dimanche 29 avril 2012

Rassemblement de Bercy

Rassemblement socialiste à Bercy
Voilà,
toujours autant de mal à me mêler à la foule, à participer à sa liesse, à partager les enthousiasmes populaires, les espérances et les exaltations collectives. Toujours je me tiens en bordure, en lisière, circonspect voire méfiant. J'aimerais bien parfois, me départir de ce scepticisme qui relève moins d'un principe que de ma nature profonde. Mais c'est là probablement une des manifestations de mon inaptitude quasi-ontologique à croire. Quoiqu'il en soit, il m'est arrivé d'être ému ce jour là, par la foule, par sa générosité naïve. Si j'avais du mal à m'y intégrer tout-à-fait je pouvais cependant me reconnaître dans cette multitude. Pas le cas, en ce qui concerne ceux de l'autre bord, avec leur morgue, leur mépris de l'autre, et les relents nauséeux qu'exhalent de leur discours.

samedi 28 avril 2012

Chanter dans le vent glacé

Le commerce de l'eau
Voilà,
il pleut presque tous les jours depuis trois semaines. Quand il ne pleut pas, il fait froid, il y a du vent des nuages et le soleil est rare. Ça, la campagne électorale nauséabonde, les contrariétés de la vie quotidienne (celle entre autre ne plus pouvoir se chauffer), les perspectives guère réjouissantes engendrées par la crise financière et les désastres industriels et écologiques que l'on ne pourra plus dissimuler très longtemps, tout cela rend maussade et mélancolique. Pourtant j'entends un oiseau chanter au dehors. Comme s'il chantait obstinément envers et contre tout. Bien sûr je prête à ce volatile des intentions qu'il n'a probablement pas. Hier dans le bus, passant non loin de la rue Christine j'ai repensé à une certain moment sous une porte cochère et à ce mail reçu quelques heures après, avec en pièce jointe une chanson qu'alors je ne connaissais pas. C'était au temps des brioches tressées de la rue Caulaincourt. Maintenant voici venu celui des brioches stressantes du franprix du coin.
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jeudi 26 avril 2012

Triste anniversaire


Voilà,
26 ans après on en est encore là, avec un sarcophage en béton qui n'est toujours pas achevé, et le premier sarcophage qui fuit de toute part. Quant aux nouvelles de Fukushima elles ne sont guère plus rassurantes. On va doucement vers le pire, dans l'indifférence générale et l'aveuglement au désastre somme toute plus confortables qu'un changement de paradigme. Et comme ils sont toujours d'une actualité brûlante, les aphorismes de Cioran "Nous savons maintenant que nous galopons vers des horizons d'apoplexie, vers l'âge d'or de l'effroi. Si l'histoire avait un but, notre sort à nous autres qui n'avons rien accompli, comme il serait lamentable. Mais dans le non-sens général, nous dressons, roulures inefficaces, canailles fières d'avoir eu raison. Plus d'un signe annonce l'hégémonie du délire Nous voici maintenant à la fin des tristesses prudentes et des anomalies prévues".

mercredi 25 avril 2012

En lisant Frédéric Pajak

Le jardin devant la maison de Lestiou
Voilà
dans "L'humour" l'excellent livre de Frédéric Pajak et Yves Tenret consacré à Joyce sont évoqués dans les pages relatant la période parisienne de l'écrivain irlandais, André Spire, Ludmila Savitzky, John Rodker. Tout ces noms sont pour moi liés à Dominique, qui avait connu ces personnes dont elle parlait quelquefois. André Spire, poète aujourd'hui méconnu, quoique ma fille doive ces jours-ci apprendre un de ses poèmes à l'école, avait habité une maison à Avaray tout près de Lestiou dans le Loir et Cher où Dominique a été inhumée auprès de sa mère, voilà déjà deux mois. Je l'ai vue cette demeure d'Avaray, tout au bord de la Loire. Ce devait être autrefois un endroit merveilleux. Et puis, édifiée sur l'autre rive, la centrale nucléaire de St Laurent des eaux a transformé une vue bucolique en paysage industriel. Des lignes à hautes tension ont été tendues passant à proximité de cette maison où je suis allé avec Dominique rendre visite à Marie-Brunette la fille du poète, une de ses amies d'enfance. La mère de Dominique, Marianne était l'une des deux filles de Ludmilla Savitzky, (l'autre fut connue plus tard comme auteur, journaliste et même scénariste sous le nom de Nicole Vedrès). Ludmilla, en son temps très réputée dans le Paris litteraire de l'entre deux guerre, fut la traductrice de Joyce, Pound, TS Eliot, Virginia Woolf, Isherwood, mais aussi d'un certain John Rodker, sur lequel je reviendrai plus tard. Marianne donc épousa un héritier de la lignée Chautemps, un médecin dont elle eut deux enfants Dominique et Jean-Louis qui devint par la suite et demeure aujourd'hui encore un saxophoniste de Jazz réputé. Ce docteur Jacques (je crois) Chautemps (je l'appris bien des années plus tard) fut le médecin qui accompagna et tenta de soigner Roger Gilbert-Lecomte avant que de le faire hospitaliser à l'hopital Broussais, là même où qulelques années auparavant était mort Paul Verlaine. Après son divorce elle épousa donc John Rodker. Je ne sais trop à quelle époque et sans doute était il plus âgé qu'elle. Elle n'eut pas d'enfant avec lui. John Rodker né en 1884 avait été au début du siècle membre d'un groupe d'écrivains et de peintres anglo-juifs réunis sous le nom de "Whitechapel boys". Il créa dans les années vingt, une maison d'éditon "Ovid press" qui publia entre autres Ezra Pound et T.S. Eliot. ainsi que des dessins et des reproductions de peintures du groupe Vorticiste, les futuristes anglais. Ses activités éditoriales le conduisirent à cette époque à de fréquents séjours à Paris. Il contribua à la deuxième édition de "Ulysse" de Joyce qui le tenait au nombre de ses amis. Il fut un de ceux qu'il appelait ses douze apôtres, qui participèrent à une apologie collective du work in Progress de Finnegan's Wake sous le titre "Our Exagmination round His Factification for Incamination of Work in Progress". Entre autres contributeurs il y avait Samuel Beckett et William Carlos Williams. Leur traductrice commune Ludmilla Savitzky avait prêté un appartement à Joyce et sa famille quand ils débarquèrent à Paris en 1920. C'est donc sa fille qu'il épousa bien des années plus tard. Dans les années trente Rodker créa the Imago Publishing Company et contribua avec l'aide d'Anna Freud à la traduction et à la publication des œuvres complètes de Freud en langue anglaise. Je me souviens que Dominique parlait avec beaucoup d'émotion de sa grand-mère Lud qui fut quelqu'un de très important pour elle. Pour en finir avec l'évocation de John Rodker, celui-ci avait, avec une certaine Sonia Cohen eu dans sa jeunesse une fille nommée Joan dont il ne s'occupa guère je crois. Lors d'un séjour à Londres, vraisemblablement en 74 ou 75 nous eûmes avec Agnès l'occasion de rencontrer cette dame, alors âgée d'une soixantaine d'années, qui nous fit un charmant accueil dans sa maison de Kensington. Elle nous invita même au théâtre à une représentation de "Travesties" de Tom Stoppard. C'est une curieuse coïncidence dans l'agencement de  tous ces souvenirs : la pièce raconte sur le mode comique la rencontre improbable à Zurich en 1917 de Joyce, Lénine et Tzara qui s'y trouvaient alors tous trois en exil.

Agnès et Dominique à Lestiou (Avril 1986)

mardi 24 avril 2012

Le Fenestron de la cuisine


Voilà
j'aimais particulièrement ce lieu. La petite cour au seuil de la maison. Le fenestron de la cuisine. La paisible harmonie de ce coin d'ombre et de fraîcheur où s'épanouissaient des plantes aromatiques.  J'y découvrais la simple beauté des choses, et cela rassurait celui qui n'avait grandi que dans la laideur et le mauvais goût prétentieux. On y prenait parfois l’apéritif, on y mangeait aussi de temps à autre. Souvent il y avait quelqu’un derrière la fenêtre, (parce que c’est là que se trouve l’évier) quelqu’un en train de laver la salade par exemple. J’ai passé beaucoup d’étés dans cette maison. C’était une maison de famille, une famille dont j’ai longtemps fait partie, et qui de cœur est toujours restée la mienne. Mais comme dit la chanson, et comme on le voit à la fin de E.T., la vie sépare ceux qui s’aiment. Parfois, tellement je me sentais chez moi, j'imaginais que nous aurions pu grandir ensemble tous les quatre avec L. et D. qui étaient comme des sœurs pour moi, et A. qui devint bien plus qu’une sœur. Je m'inventais une vie passée autre songeant aux jeux qui auraient pu être alors les nôtres... J’avais dix sept ans la première fois où je suis venu... Ce fut un merveilleux été, autant qu'un total changement de paradigme. Il y a eu ça dans ma vie, la joie solaire de cet été là. Et de nouveau je songe à Dominique qui avait accueilli tous ces jeunes gens turbulents, imprévisibles et parfois inconséquents que nous étions alors. Agnès, Laurence, Delphine, Pierre, Barbara et son chat Tibulle, Suzan, Anthony, ceux de passage Jérôme et Amélie... (linked with the weekend in black and white)

jeudi 19 avril 2012

Totale régression


Voilà
oui, totale régression lecture et petits gâteaux au lit
(mais de bonnes lectures, à déguster comme une gourmandise)
Faire le moins de miettes possible.

mercredi 18 avril 2012

Comme une image du XIX eme siècle

 
Voilà,
quand je suis reparti dimanche de l'esplanade de Vincennes, après les beaux discours programmatiques de Bertrand Delanoé et de François Hollande (en fait j'ai pris la tangente avant que ce dernier ne termine), j'ai aperçu cet homme sur l'avenue de Paris. Il était si absorbé à démêler les fils d'un sac de jute qu'il ne s'est pas rendu compte de ma présence. J'ai quand même volé ce cadre à l'arrache. J'ai scrupule à faire ça. Qui est cet homme ? Quelle est sa vie ? D'où vient-il ? comment en est-il arrivé là ? Quel accident, quel secret désespoir l'ont amené à cette extrémité à ce dénuement ? Pourtant, je l'ai photographié, comme un mur, comme une bête dans un zoo, sans son consentement, et je ne cache pas son visage. Il n'est plus qu'une image. Réduit pour moi à cet état d'image. Lisse, aseptisée, un effet de style. Si l'on oublie les chaussures de sport et le sac en plastique à sa droite, cette photographie pourrait avoir été prise à la fin du XIX eme siècle, ou au début du XXéme (elle fait songer aux clichés réalisés par Jack London, dans les quartiers du East End à Londres vers 1902). Je pourrais même avec les effets que permettent les nouvelles technologies lui donner une certaine patine, fabriquer un autre temps. Et c'est cela qui est terrible. Ce sac et ces chaussures nous rappellent précisément que nous sommes au début du XXI ème siècle. Cette misère qu'on voudrait d'un autre temps, la voilà qui se répand à nouveau de sorte qu'il est impossible de ne pas voir. Écrivant cela je m'aperçois aussitôt que j'ai la mémoire courte, que les images accumulées se laissent ensevelir par les plus récentes. Les jambes dénudées du clochard du zen café, les homeless de New York avec leur caddies, les hommes qui dorment sur les plaques d'égout à Paris, la vieille dame au casque de moto trainant ses cartons la nuit dans une rue huppée de Londres. C'est toujours la même vision : celle du point de non retour, du naufragé devenu épave, si sale si répugnant que le courage manque pour lui tendre la main afin qu'il se relève. D'ailleurs le veut-il, le peut-il encore ? Et quant à moi en suis-je capable, en ai-je même le désir ? Je me souviens il y a longtemps quand je voyageais sans le sou, avoir dormi que d'un œil dans des gares, sur la terrasse de villas fermées, dans des maisons en chantier, entre des rochers, sur des plages froides, ou même dans les fossés. Cela me semblait terriblement aventureux, un peu rimbaldien, cela faisait songer à Kerouac, avec le mythe de la Route. Et puis c'était aux beaux jours et j'avais la vie devant moi. Mais bon, il ne faut pas que la fugue dure trop longtemps. Si l'on sait ce que l'on quitte sans savoir les moyens d'aller où l'on veut, il est probable que tôt ou tard on en vienne à se perdre. Puis j'ai vu des routards se clochardiser, passer de la marge à la zone, de l'errance au rebut. Et ensuite toutes les victimes de la misère économique, les laissés-pour-compte. Je me suis alors rappelé ces moments d'inconfort, les habits sales que l'on garde jour et nuit, les toilettes à la va-vite réduites au minimum, la solitude où l'on marche dans l'écho des voix intérieures, trop nombreuses et confuses, et le sentiment d'abandon et de perdition qui gagne peu à peu. Ces hommes à terre sont la figure de mon propre effroi devant une menace que je redoute, et que j'espère de la sorte exorciser.  

mardi 17 avril 2012

La France conne


Voilà
Je les ai approchés ces gens. En masse, rassemblés. Entre eux. Très blancs, souvent très embijoutés. Bien vêtus, avec des habits de marque. Ils me paraissaient d'un autre temps d'un monde autre, ou plus exactement il était clair que je n'étais pas du leur. Peu de générosité sur ces visages qu'il m'est hélas interdit de montrer. Tout le contraire. Une sorte de morgue et de méchanceté plutôt. Le mépris affiché de ce qui ne leur ressemble pas. Et cette volonté manifeste de ne surtout pas partager leurs privilèges. Tous ces drapeaux tricolores aussi, vidés de leur sens premier. Ce nationalisme stupide et étriqué, ce pétainisme toujours rampant, cette xénophobie affichée qui caractérise la France dont ils se réclament. Je ne me mêle pas beaucoup de politique, mais je connais bien l'histoire de ce pays et je sais de quoi ces gens avec cette bonne conscience infatuée d'elle même, sont porteurs. Il y a des droites plus recommandables que celle-ci, et je comprends mal qu'autant d'individus puissent désirer qu'un affairiste aussi incompétent et déséquilibré, aussi dénué de scrupules, aussi vulgaire et démagogue, les représente. Se reconnaissent ils vraiment en lui ? Qu'est ce qui les aveugle à ce point et les séduit ?  Comment ne peuvent ils pas voir qu'il veut les entraîner dans la confusion de sa propre folie ? Oui je crois vraiment que cet homme est un pervers narcissique et peut être même légèrement psychopathe. 

dimanche 15 avril 2012

Meeting électoraux


Voilà 
Dimanche gris et froid. Aujourd'hui les deux principaux candidats à l'élection présidentielle qui ont opté pour le plein air vont faire leur grand rassemblement parisien, l'un place de la Concorde, l'autre à l'esplanade du château de Vincennes. J'irai vraisemblablement faire des photos à l'un ou l'autre de ces meetings peut-être aux deux... Chacun va essayer de montrer qu'il en a une plus grosse que son adversaire. De foule je veux dire. Quant à ce qu'il s'y proclamera, il est probable que cela se réduira de nouveau à de fumeuses promesses qui ne hausseront pas le niveau de ce qui a été entendu auparavant. 

samedi 14 avril 2012

Something is happening and you don't know what it is


Voilà,
perdu dans d'interminables et labyrinthiques couloirs, il avait longtemps erré avant de parvenir enfin à cet escalier qui lui semblait situé dans un hall mais dont il n'était pas tout à fait certain qu'il ne fut pas non plus à l'extérieur. Dans le bâtiment désert, à l'exception de silhouettes presque transparentes quelques marches plus bas qui, si par hasard il s'avisait de leur adresser la parole, lui causeraient - de cela il était persuadé - bien des tracas (il n'est en effet jamais bon de causer avec des fantômes inconnus) son retard désormais ne faisait plus aucun doute, et jamais il ne retrouverait la salle d'examen. S'accoudant à la rambarde il constata que le visage se reflétant dans la vaste baie vitrée de l'Edifice non seulement ne ressemblait plus au sien, mais en outre, paraissait beaucoup plus jeune. Pourtant avec ses articulations douloureuses il s'éprouvait en mode semi-stable avec des problèmes d'automorphisme récurrents. Des plans de réalités divers glissaient mollement sur des temporalités aussi confuses qu'inadéquates. Les perspectives s'anamorphosaient imperceptiblement. Il devait se rendre à l'évidence : accorder ses courbes elliptiques et ses formes modulaires devenait de plus en plus difficile. (Linked with Weekend reflections)

vendredi 13 avril 2012

Cimetière chinois


Voilà,
en cherchant autre chose je suis retombé sur cette photo prise il y a longtemps au cimetière chinois de Manille, un vendredi après midi, ce détail a son importance. Le cimetière chinois ressemble à un petit village de vacances. Les tombes sont en fait de véritables villas aux architectures contrastées, certaines traditionnelles en forme de pagodes, d'autres plus récentes dans le genre pavillonnaire avec des jardinets. Le week-end, les riches familles qui ont des concessions là, viennent tenir compagnie aux ancêtres et y partager leur repas. Parfois, on y amène le cochon que l'on va griller au barbecue. Celui-là, ne passerait pas la semaine c'était sûr. Je crois que l'enfant le savait. Ce moment si redouté, auquel il ne voulait pas penser, il n'allait pas tarder à arriver. Depuis ce jour, dans mon existence il y a ce petit garçon grave, méditatif et peut-être mélancolique, qui partage les dernières heures du condamné afin de le réconforter. Peut-être lui adresse-t-il de secrètes prières en le caressant affectueusement. Bien sûr c'est une interprétation. C'est ce que j'ai cru comprendre de cette scène aperçue entre les tombes, dans le silence de ma promenade, par une chaude après-midi d'avril. C'était si surprenant et incongru comme ce panier de basket à Baby lane, la section réservée aux enfants morts-nés relégués dans leurs limbes de pierre. (Linked with the weekend in black and white)

mercredi 11 avril 2012

Depuis l'île


Voilà
avec un peu d'audace, de maturité, d'intelligence ou simplement de confiance en moi, j'aurais pu en faire mon lieu de ce paysage, et m'ancrer dans cette terre. Incapable de décider seul, sans doute attendais-je un conseil un encouragement une complicité qui m'aurait incité à passer à l'acte, et ma vie sans doute en eût été changée. Au lieu de quoi me suis-je entendu dire "C'est ton histoire c'est toi qui vois". Et dans cette histoire, il y avait l'oncle fou toujours vivant, la grand-mère prématurément morte  sans que je m'en souvienne et les aiguilles de radium du grand-père encore présentes dans la commode en fer blanc. Je suis reparti sans conclure. Mais bon c'était il y a longtemps n'en parlons plus. (Linked with the weekend in black and white)

mardi 10 avril 2012

14 Juillet 83 (2)


Voilà
cela fait presque trente ans que cette femme s'est hissée à cheval sur la barrière. C'est un moment décisif. Celui de la réflexion qui précède le passage à l'acte. Son objectif est de parvenir à se mettre debout en équilibre. Y parviendra-t-elle ? Pour le moment un observateur attentif pourrait se demander si elle n'est pas, assise ainsi à califourchon sur la barrière, surprise par la nouveauté de la posture et ce qu'elle offre de confort et d'embarras tout à la fois. Mais bon, elle ne peut s'attarder de la sorte. Elle est tout de même venue voir le défilé. Trouver un poste d'observation, s'avère une tâche redoutable avec une part de risque et d'incertitude non négligeable. Une nécessaire évaluation de la situation s'impose.

lundi 9 avril 2012

Histoires de larmes


Voilà
ce matin j'ai lu d'une traite le très émouvant et réussi livre d'Olivia Rosenthal "Ils ne sont pour rien dans mes larmes", qui tient à la fois de l'essai, de la poésie et du recueil d'entretiens. Quatorze réponses à la question "Quel film a changé votre vie ?". Question à laquelle il me serait d'ailleurs vraiment difficile de répondre (il faudrait que j'y songe). Je crois que certains films ont peut-être modifié ma perception du monde... Je ne suis pas sûr d'être finalement si perméable au cinéma que cela puisse changer ma vie... Quoiqu'il en soit, les témoignages sont forts, et ce que Olivia Rosenthal, raconte d'elle et de sa vie à travers le cinéma est particulièrement intense et émouvant. 

dimanche 8 avril 2012

Se faire Le Point


Voilà,
c'est peut-être un réflexe pavlovien, mais toujours est-il que lorsque je passe devant le "Relay" de la gare du Nord, dans le couloir de correspondance entre la ligne du RER B, et la ligne 5 du métro, mon regard est souvent attiré par la couverture exposée en évidence dans la vitrine. D'ailleurs ça a un côté installation post-moderne. On y mettrait un coyote à la Joseph Beuys, ou un cadavre de SDF traité à la plastiline et découpé en tranches, façon Damien Hirst ou Professeur Gunther Von Hagens, ça aurait même un peu plus de gueule, et ça serait en accord avec le cynisme de l'époque et ces conneries que la presse nous sert en lettres bien grasses. Après Marilyn, je l'avais dit qu'on ne serait pas au bout de nos surprises... Ça donne parfois envie de se retrancher du cocotier de l'espèce européenne, d'aller se réfugier à Launceston ou mieux encore à Vanuatu et y finir ses jours défoncé au kava. Si encore on pouvait plutôt voir ça dans nos paysages ce serait plus drôle au moins.


samedi 7 avril 2012

Dormir pour oublier (7)

Rue de Seine (2004)

Voilà,
"Représentation complaisante de sujets, de détails obscènes dans une œuvre artistique, littéraire ou cinématographique", telle est la définition de la pornographie. En ce sens cette image réalisée en 2004, (elle pourrait aussi bien dater d'hier, mais ce n'est pas un hasard si je ne la publie qu'aujourd'hui) est une représentation pornographique, et je l'assume comme telle. Elle est obscène, en tant qu'elle montre la mort non seulement sociale, mais aussi physique au travail. Elle l'est dans son rapport entre un corps forcément devenu désincarné dès lors qu'il s'inscrit dans la surface lisse de la photo et ce dessin sur l'affiche avec cette silhouette de businessman. Elle l'est puisque le dormeur s'exhibe dans son dénuement. Mais voilà, je vis dans ce monde qui ne me laisse pas le choix, qui me contraint à voir ça, qui m'impose d'une certaine façon de l'ignorer (car il m'est impossible de répondre à toutes ces aumônes), et qui m'interdit de le montrer au nom d'une morale qui déclare inconvenant de profiter de la misère pour faire une photo. Quoiqu'il en soit, une photo de la misère sera toujours obscène non par ce qu'elle montre, mais par ce dont elle est, par nature, incapable de rendre compte :  l'odeur souvent, la puanteur parfois qui rend aux yeux de la plupart des passants (qui eux non plus ne sentent pas toujours très bon) si insupportable et repoussante la réalité de l'exclusion avérée définitive et sans retour.

vendredi 6 avril 2012

Hey Bulldog

Hey Bulldog
You don't know what it's like to listen to your fears
You can talk to me
You can talk to me
if you're lonely you can talk to me

mardi 3 avril 2012

La femme aux bas bleus


 
Voilà,
à quelques jours d’intervalle un clown célèbre et un ancien Premier ministre s’étaient suicidés. Parfois René Mordèvre se demandait s’il ne serait pas plus raisonnable de quitter un pays où de tels événements pouvaient survenir. C’était une période confuse. Souvent le soir, il errait de troquets en bistros, acceptant, lui pourtant si timide, de converser avec des inconnus. Et parce que les jolies jambes d'une femme accoudée au bar avaient, depuis la rue, attiré son attention, il était à cette heure plus que tardive, venu s'échouer dans un boui-boui crasseux et enfumé que fréquentaient quelques habitués. Au bout d'un moment la femme aux bas bleus avait fini par s'apercevoir qu'il ne la quittait pas du regard. Elle lui avait alors souri — il lui manquait une canine — puis en titubant, était venue s'asseoir à sa table. Elle avait le charme d'une beauté en train de se fâner, le visage légèrement bouffi et l'œil un peu vitreux. Elle était quand même bien éméchée déjà. Durant une bonne heure tout en lui faisant du pied, elle n'avait cessé de se plaindre des vicissitudes de la vie moderne. Puis s'était mise à lui raconter la façon dont quelques-uns de ses amis avaient mouru. La vie c'est terrible, disait elle, on attrape une grippe et une nuit en se retournant dans son lit on tousse un peu trop fort et clac à peine le temps de sentir la douleur rupture d'anévrisme on se retrouve de l'autre côté à l'état de chose sans avoir eu le temps de se demander ce que l'on pourrait bien devenir. René Mordèvre opinait du chef, ne sachant que répondre. Il était préoccupé. Le dos de sa main gauche le démangeait depuis quelques jours et à force de grattages la peau s'y était peu à peu effilochée.  De grandes plaques blanches étaient apparues qu'il tentait de dissimuler à grand peine. Lorsqu'en minaudant, elle lui demanda tout à trac "Ton secret ne veux-tu pas me raconter ton secret, raconte-moi ton secret et je serai ton festin”, René Mordèvre répondit sèchement que festin ou pas, elle n'aurait pour lui jamais autant de goût qu'un de ces petits pâtés composés de pâte brisée farcie d'un hachis de mouton mariné avec des zestes d'orange et de citron dans de la cassonade, qu'il avait autrefois goûtés à Béziers. Puis il s'était brusquement levé. Stupéfaite, essayant de comprendre ce qu'il venait de dire, elle l'avait regardé, fouiller dans sa poche, pour y extraire un billet chiffonné, qu'il avait aussitôt jeté sur la table avant se sortir sans même lui adresser un regard. Elle resta un long moment, médusée, la lèvre molle fixant la porte d'un œil torve. "pauvre mec...tordu...espèce de pédé" grommela-t-elle tout en reniflant.

lundi 2 avril 2012

Le petit Messager


Voilà
celui-là je l'aime particulièrement. Je ne sais plus si je l'ai réalisé dans l'attente de ma fille, ou peu après qu'elle soit née. Mais je sais qu'il est intensément lié à elle. Il me ressemble si peu, il est si léger, si affranchi, que je m'étonne encore qu'il soit de moi. Je sais juste qu'après l'avoir fait, je me suis senti comme libéré. Dans mon existence, ce dessin est un petit miracle. Il a quelque chose de magique. Il est détenteur d'un secret. Et la trace d'une transformation. En fait, je crois que je voudrais plus souvent ressembler à ce personnage dans la vie. Je veux dire dans ma vie avec tout le monde. Il est dans mon escalier. Je crois que je le regarde assez fréquemment. Jamais je ne l'aurais fait sans Elle.  
(shared with friday face off

dimanche 1 avril 2012

Rameaux


Voilà
donc c'est ça c'est bien ça on commémore le jour où Pépère était plutôt en colère. Il se doutait bien quand même que ça allait être une semaine agitée, avec ce qu'il avait en tête. Peut-être que s'il avait connu les hypotenseurs ça se serait passé autrement, mais bon, c'est toujours pareil : les passages à l'acte quand on est un peu surmené on n'a pas toujours les idées claires, des fois ça part un peu en quenouille. Ce n'était quand même pas une raison pour s'en prendre à un malheureux figuier juste pour un caprice, une envie de femme enceinte. Surtout après s'être fait accueillir aux portes de la ville par des gens qui agitaient des branches d'arbres coupées en signe de bienvenue. C'est bien la peine de faire le modeste juché sur un âne, pour s'en prendre ensuite à un figuier. Il eût été plus juste d'aller directement au temple pour y foutre le souk. Un  figuier ! C'est quoi ces façons de malpoli ? Maudire un pauvre arbre, le condamner à ne plus donner de fruits, c'est ridicule, c'est grotesque et après ça va geindre "père pourquoi m'as tu abandonné ?" En tout cas le mien (d'arbre) en donne un déjà un (de fruit). Je ne sais pas ce que ça cache. Oh tout petit, je ne le mangerai pas. Le laisserai aux oiseaux. Un truc que je ne comprends pas, pourquoi la fête des rameaux, pourquoi pas celle du figuier ?