lundi 28 février 2011

Catalogue Dinky Toys


Voilà
il ne comprend pas. Se lever le matin devient pénible, difficile presque. Il lui faut s'appuyer, procéder avec lenteur, prudence. Veiller à maintenir l'équilibre. Des douleurs nouvelles et incompréhensibles sont apparues. C'est arrivé sournoisement sans qu'il y ait prêté garde. Il ne se reconnaît plus. S'étonne se questionne. Cet invisible ennemi a-t-il un nom ? Est ce une maladie ? Cela n'aura-t-il qu'un temps ou bien certaines forces commenceraient elles vraiment à prendre congé? Il faut se résoudre donc, acquiescer si ce n'est à la dégradation, du moins au déclin. Pourtant il est encore là l'enfant qui rêvait autrefois sur les catalogues Dinky Toys. Le semi-remorque argenté, il joue encore avec, la nuit, dans un autre corps une autre époque. La Caravelle et la Panhard traversent des paysages qui n'existent plus, des paysages où la circulation était rare, mais qui le hantent parfois la nuit, évocateurs d'une paix désirée qui n'a jamais eu lieu.  Il peut encore ressentir le plaisir tactile qu'il éprouvait alors à manipuler ces jouets ; l'odeur de la caisse en bois où il les entreposait, son cerveau peut la lui restituer avec une effarante précision. Benoît Moristel a tous les âges de sa vie, mais le corps à présent ne sait plus trop bien articuler ces années vécues. Il ne se sent pas vieux,  non, juste encombré. Trop d'histoires confuses entendues sans qu'il fut alors capable de les appréhender, de choses vues qu'un trop jeune regard n'était en mesure de supporter. Très vite il a su que toute la beauté du monde jamais ne pourrait suffire à cacher la laideur et la cruauté des hommes. Et pourtant il s'accroche. Tiens bon la rampe bonhomme, le pire est à venir.

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