralement fou. L'envahissement des images trafiquées, des fake-news sur les réseaux sociaux n'arrange rien.
Bien sûr je pourrais me satisfaire de partager des poèmes glanés ici ou là au cours de mes lectures. De publier des photos sans aucune légende, ou bien me contenter de rendre compte des nombreux films que je vois, (car je vais souvent au cinéma, comme on se drogue). Ou encore témoigner des quelques expositions auxquelles je me rends. Mais je n'en ai même plus la force. Cette contrainte que, jusqu'ici, je me suis imposé par hygiène mentale, pour essayer de lutter contre l'engourdissement de la pensée me pèse de plus en plus. Je me réveille le matin sans envie ni désir. Je traîne au lit et m'abandonne à des rêveries qui me ramènent à des périodes lointaines de ma vie. Je n'aime pas ce que j'entends et vois autour de moi.
Je repense à ce qu'écrivait en 2009, dans "N'espérez pas vous débarrasser des livres", Umberto Eco, — c'était l'époque de Berlusconi (comme on oublie vite) — "L’ignorance est toute autour de nous, souvent arrogante et revendiquée. Elle fait même du prosélytisme. Elle est sûre d’elle, elle proclame sa domination par la bouche étroite de nos politiciens. Et le savoir, fragile et changeant, toujours menacé, doutant de lui-même, est sans doute un des derniers refuges de l’utopie. [...] Le savoir, c'est ce dont nous sommes encombrés et qui ne trouve pas toujours d'utilité. La connaissance, c'est la transformation du savoir en une expérience de vie." Je ne peux m'empêcher de mettre cela en relation avec ce qu'a déclaré Lech Walesa il y a quelques mois, suite à l'élection du candidat populiste au poste de président de la Pologne, : " La démocratie en Pologne s'est effondrée le 1er juin 2025. Pour la première fois de l'histoire, la moitié de la société polonaise a élu un président qui est un proxénète, un escroc, un usurier, un menteur et un toxicomane – avec le soutien indéfectible de l'Église catholique, qui est censée prêcher les valeurs de l'Évangile. Ce n'est pas mon président et ne le sera jamais. […] La Pologne est ma patrie, mais ce n'est plus mon pays. Pour l'instant, je m'exile intérieurement – dans le monde de la nature, de la musique et des livres. Ce qui m'attend ensuite, je l'ignore. Pour ma santé mentale, je vais arrêter de lire ce qui se passe en Pologne. Je ne commenterai plus l'actualité. J'ai besoin de prendre soin de moi. Adieu Pologne." C'est — quand on s'approche de la mort —une sage décision. Je devrais m'efforcer d'en faire autant.
je comprends... c'est très dur de continuer malgré tout ce qui s'écroule, dur de trouver un sens...mais continue please
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